Gestion factorielle

Quelle place accorder à la gestion factorielle dans un portefeuille ?

Publié le 30 juin 2017 à 12h27

Propos recueillis par Catherine Rekik

A mi-chemin entre la gestion active et la gestion indicielle, la gestion factorielle connaît un succès grandissant auprès des investisseurs. Funds s’interroge sur les avantages de l’investissement factoriel.

La gestion factorielle est-elle un nouveau concept marketing ?

 Pierre Hervé

La gestion factorielle a déjà, en effet, quelques années d’existence. Le premier facteur distingue l’alpha du bêta. Ces théories datent de 1965. Un seul facteur était retenu pour expliquer le marché : la sensibilité d’une valeur par rapport à la variation marché. Dans les années 1980 se développe la théorie de l’arbitrage, qui combine plusieurs facteurs. Ce ne sont donc pas des théories récentes. La nouveauté réside dans l’utilisation que l’on fait de ces théories dans la gestion. Dans 95 % des cas, la gestion multifactorielle concerne les actions, mais elle peut être utilisée pour toutes les classes d’actifs. 

 

Tatjana Xenia Puhan

L’approche factorielle permet de gérer les portefeuilles de manière très transparente et prévisible. Elle favorise également la compréhension et la corrélation des risques dans le portefeuille afin de mieux les gérer. La gestion du risque est au cœur de notre gestion et constitue la source de notre surperformance. L’enjeu est de bien comprendre ce qu’est la gestion factorielle et comment nous l’implémentons dans le portefeuille. C’est la pertinence de cette mise en œuvre qui différencie une approche d’une autre. 

Nicolas Just

Un facteur est un élément dont les variations peuvent expliquer mathématiquement les mouvements de prix conjoints de certains groupes d’actifs, qu’ils soient regroupés en secteurs, pays, thématiques, styles d’investissement ou encore facteurs de risque sur les marchés financiers. Certains facteurs ont été identifiés depuis longtemps de façon intuitive, puis par la suite de façon académique. Ces dernières années, dans l’industrie, les observateurs se sont aperçus que les gérants avaient créé une confusion entre l’alpha – c’est-à-dire la capacité à générer une performance indépendamment de la direction des marchés – et la surperformance. Un gérant peut surperformer un marché tout en étant mauvais, car il génère un alpha négatif. Les facteurs ont été utilisés mathématiquement pour expliquer les performances des gérants. 

Aujourd’hui, nous sommes capables, grâce à ces facteurs, de corriger les explications concernant les performances. Ils sont très intéressants pour évaluer les sources de risque, expliquer les performances ex post des gérants et, à la faveur des évolutions technologiques et statistiques, ils deviennent eux-mêmes sources de performance. Sur le plan académique, les chercheurs ont démontré ces dernières années qu’il existe des anomalies de marché permettant sur certains facteurs de générer des primes en supplément du rendement du marché actions. Si ces primes sont utilisées de façon systématique, elles permettent d’obtenir une meilleure performance que celle du marché. 

Etienne Vincent

La gestion factorielle utilise certes les mêmes résultats issus de la recherche académique que la gestion quantitative classique, mais avec une philosophie d’investissement issue du smart beta, et donc entièrement axée sur le choix des bons risques, plutôt que sur la recherche des rendements en tant que tels. Elle capitalise par ailleurs sur le besoin grandissant de transparence et de liquidité.

En effet, depuis la crise financière globale de 2007, qui a fait voler en éclat beaucoup de modèles quantitatifs anciens, les gérants ont compris qu’on peut choisir de s’exposer aux bons facteurs de risque et de surperformance et espérer qu’ils continuent à être rémunérés sur le long terme, mais qu’on ne peut pas choisir le degré de surperformance qu’ils vont générer à court terme sans s’exposer fortement à des effets «porte de saloon», fortement destructeurs de confiance, surtout dans des modèles opaques comme l’étaient souvent ceux de la gestion quantitative classique précrise.

En effet, depuis la crise financière globale de 2007, qui a fait voler en éclat beaucoup de modèles quantitatifs anciens, les gérants ont compris qu’on peut choisir de s’exposer aux bons facteurs de risque et de surperformance et espérer qu’ils continuent à être rémunérés sur le long terme, mais qu’on ne peut pas choisir le degré de surperformance qu’ils vont générer à court terme sans s’exposer fortement à des effets «porte de saloon», fortement destructeurs de confiance, surtout dans des modèles opaques comme l’étaient souvent ceux de la gestion quantitative classique précrise.

