Métier

Business analyst, une fonction qui monte au sein des directions financières

Publié le 26 septembre 2014 à 15h12    Mis à jour le 26 septembre 2014 à 18h31

Pierre Havez

Intervenant en complément du contrôleur de gestion, le business analyst participe au pilotage de l’activité de l’entreprise à partir de l’étude de ses données chiffrées. Ces fonctions très demandées, à la lisière de la finance et de l’opérationnel, offrent des perspectives d’évolution interne variées.

C’est une évolution importante qui est en train de toucher de nombreuses directions financières. En effet, depuis plusieurs mois, le métier de contrôleur de gestion connaît une profonde mutation. Une tendance liée à l’environnement économique et financier. «Le resserrement des marges et le manque de visibilité encouragent les entreprises à renforcer certaines fonctions analytiques, en charge du suivi des coûts et des rapports d’activités, afin d’offrir des outils plus précis d’aide à la prise de décision à la direction générale», pointe Mikaël Deiller, manager exécutif senior chez Michael Page.

Une fonction réservée aux grands groupes

Ce besoin se matérialise par l’apparition de «business analysts». Ces collaborateurs sont ainsi chargés de collecter divers flux d’informations dans l’entreprise – à partir de business plans, de propositions commerciales, de tarifications, ou encore d’indicateurs financiers issus du compte de résultat ou du bilan – puis de les analyser, afin d’alerter la direction sur d’éventuels écarts budgétaires et de proposer des actions correctives.

A la différence des contrôleurs de gestion, les business analysts s’orientent donc en priorité vers des missions d’analyse transverse et des recommandations opérationnelles. «Alors que le contrôle de gestion conserve une orientation financière plus forte, le business analyst se tourne davantage vers le pilotage opérationnel de l’activité de l’entreprise», tranche Sylvie Haldi, senior manager de Robert Half finance et comptabilité. Il peut ainsi participer à des prises de décision stratégiques de l’entreprise.«Je me souviens d’une mission d’étude pour l’externalisation d’un service en offshore, au cours de laquelle il était délicat de faire participer les collaborateurs concernés tout en restant discrets sur la finalité de l’opération», décrit Vincent Larroze-Francezat, sales analyst chez L’Argus de la presse.

Compte tenu de la nature de ces tâches, ces postes sont surtout demandés dans les grandes entreprises qui regroupent de nombreuses activités et filiales. «Dans les PME, la direction générale s’appuie sur son directeur commercial ou marketing pour prendre des décisions opérationnelles et stratégiques, estime Sylvie Haldi. Mais dès que ces flux s’amplifient ou que le processus de création de valeur devient plus complexe, il devient nécessaire de dédier une équipe de business analysts pour apporter une analyse de l’activité et des actions pour la piloter de manière optimale.»

Une expérience à l’international appréciée

Au regard de ces responsabilités, ces postes concernent plutôt des profils à haut potentiel. Un diplôme Bac + 5 d’école de commerce ou d’ingénieur est ainsi indispensable, idéalement complété par trois à cinq ans d’expérience au sein d’un cabinet d’audit ou en contrôle de gestion. Mais d’autres parcours peuvent séduire les employeurs.

«Lors du recrutement récent d’un business analyst expérimenté, pour l’équipe de revenue management d’un groupe français dans le secteur des technologies de l’information et de la communication, nous avons étudié des profils très divers, provenant de l’audit, mais aussi de cabinets de conseil en stratégie ou en organisation, voire de banques d’affaires, précise Mikaël Deiller. En effet, dans leurs premières années, ces professionnels interviennent le plus souvent en support des opérations plutôt que dans les relations d’affaires, ce qui leur apporte une bonne qualité d’analyse et une véritable sensibilité opérationnelle.»Une expérience à l’étranger peut aussi permettre de se démarquer. «A compétences techniques égales, le candidat qui a effectué un volontariat international en entreprise par exemple aura plus de chances d’être retenu car la direction financière s’internationalise, ajoute Marina Baillon, directrice associée chez Robert Walters. Pour le recrutement d’un business analyst destiné à la filiale d’un groupe pharmaceutique américain, nous recherchons ainsi un collaborateur avec un premier passage en cabinet d’audit, suivi d’une expérience opérationnelle de contrôleur de gestion dans un environnement international.»

