La main tremblante de Janet Yellen

Publié le 2 octobre 2015 à 17h20

Thierry Million

Le discours très accommodant de Mme Yellen à l’issue du statu quo sur les taux directeurs a surpris les observateurs. Dès cette annonce, les rendements des emprunts d’Etat américains ont baissé de l’ordre de 0,10 % dans un mouvement de repentification de la courbe des taux. Le marché s’attendait plutôt à être prévenu d’un très prochain relèvement des taux centraux. Pour justifier son inaction, Mme Yellen a mis en avant les difficultés des pays émergents qui potentiellement pourraient affecter la croissance américaine et faire baisser une inflation qui déjà refuse de remonter. Il est manifeste que la Fed a manqué en septembre une fenêtre idéale de tir. En effet, les deux prochains FOMC d’octobre et de décembre vont être perturbés par la délicate renégociation du plafond de la dette américaine et par le phénomène de fin d’année d’insuffisance de liquidité transactionnelle. De plus, quitter enfin ce niveau de 0 %-0,25 % approprié à combattre la «Great Recession» aurait redonné confiance et visibilité aux investisseurs.

Une semaine plus tard, s’étant rendu compte de son faux pas, la présidente de la Fed a fait machine arrière. A présent, elle promet une hausse des taux avant Noël. Cependant, les marchés n’y croient pas. Une main invisible, chère à Adam Smith, pousse les rendements des obligations à la baisse. La probabilité de hausse estimée à l’aide des futures Fed Funds pour octobre et décembre n’est respectivement que de 16 % et 41 %. Lors des majorations précédentes, cette probabilité s’élevait à 70 %, ce qui permettait de ne pas prendre les marchés à revers. Ainsi, Mme Yellen doit affermir sa main, en affichant une stratégie convaincante de relèvement des taux d’intérêt indépendante de la volatilité de court terme.

Nous situant parmi les acteurs cherchant à maximiser leurs intérêts dans l’intérêt de tous, nous sous-pondérons donc les obligations américaines.

Thierry Million Directeur de la gestion obligataire ,  Allianz Global Investors France

Thierry Million est directeur de la gestion obligataire d'Allianz Global Investors France. Ingénieur diplômé en Informatique de l’Institut de Recherche polytechnique de Mulhouse, titulaire d’un DESS en finance de l’Institut Supérieur de Gestion et diplômé de la SFAF, Thierry Million débute sa carrière en 1987 en tant que courtier et responsable de la Trésorerie chez Dynabourse. Il est ensuite gérant obligataire à la Banque Vernes. En 1994 il rejoint Dresdner RCM Gestion en tant que directeur de la gestion obligataire. En 2001 il devient Responsable des activités Product Management et Conseil d’AGF Asset Management. A partir de 2003, il prend la responsabilité des portefeuilles diversifiés des institutionnels et entreprises, ainsi que de la recherche quantitative et économique. En 2006, il est nommé directeur de la recherche économique et quantitative et du Conseil, puis directeur de la gestion obligataire d’Allianz Global Investors en 2008. Depuis 2013, il est directeur de la gestion obligataire institutionnelle.

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