Pierre Hervé 

Une étude réalisée en 2009 pour le fonds de pension norvégien sur sa gestion active a constitué un tournant pour la gestion factorielle. Par le passé, l’allocation d’actifs se faisait entre les différentes classes d’actifs et les zones géographiques. L’étude a montré que ce qui influence réellement un portefeuille, ce n’est pas telle ou telle classe d’actifs – les actions américaines, les obligations européennes etc. –, mais des facteurs tels que la croissance, la value, le momentum… Autres que des facteurs strictement géographiques. 

Tatjana Xenia Puhan

Ce n’est effectivement pas un alpha qui explique la performance mais des facteurs systématiques. L’étude peut également être menée sur le portefeuille de Warren Buffet, par exemple, dont plusieurs primes de risque expliquent la performance. Il faut bien sûr avoir identifié au préalable les bons facteurs.

Etienne Vincent

La mode du smart beta, depuis 2011, a aidé à une forme de bascule de philosophie, puisque les investisseurs ont constaté qu’il n’y avait pas qu’une seule façon de battre les indices classiques, et que tout ne dépendait pas seulement du facteur faible volatilité, qui a beaucoup expliqué les premiers développements du smart beta.

 Au-delà de la tentation initiale d’une simple juxtaposition des différentes stratégies, il est logique de vouloir s’exposer directement à «ce qui vaut le coup» dans le smart beta et d’équilibrer la contribution des différents facteurs. C’est ce qui explique le développement des approches multifactorielles intégrées.

Pierre Hervé

Parler des facteurs revient souvent à parler des variables causales (niveau des taux, valorisation, etc.) qui influencent le marché. Il existe toute une branche de la finance, qui fait de la gestion multifactorielle, qui n’utilise pas du tout les variables causales mais des facteurs statistiques. Il est possible de construire des modèles qui ne font pas d’hypothèses sur les variables. Cette branche se développe de plus en plus, car on s’est aperçus que la plupart des variables utilisées avaient des corrélations croisées : l’influence du dollar sur le prix du pétrole et inversement, par exemple. Prendre des variables qui ont des influences séparées mais aussi communes équivaut à perdre un peu le contrôle d’une partie de ce qui se passe dans le portefeuille. 

L’appétence des investisseurs pour ces approches factorielles répond-elle à un intérêt particulier pour la gestion des risques ou à la recherche de rendements décorrélés et de diversification ?

Tatjana Xenia Puhan

A mon sens, cela répond à la nécessité de trouver des stratégies plus transparentes et prévisibles. Les investisseurs ne veulent pas être dépendants d’un gérant qui gère de façon discrétionnaire. Ils veulent également bien gérer les risques qu’ils ont en portefeuille. La gestion factorielle permet de mieux appréhender le comportement de la stratégie choisie. Par ailleurs, de nombreuses études ont montré qu’il était impossible de générer de l’alpha sur le long terme en dehors des gestions systématiques. Les investisseurs ont perçu l’intérêt des stratégies basées sur des primes exploitées de façon systématique. 

Nicolas Just

Durant des décennies, les gérants fondamentaux et discrétionnaires ont vendu l’idée qu’ils créaient de la surperformance, alors qu’ils exploitaient certains facteurs que tout le monde peut utiliser. D’où une systématisation de ces facteurs pour identifier les sources de surperformance et pouvoir évaluer les gérants, puis les utiliser dans le cadre de stratégies plus performantes et prédictibles. Il est possible de déterminer le moment où un fonds factoriel va surperformer ou sous-performer. La systématisation de ces facteurs permet aussi de proposer une offre à un coût moindre. Les stratégies quantitatives multifactorielles sont moins chères que les stratégies fondamentales traditionnelles. Cela crée une certaine pression en matière de business model dans l’industrie. 

Par ailleurs, un élément plus conjoncturel explique également l’essor de ces stratégies. Depuis 2008, on a constaté que les fondamentaux des entreprises ont eu tendance à avoir moins d’influence sur les marchés en comparaison à des facteurs plus globaux d’ordre politique, macroéconomique ou encore de flux. Qu’un nouveau directeur général soit nommé ne change pas grand-chose si la société est, en matière de business model, très dépendante de certains de ces facteurs. Le pouvoir explicatif des facteurs semble être devenu plus important depuis 2008 que lors de ces trente dernières années, en raison, me semble-t-il, de l’intervention des banques centrales qui ont nivelé les aspects fondamentaux des entreprises et de l’existence de risques macroéconomiques et politiques qui avantagent cette analyse factorielle. 

