La lettre de l'immobilier

Septembre 2017

Achat d’hôtel : quelle assiette et quel rythme de déduction fiscale pour les murs ?

Publié le 15 septembre 2017 à 11h02    Mis à jour le 15 septembre 2017 à 16h56

Christophe Frionnet

Affectés de manière permanente à l’exploitation hôtelière, les murs de l’hôtel ne peuvent pas constituer une charge déductible, au contraire des éventuels intérêts d’emprunt contractés pour leur acquisition (sous réserve des règles propres aux frais financiers : sous-capitalisation, rabot fiscal, etc.).

Par Christophe Frionnet, avocat associé en fiscalité. Il conseille notamment les entreprises dans l’ensemble de leurs opérations. Il est chargé d’enseignement en matière de fiscalité immobilière à l’Université de Paris I. christophe.frionnet@cms-bfl.com

Ils ne sont donc déductibles, comme tout actif immobilisé, que sous forme d’amortissement1.

Deuxième principe : seul le prix de la construction, à l’exclusion de celui du terrain, est susceptible d’être amorti2.

Le prix d’un immeuble, doit donc être ventilé entre le sol et la construction dans l’acte de vente, mais le législateur n’a pas pris la peine de fixer un cadre à cette répartition lorsque l’acte d’acquisition est muet sur ce point.

Le Conseil d’Etat est venu poser un principe de méthodologie «objectif» par deux arrêts rendus le 15 février 20163 qui ont vocation à s’appliquer quels que soient les secteurs d’activité, en ce compris l’hôtellerie.

Le mode d’emploi délivré consiste à établir trois méthodes hiérarchisées.

Dans un premier temps, il convient d’appliquer la méthode comparative avec trois critères : temporel, géographique et urbanisme. S’il s’avère qu’un terrain nu (ou comportant une construction à démolir) a été acquis dans un périmètre et une date proche, ce prix pourrait être à retenir pour déterminer la valeur du terrain de l’hôtel. Mais on pourrait reprocher à cette méthode de manquer d’objectivité si l’on ne prenait pas également en compte les capacités de constructibilité offertes par les terrains respectifs.

A défaut, il convient d’appliquer la méthode dite du coût de la reconstruction (ayant pu être engagé par un tiers à raison d’immeubles proches) qui ne prend en considération que la valeur de la construction en dénigrant l’évaluation de la valeur du terrain.

Enfin, en cas d’incapacité de mise en œuvre de l’une de ces méthodes, on «peut s’appuyer sur des données comptables issues du bilan d’autres contribuables», en se basant sur un échantillon regroupant plusieurs données concordantes : localisation, architecture, usure ou possibilité d’agrandissement. Si la société hôtelière est en mesure de produire la ventilation opérée par d’autres structures hôtelières pour des immeubles acquis dans la même zone et une date assez proche, cette donnée fera foi. Mais, inversement, la Haute juridiction n’impose pas la similitude d’activité. Aussi, l’administration fiscale pourrait avoir tendance à se référer à des ventilations opérées sur des immeubles à usages d’habitation ou de bureaux.

A ce stade, la nature de l’activité d’hôtellerie n’aurait donc pas vocation à nécessairement influencer la ventilation à opérer pour la détermination de la base amortissable.

Une fois celle-ci connue, reste à savoir le taux d’amortissement qui doit être retenu. On sait qu’au plan comptable l’article 322-1 du Plan comptable général retient la durée réelle d’utilisation du bien. En fiscalité, il conviendra de retenir la durée normale d’utilisation en dépit de la durée réelle d’utilisation du bien4 par référence à ce qu’étaient les usages comptables avant la réforme de 2005.

Lorsque des circonstances particulières le justifient, les amortissements peuvent se rapprocher de la durée normale d’utilisation, sans que cette différence d’amortissement ne s’écarte de plus de 20 % des pratiques professionnelles5.

Pour les hôtels, le taux habituellement pratiqué est de 2,8 %6.

Le fait que l’immeuble soit affecté à une activité hôtelière n’est pas suffisant pour pratiquer un taux d’amortissement différent de la pratique7,8. Toutefois, la nature de l’activité hôtelière déployée dans les locaux pourrait conduire la société à isoler un nombre significatif de composants, susceptibles de faire l’objet d’un amortissement distinct et plus rapide chaque fois que les règles comptables le permettront9.

1. Art. 39, 1-2° du Code général des impôts (CGI).

2. BOI-BIC-AMT-10-20 n° 10,

31 décembre 2012.

3. CE, 15/02/2016, 9e et 10e s.-s, n° 367467 SARL Daves Place des Etats-Unis et n° 380400, Sté LG Services.

4. Article 39, 2°, 1 du CGI.

5. BOI-BIC-AMT-10-40-10 n° 40,

16-12-2013.

6. CE, 5 mai 2008, n° 290382 et 290383, 10e et 9e s.-s., Vinuales ; CAA Paris, 20/10/2015, n° 15PA00623 et n° 15PA00620.

7. CE, 5 mai 2008, n° 290382 et 290383, 10e et 9e s.-s., Vinuales : la situation de l’hôtel à Lourdes n’était pas de nature à justifier un taux d’amortissement supérieur.

8. CAA Bordeaux, 30 décembre 1992, n° 90-467, 2e ch., SA Le Grand Large : un taux de 5 % d’amortissement est considéré comme justifié pour un hôtel-restaurant de luxe situé en bord de mer.

9. Article 15 bis de l’annexe II au CGI.

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Au sommaire de la lettre


La lettre de l'immobilier

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