Improbable désynchronisation

Publié le 4 mai 2018 à 9h57    Mis à jour le 11 mai 2018 à 10h42

Jean-François Boulier

En nous projetant quelques trimestres en avant, ce qui n’est jamais inutile, que pouvons-nous attendre de l’entrée en récession américaine sur l’économie de la zone euro ? Y aura-t-il découplage, ou sinon, comment se prémunir contre les turbulences induites par la fin du cycle américain pour des portefeuilles investis en valeurs européennes ?

La relance budgétaire du président Trump ne modifiera pas l’inévitable, l’Amérique entrera bientôt en ralentissement voire en récession si l’atterrissage s’avère plus difficile. La politique menée par les autorités américaines pourra au mieux retarder l’événement, mais au risque de l’accentuer. Après tout, le cycle américain aura été l’un des plus longs de son histoire économique. L’Europe et particulièrement la zone euro sont en net décalage de cycle par rapport aux Etats-Unis. Cette situation habituelle se trouve amplifiée par la crise des dettes souveraines en zone euro qui a retardé son rebond économique de plusieurs années. Certains experts évoquent déjà le passage du haut de cycle de la zone euro et notent les verrous structurels bloquant l’expansion européenne, et ce d’autant que le Brexit aura des effets nocifs sur plusieurs secteurs du continent. L’Europe suivra-t-elle les Etats-Unis ou trouvera-t-elle les moyens d’éviter le choc négatif de la récession américaine ?

Il y a plus de dix ans, la même question se posait à propos des pays émergents : y aurait-il découplage ou, comme c’était le cas généralement, synchronisation des cycles ? La réponse a été oui et non : les pays émergents ont été entraînés dans la crise mondiale mais la relance chinoise a permis leur sortie bien avant le rebond américain. Y aura-t-il une autre forme de découplage cette fois-ci entre les Etats-Unis et le reste du monde ? La taille du déficit commercial américain finançant la croissance mondiale et la guerre commerciale qui menace constituent de réelles inquiétudes. Les portefeuilles en zone euro sont aujourd’hui plus investis en actifs risqués, actions, immobilier ou actifs réels qu’en moyenne en raison de la faiblesse des taux et du risque de leur remontée, certes encore distante si l’on écoute la BCE. Le risque d’un impact négatif de la récession en Amérique n’est donc pas à négliger. L’achat de titres à taux fixe en dollars, émis par des entreprises de qualité ou même des souverains émergents pourraient, avec la remontée des taux à dix ans au-dessus de 3 %, constituer une opportunité de rendement et une protection contre la récession qui va se profiler.

Jean-François Boulier Président d'honneur ,  Af2i

Jean-François Boulier est président d'honneur de l'Af2i.

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