Private equity

Les recrutements reprennent

Publié le 18 novembre 2016 à 16h55

Nathalie Halpern

Alors que les levées de capitaux repartent à la hausse en France, les sociétés de capital-investissement embauchent des chargés d’affaires et des directeurs de participations pour renforcer leurs équipes. Elles recherchent surtout des jeunes avec quelques années d’expérience issus des cabinets d’audit, de conseil ou des banques d’affaires.

Récemment, Astorg a recruté deux directeurs d’investissement très expérimentés, BlackFin Capital Partners a engagé deux directeurs d’investissement et deux chargés d’affaires, et Apax Partners a renforcé ses effectifs de deux chargés d’affaires. Comme en témoignent ces exemples, les annonces de nominations se succèdent dans les sociétés de capital-investissement depuis le début de l’année. Ces dernières cherchent en effet à étoffer leurs équipes d’investissement compte tenu du rebond des levées de fonds. Au premier semestre 2016, le capital-investissement a collecté 6,2 milliards d’euros, soit une progression de 42 % par rapport à la même période de l’an dernier, selon l’Association française des investisseurs pour la croissance (AFIC). «Face à l’importance des levées de fonds, les acteurs du private equity ont recruté en 2016 plus de chargés d’affaires et de directeurs de participations, et ce mouvement devrait se poursuivre au vu de l’activité soutenue du secteur», constate Romain Boisnard, associé chez Tillerman, un cabinet de recrutement.

Ce dynamisme se retrouve surtout chez des acteurs qui opèrent sur les marchés des petites et moyennes sociétés.C’est notamment le cas d’Astorg qui vient de lever un véhicule pour viser le marché européen de 2,1 milliards d’euros, soit un montant deux fois plus important que son précédent fonds.

«Nous avons réalisé une vague de recrutements en 2015 et 2016 afin de renforcer notre équipe et la développer à l’international», explique Xavier Moreno, président de la société de capital-investissement française qui compte désormais 32 personnes dans son équipe d’investissement, contre 15 il y a cinq ans. BlackFin Capital Partners, un acteur spécialisé dans les services financiers, a également renforcé ses effectifs. «Après avoir lancé en juin un fonds de capital-risque spécialisé dans les fintechs en Europe, nous sommes en train de constituer une nouvelle équipe dédiée à ce segment», explique Paul Mizrahi, directeur général de BlackFin Capital Partners.

Toutes ces sociétés dans le private equity recherchent néanmoins des profils assez similaires. Diplômées d’école de commerce ou d’ingénieur, les recrues doivent en effet avoir une première expérience. Elles doivent avoir déjà travaillé dans des cabinets de conseils en stratégie comme Roland Berger, ou d’audit comme PwC ou KPMG par exemple. Les candidats retenus sont aussi souvent issus des équipes de financement de LBO ou de fusions-acquisitions au sein des banques d’affaires telles que Lazard, Goldman Sachs, etc.

Une préférence pour les profils juniors

Mais leur expérience doit être de courte durée car les acteurs du private equity recrutent essentiellement des jeunes pour des postes de chargés d’affaires. «Nous ne recrutons que des chargés d’affaires, explique Gilles Rigal, associé chez Apax. Ils apprennent à travailler en équipe, et sur le terrain, dès le début. Ensuite, grâce à la cooptation en interne, ils pourront devenir directeurs de participations, directeurs, puis associés, généralement au bout d’une dizaine d’années.»Ces jeunes recrues auraient l’avantage de mieux s’intégrer à la «culture maison» et au travail d’équipe jugés très importants dans ce métier. D’autres sociétés ne misent quant à elles pas seulement sur la jeune génération. «Nous avons recruté beaucoup de juniors avec deux ou trois ans d’expérience professionnelle, mais dans notre métier, il n’y a pas de débutants», souligne Xavier Moreno. La société de gestion a d’ailleurs embauché aussi des directeurs d’investissements avec huit à dix ans d’expérience. Ces recrutements permettraient aussi de répondre au besoin de rajeunissement d’une profession dont les pionniers, qui ont réalisé leurs premiers faits d’armes dans les années 1980, arrivent à l’âge de la retraite.

Pour renouveler leurs effectifs, les fonds n’auraient d’ailleurs pas de mal à recruter. «Nous notons un regain d’intérêt pour le private equity depuis deux ans», note Gilles Rigal. Un constat partagé par d’autres professionnels. «Nous avons beaucoup de candidats, plus qu’il n’y a de places, en provenance notamment des banques d’affaires et des cabinets de conseils, confirme Paul Mizrahi, directeur général de BlackFin Capital Partners. Le private equity est un métier qui attire car il s’agit d’un travail de terrain, au contact des entreprises, où il faut prendre des décisions, avoir un esprit entrepreneurial.»

Il faut dire aussi que les salaires fixes et les bonus y sont attrayants. En fonction de la taille du fonds qu’ils rejoignent, les chargés d’affaires peuvent espérer une rémunération fixe située entre 60 000 euros et 90 000 euros bruts par an, et les directeurs d’investissement un salaire fixe annuel compris entre 90 000 euros et 150 000 euros bruts. A cela viennent s’ajouter une part variable qui peut représenter de 30 % à 70 % du salaire fixe selon les sociétés de capital-investissement ainsi que le «carried interest», un intéressement à la performance du fonds en contrepartie d’un investissement initial.

L’importance du relationnel

Cependant, pour obtenir ces hauts niveaux de rémunération, les candidats doivent faire preuve de certaines qualités, qui sont particulièrement recherchées par les recruteurs. La capacité à prendre des décisions semble primordiale. «Dans notre profession, il faut avoir un sens critique aiguisé, car nous recevons beaucoup de demandes d’investissement, et très peu sont retenues, estime Paul Mizrahi. Sur 200 dossiers, seuls deux ou trois sont sélectionnés. Il faut donc savoir choisir le bon. Pour cela, il faut mener une enquête afin de déterminer le potentiel de croissance de la société et de ses produits, et comprendre les enjeux réglementaires. Il faut se forger une conviction sur ses dirigeants et ses marchés.»

Il faut donc pouvoir maîtriser des données à la fois financières, juridiques et d’analyse de marchés.«Dans le métier du private equity, il faut être capable d’une grande polyvalence sur le plan technique, recommande Xavier Moreno. Il faut savoir à la fois lire et décortiquer des comptes, faire des modélisations financières, bien comprendre le droit des contrats, et avoir un jugement d’homme d’affaires.»

Avoir de bonnes capacités relationnelles est également important. Il s’agit d’une profession où de jeunes financiers sont régulièrement en contact avec des dirigeants d’entreprises où le fonds investit. «On a face à nous des hommes d’expérience qui voient arriver, parfois avec appréhension, de nouveaux actionnaires, souligne Xavier Moreno. On doit à la fois être à leur écoute, comprendre leur mode de management, et parfois favoriser des changements.» Bref, il faut savoir manier à la fois les chiffres et les hommes.

Le capital-risque à la recherche de jeunes experts

Les fonds de capital-risque recrutent aussi de jeunes talents. C’est notamment le cas d’Iris Capital, une société de capital-risque spécialisée dans le numérique, en phase de recrutement de chargés d’affaires ayant deux à trois ans d’expérience. Cependant, ce sont des spécialistes qui sont recherchés, et non des financiers. «Nous ciblons des talents issus de grandes entreprises technologiques ou de start-ups du numérique, et qui ont une vraie expertise technique dans le digital. Dans notre métier, nous faisons appel à des experts», explique Antoine Garrigues, managing partner d’Iris Capital.

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