Etienne Vincent

La première diversification est celle qui consiste à travailler sur des univers très larges, en milliers de titres, quand un analyste humain serait limité à quelques dizaines de titres. Cette première diversification est un moyen de bénéficier de l’effet statistique et d’éviter les biais émotionnels.

L’investissement multifactoriel permet aussi de compenser les «défauts» de chaque facteur par les «qualités» des autres. Le possible excès de prudence d’un facteur comme la low volatility est compensé par le «courage» du facteur qualité. Inversement, la potentielle témérité de «qualité» bénéficie de la prudence de «low volatility». La sensibilité aux crises du facteur value, bénéficie aussi de la «modération» du facteur momentum. A l’inverse, le coté moutonnier du facteur momentum est largement amélioré par la prise en compte des valorisations de value…

Cette compensation des styles rend le multifactoriel particulièrement adapté à une approche blend (mélange de styles) et core (à faible risque relatif par rapport à l’indice de marché). En termes plus quantitatifs, la corrélation des principaux facteurs de surperformance est particulièrement faible, ce qui rend leur diversification beaucoup plus efficace qu’une diversification géographique ou sectorielle seule.

Si on raisonne en termes de frais de gestion, n’est-il pas préférable d’investir dans des ETF de type smart beta ?

Etienne Vincent

Nous pratiquons les deux types de formats : fonds ouverts traditionnels ou ETF indiciels, à condition que les indices soient issus de notre recherche, car ce qui est vraiment important pour nous, c’est de comprendre les choix de construction et la valeur ajoutée de la méthodologie utilisée.

Nous privilégions les ETF sur les approches mono-factorielles et mono-régionales, et les fonds ouverts sur les approches multifactorielles et les univers plus larges. Nous constatons qu’il existe une demande pour le sujet sur tous les formats, et que les investisseurs privilégient le format qui leur était habituel précédemment.

Tatjana Xenia Puhan

La gestion des ETF est beaucoup plus contrainte en matière de risque relatif par rapport à un indice de référence qui utilise une pondération classique. Cela relève du choix de l’investisseur, de ce qu’il souhaite comme tracking error et de la part de gestion active qu’il souhaite. Nos fonds sont plus actifs que les ETF. La performance des ETF factoriels n’est pas mauvaise, mais elle est inférieure à ce que l’on peut obtenir grâce à un algorithme plus adaptable. Avec un ETF, l’investisseur risque plus facilement de se retrouver dans une situation de «crowding out» d’un facteur. Un facteur risque d’être exploité de la même façon par un nombre important d’investisseurs alors que, dans nos gestions, nous créons un facteur plus intelligent et prudent afin d’obtenir une surperformance stable et attrayante. La gestion active ajoute beaucoup de valeur à l’approche factorielle. 

Par ailleurs, en matière de coût, il n’est pas certain que les ETF smart beta soient meilleur marché que les fonds actifs qui utilisent ces stratégies. 

Pierre Hervé

La gestion multifactorielle avantage aussi bien le gérant que le client. Ce dernier apprécie cette gestion qui amène de la transparence et qu’on lui explique comment le fonds est investi et quels sont les paris choisis. Le client n’est ainsi pas surpris des mouvements de la valeur liquidative du fonds. Pour le gérant, il est important d’avoir un meilleur contrôle de sa gestion et de doser les choix. 

L’ETF permet d’avoir plus de simplicité. Il peut être acheté à n’importe quel moment de la journée, mais est-ce vraiment un avantage dans la gestion active ? Lorsqu’il s’agit de répliquer un indice avec une faible tracking error, c’est plutôt intéressant mais, dans le cas d’une gestion active, je n’en vois pas l’intérêt pour l’investisseur. D’autant que, souvent, les frais d’un ETF dans le smart beta ne sont pas si éloignés de ceux d’un fonds classique. 

Nicolas Just

Il y a trois types de produits dans les derniers lancements : des ETF qui répliquent des indices classiques par les capitalisations boursières et qui attirent des flux importants, car ils permettent des expositions tactiques ; des ETF mono-factoriels et une troisième génération d’ETF multifactoriels, dont on parle beaucoup, mais sur lesquels il n’y a encore que peu de flux. Depuis deux ans, 80 % à 90 % de la collecte sur les ETF smart beta aux Etats-Unis et en Europe portent sur deux stratégies mono-factorielles : les dividendes élevés et la faible volatilité. 

La stratégie multifactorielle a comme intérêt, dans le cadre des ETF, de donner une classification simple et systématique pour que l’investisseur sache comment faire pour aller chercher ces primes de risque. Pour autant, ce sont des ETF complexes à comprendre et très statiques, dépendants d’une formule définie à un instant donné. Or, les marchés changent et les facteurs évoluent. 

