Incertitude et croissance ne font pas bon ménage

Publié le 15 juillet 2016 à 16h49    Mis à jour le 15 juillet 2016 à 18h07

Didier Borowski

Le Brexit a remis au goût du jour la notion de «choc d’incertitude». La plupart des études empiriques confirment que l’incertitude pèse sur l’activité économique. Et ce n’est pas nécessairement en raison d’un resserrement des conditions financières. Pour expliquer, il y a plus de trente ans, pourquoi l’incertitude modifie les décisions d’investissement, Ben Bernanke mettait en avant comme premier canal de transmission le coût élevé de la réversibilité d’un investissement, versus celui lié à l’attente de nouvelles informations. L’incertitude vient brouiller les cartes et il peut être raisonnable de reporter dans le temps les décisions d’investissement en attendant d’y voir plus clair. Pour les mêmes raisons, on observe – deuxième canal – que les entreprises peuvent ralentir leurs embauches, et le phénomène est d’autant plus marqué que la rigidité du marché du travail est forte car les coûts de réversibilité sont élevés. Enfin, troisième canal, les ménages peuvent différer leurs achats de biens durables et former de surcroît une épargne de précaution s’ils craignent pour leur emploi.

Après le vote pour le Brexit, le niveau d’incertitude politique s’est envolé au Royaume-Uni à des niveaux jamais atteints. La dépréciation rapide du sterling face à l’euro et au dollar illustre, sans grande surprise, que le pays est beaucoup plus touché que la zone euro. Même s’il reste membre de droit de l’UE pendant au minimum deux ans, il y a tout lieu de croire que les trois canaux évoqués seront à l’œuvre et feront tomber l’économie britannique en récession. En revanche, dans la zone euro, les perspectives sont plus encourageantes avec des conditions monétaires et financières très accommodantes. L’investissement peut se tasser, mais on n’attend en revanche d’impact ni sur le chômage, ni sur la consommation.

Didier Borowski Responsable recherche politiques macro ,  Amundi Investment Institute

Didier Borowski est responsable de la recherche sur les politiques macroéconomiques au sein de l’Amundi Investment Institute. Auparavant, il a exercé plusieurs fonctions : responsable de la stratégie Taux et Changes, co responsable de l’équipe de Stratégie et Recherche économique, responsable de la macroéconomie puis plus récemment responsable global views. Avant de rejoindre Amundi, il était économiste et stratégiste senior de Société Générale Asset Management (2000-2009). Didier Borowski a commencé sa carrière au sein de la Direction de la Prévision du Ministère de l’économie et des finances. Il a également exercé les fonctions d’expert auprès de la Commission européenne. Didier Borowski est Docteur ès sciences économiques. Il a été Professeur associé à l’Université Paris Nord (2007-2011) puis a enseigné plusieurs années à l’université Paris-Dauphine.

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