Bonus

Une belle année dans les sociétés de gestion

Publié le 27 avril 2018 à 15h49    Mis à jour le 27 avril 2018 à 17h06

Sandra Sebag

Les bonus versés ce printemps au titre de l’exercice 2017 étaient nettement orientés à la hausse. Certains profils ont gagné jusqu’à 30 % de plus par rapport à l’année précédente. Une embellie conjoncturelle qui ne doit pas masquer le fait que l’évolution des packages de rémunération a été plutôt contenue ces dernières années en raison de la réglementation.

2017 a constitué une bonne année pour les bonus des collaborateurs des sociétés de gestion. Cette rémunération variable versée fin mars au titre de l’année précédente affiche en effet de belles progressions. «Dans les grandes sociétés de gestion, la hausse des bonus est comprise entre 5 et 10 %, indique Romain Boisnard, associé chez Tillerman. Cette croissance a été encore supérieure dans les sociétés de gestion de taille intermédiaire et chez les acteurs indépendants disposant de plus de latitude que les grands groupes pour offrir des packages de rémunérations variables élevés.»

Mais ces tendances cachent d’autres disparités importantes. La politique des sociétés de gestion en matière de bonus diverge en effet selon le type de poste occupé, la séniorité ou encore les expertises. «Les gérants séniors, les spécialistes recherchés notamment sur la dette privée ou les actifs réels, ou encore certains commerciaux très expérimentés ont vu leur bonus croître dans une fourchette comprise en 20 et 30 %», confirme Romain Boisnard. Il en va de même des gérants quantitatifs, notamment pour les spécialistes du smart beta ou encore des primes de risques alternatives. «Les bonus des ingénieurs financiers et des analystes évoluent sur les mêmes tendances que les gérants, mais à des niveaux plus faibles, soit une progression comprise entre 5 et 10 % cette année», ajoute Romain Boisnard. De leur côté, les fonctions supports sont moins avantagées. «Les collaborateurs qui interviennent dans des fonctions transverses ou liées à la conformité et au contrôle disposent de rémunérations variables plus faibles, mais moins volatiles que celles des gérants et des commerciaux», poursuit Romain Boisnard. Les bonus de ces catégories de personnel ont crû ainsi de l’ordre de 5 % cette année.

Des stratégies variables

D’un point de vue général, la progression des bonus s’explique par la très bonne tenue des marchés en 2017. Les rémunérations variables dépendent en effet en grande partie d’objectifs quantitatifs, comme l’augmentation des encours sous gestion qui a été importante cette année sur le marché français. Des critères qualitatifs sont aussi pris en compte, ils relèvent alors de la réussite de projets, par exemple dans les nouvelles technologies. «La digitalisation fait partie des nouveaux chantiers des sociétés de gestion qui encouragent leurs collaborateurs à mettre en avant une offre de services qui corresponde aux demandes du marché, indique Etienne Billing, manager chez Fed Finance. Certains commerciaux se font aussi rémunérer sur les partenariats conclus. S’ils parviennent à faire entrer dans la base de clients des grands institutionnels, même pour des encours réduits, ils peuvent à ce titre bénéficier d’une prime.» D’autres critères qualitatifs peuvent être pris en compte. «Les bonus des gérants ne sont pas corrélés à la performance des marchés, indique Isabelle Senéterre, directrice des ressources humaines chez Amundi. Ils doivent refléter leur valeur ajoutée propre, et celle de leur équipe, en lien avec les objectifs de gestion partagés avec les clients. Quand l’entreprise se développe et améliore son efficacité, les rémunérations doivent progresser. C’est pourquoi l’enveloppe de bonus évolue en lien avec le résultat brut d’exploitation (RBE). Elle est ensuite répartie selon les performances collectives et individuelles. S’y ajoutent l’intéressement et la participation, qui sont significatifs.»

Des contraintes réglementaires

Si d’un point de vue conjoncturel, les rémunérations variables s’améliorent cette année, en tendance, l’évolution des packages de rémunération est plutôt contenue. D’une part, les sociétés de gestion ont depuis plusieurs années des problématiques de réduction de coûts et agissent donc sur leur masse salariale. D’autre part, elles font face à de nouvelles contraintes réglementaires. Les autorités européennes ont régulé dans un premier temps, les rémunérations dans les sociétés de gestion alternative (directive AIFM en 2014), puis dans un second temps celles versées par les acteurs plus traditionnels (directive Ucits V en 2016). Ces textes se sont traduits par un plafonnement des bonus et leur paiement de façon différée sur trois ans. Cette partie différée dans le temps correspondant à 40 % des bonus.

Par ailleurs, des aménagements en termes de gouvernance ont dû être mis en place. «Le comité des rémunérations est responsable devant la loi, il ne doit pas encourager une prise de risque excessive et il s’appuie sur une analyse détaillée des risques et de leur dynamique pour évaluer la juste répartition entre salaires fixes et variables», indique Antoine de la Guéronnière, coresponsable de la «practice governance» et secrétaire du conseil d’administration de BNP Paribas Asset Management. Des politiques qui avaient pour certaines étaient mises en place de longue date dans les grands groupes. «Dès 2008, nous avons instauré un paiement différé des bonus et créé en 2010 un comité des risques et des rémunérations, relate Isabelle Senéterre. A la suite de la réglementation AIFM, les bonus différés des collaborateurs qui interviennent sur les marchés ont été indexés sur un panier de fonds. Nous sommes par ailleurs vigilants pour éviter les excès, dans les montants et les variations, en privilégiant notamment une analyse long terme de la performance.» Une stratégie qui s’applique maintenant à l’ensemble des sociétés de gestion.

Des politiques qui deviennent inventives

La hausse des encours sous gestion et la bonne tenue des marchés l’an dernier ont conduit les sociétés de gestion à recruter. Le marché devient même tendu sur certaines fonctions. Pour éviter les départs, fidéliser les salariés et attirer les talents dans un contexte contraint par la réglementation, les sociétés de gestion font preuve d’imagination. «Certaines sociétés de gestion n’hésitent plus à offrir des avantages en nature, comme des voitures de fonction, notamment pour les fonctions commerciales garantes de la collecte», souligne Etienne Billing, manager chez Fed Finance.

Pour d’autres profils, comme les spécialistes du contrôle des risques, la fidélisation passe par des augmentations du salaire fixe. «Les sociétés de gestion ont tendance à revaloriser les salaires fixes des collaborateurs qui ne bénéficient pas de bonus élevés», poursuit Etienne Billing. Pour tous, les avantages offerts peuvent aussi être liés aux modes d’organisation. «Les collaborateurs disposent de plus d’autonomie, ils travaillent sur des projets et sont en contact direct avec la direction, relate Etienne Billing. Cette autonomie constitue une incitation forte à rester dans l’entreprise.»

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