Raison, sentiments et rendements négatifs

Publié le 20 octobre 2017 à 15h44

Bernard Aybran

Le dernier prix Nobel d’économie, Richard Thaler, a construit ses travaux autour des failles dans la rationalité des agents économiques. Loin de se comporter en homo economicus, les ménages et les entreprises feraient preuve de comportements peu rationnels. Ou du moins, leur rationalité s’appuierait parfois sur d’autres raisonnements que la simple comparaison de prix.

Les flux de capitaux vers les différents marchés donnent un exemple de ces raisonnements. Ainsi, la rémunération servie par les obligations atteint aujourd’hui dans la plupart des grandes économies des niveaux particulièrement faibles. Pourtant, sur les dix dernières années, ce sont plus de 1 400 milliards de dollars nets que les investisseurs mondiaux ont apportés aux fonds obligataires, qui n’ont jamais été aussi peu rémunérateurs. Pire : alors qu’ils sont certains d’y perdre de l’argent, les investisseurs européens ont acheté plus de 270 milliards d’euros nets en fonds monétaires sur les quatre dernières années. Est-ce à dire qu’ils sont irrationnels ? Ce serait un peu rapide et leurs achats massifs se voient motivés, au moins en partie, par des obligations réglementaires, qui contraignent les institutionnels (fonds de pension, assureurs, caisses de retraite) à investir dans certains types de titres et de signatures. Et le fait qu’ils puissent trouver plus rémunérateur ailleurs ne les dispense pas de respecter leurs obligations.

Si le cœur a ses raisons que la raison ignore, l’investisseur a ses raisons qui attendent encore un prix Nobel.

Bernard Aybran Head of portfolio management ,  Allfunds

Bernard Aybran est head of portfolio management chez Allfunds

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