Des profils à fidéliser

Etant donné la variété des problématiques auxquels ils sont confrontés, les business analysts bénéficient de perspectives d’évolution intéressantes. «Ce sont en général des profils à potentiel évolutif sur lequel l’entreprise mise par la suite, car ils ont acquis une bonne connaissance de l’activité et réussi à tisser un réseau de contacts dans un grand nombre de services internes», confirme Mikaël Deiller. Mais ces atouts en font des professionnels très recherchés, y compris par d’autres départements que la finance. «En raison de certaines similitudes avec le métier de business analyst informatique, notamment en matière de démarche analytique, de formalisme ou d’appétence pour les systèmes d’information, certains se dirigent vers cette fonction, observe Vincent Larroze-Francezat, citant l’exemple d’un de ses collègues, devenu responsable d’une équipe de consultants CRM (gestion de la relation client), après dix années en tant que business analyst. D’autres se tournent également vers des postes en revenue management, notamment sur la politique tarifaire et l’optimisation du chiffre d’affaires.»

Face à cette concurrence interne, les directions financières cherchent donc à fidéliser ce type de profil en favorisant d’abord leur montée en compétence, après 5 à 10 ans d’expérience. «Les business analysts peuvent prendre des responsabilités managériales au sein de leur propre département et ainsi agrandir leur périmètre, ou encore devenir contrôleurs financiers de filiale ou de business unit à l’étranger», observe Marina Baillon. En outre, pour les retenir, leur hiérarchie n’hésite pas non plus à leur offrir des rémunérations intéressantes. Le salaire moyen d’un business analyst junior avec trois ans d’expérience se situe ainsi entre 40 000 et 50 000 euros annuels, tandis qu’un profil senior perçoit autour de 60 000 euros, voire 90 000 euros si le poste inclut une responsabilité managériale dans un environnement international. «Selon l’expérience et le parcours académique du candidat, ces rémunérations peuvent atteindre jusqu’à 20 % de plus que celles d’un contrôleur de gestion», compare Mikaël Deiller. Des niveaux attractifs, en particulier dans certains secteurs d’activité très rentables comme la banque, la finance ou l’assurance, où ils peuvent encore grimper.

Une fonction qui recouvre un large périmètre

Contrôle de gestion commercial, analyse de données de marché, conseil stratégique en matière d’acquisitions, de restructurations ou de fusions : les contenus de postes des business analysts diffèrent sensiblement en fonction des sociétés. Mais au-delà de ces missions variées – qui dépendent souvent de la culture financière de l’entreprise –, les indicateurs suivis par le business analyst peuvent aussi varier en fonction de sa taille et de la nature de son activité. «Lors de mon premier poste de business analyst chez Coca-Cola, je travaillais exclusivement sur les indicateurs de quantités vendues et les prévisions, alors que chez Eutelsat, malgré un intitulé de fonction identique, j’intervenais plutôt sur des données de marketing et la performance de contrats sur 20 ans. Chez American Express, c’était l’optimisation de la couverture tactique et l’efficacité commerciale que j’analysais, décrit Vincent Larroze-Francezat, aujourd’hui en poste dans les médias. Mon périmètre se concentre désormais sur l’ensemble des leviers de la rentabilité de l’entreprise.»

. Cette diversité s’explique également par le fait que cette fonction n’est pas uniquement financière. En effet, on la retrouve également très souvent dans d’autres départements de l’entreprise : commercial, informatique, stratégique ou encore revenue management, par exemple.

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