L’offre de gestion factorielle porte essentiellement sur les actions. Est-ce parce que l’approche n’est pertinente que sur cette classe d’actifs ?

Etienne Vincent

Le principe des facteurs fonctionne sur toutes les classes d’actifs, mais les indicateurs des facteurs peuvent être différents et l’équilibre entre les facteurs aussi. Les facteurs «optimistes» sont logiquement plus importants pour les actions, alors que les facteurs «pessimistes» sont plus importants pour l’investissement obligataire, par exemple. Au sein du fixed income, le crédit est la sous-classe d’actifs la plus proche des actions, puisque le nombre de titres est aussi très important. L’approche factorielle existe aussi sur les taux d’Etat, les devises ou les matières premières, mais avec des approches différentes en raison du nombre plus faible de sous-jacents.

Nous pratiquons l’ensemble de ces approches, mais il est vrai que la partie actions est la plus avancée, en matière d’acceptation par les investisseurs.

Pierre Hervé

Les travaux sur les actions remontent à une cinquantaine d’années. Dans les années 1980, des travaux ont été menés sur les obligations, visant à extraire des facteurs pour la gestion de taux. Les recherches se sont plutôt orientées sur des facteurs statistiques. On a découvert qu’avec trois facteurs (translation, pivotement, incurvation/concavité) il était possible d’expliquer 90 % des mouvements sur les taux et de construire un portefeuille en fonction de ces facteurs. 

En revanche, il est moins fréquent d’utiliser la gestion factorielle sur toutes les classes d’actifs comme nous le faisons chez Convictions AM. Nous essayons de trouver des facteurs communs à toutes les classes d’actifs, un peu comme le fait la théorie de l’arbitrage. Si on parvient à déterminer les raisons qui poussent des investisseurs à passer d’une classe d’actifs à une autre, on trouve ainsi les facteurs qui influencent toutes les classes d’actifs, des actions aux devises en passant par les matières premières ou l’immobilier coté. Cette voie est assez peu explorée dans la gestion et dans la recherche. 

Tatjana Xenia Puhan

Nous travaillons également sur les primes de risque dans toutes les classes d’actifs. C’est une façon de créer des stratégies totalement décorrélées des marchés actions et des marchés obligataires. Pour nous, il s’agit d’une offre de gestion alternative liquide reposant sur l’idée que, si les actifs sont homogènes, ils devraient se comporter de la même manière sauf s’ils ont une exposition différente à certains facteurs. C’est la raison pour laquelle la performance va être différente selon les classes d’actifs. Il est possible d’utiliser ce principe pour les matières premières, le crédit et les taux. En ce qui concerne les matières premières, nous pouvons aussi utiliser des facteurs liés aux marchés actions comme la value ou le momentum. Reste la question de l’implémentation dans les portefeuilles, bien plus complexe quand elle concerne toutes les classes d’actifs. Le marché des obligations n’est par exemple pas aussi liquide que le marché actions. Si je crée des portefeuilles factoriels sur le crédit, le traitement n’est pas le même. La liquidité du marché du crédit ne permet pas d’exploiter facilement ces primes de risque. 

Nicolas Just

L’approche factorielle peut se décliner dans toutes les classes d’actifs et être pertinente. Les marchés fonctionnent de façon homogène et valorisent à peu près de la même manière les actifs. Deux raisons structurelles expliquent pourquoi les facteurs sont plus utilisés sur les actions que sur d’autres classes d’actifs. La première concerne la liquidité, qui peut poser problème pour l’implémentation des facteurs de risque dans certaines classes d’actifs, comme les matières premières ou les obligations d’entreprise. La diversification en est la deuxième raison, car aucune classe d’actifs n’est aussi diversifiée que les actions et n’offre autant de facteurs variés. 

Pierre Hervé

L’investisseur doit avoir un horizon de placement de long terme et ne pas regarder les variations de la valeur liquidative du fonds tous les jours. Il délègue le stress du marché au gérant qui, dans une perspective d’investissement de long terme, n’est pas tenu de faire des mouvements tous les jours. 

Nicolas Just

En effet, dans la gestion factorielle, sans doute encore plus que dans la gestion fondamentale, l’horizon d’investissement doit être long pour laisser le temps aux facteurs de dégager leurs primes. 

Certains facteurs ne fonctionnent que dans quelques configurations de marché ?

Pierre Hervé

L’investisseur sophistiqué va choisir les facteurs dans lesquels il souhaite investir en investissant des supports purs, des fonds monofactoriels ou des ETF. En général, l’investisseur considère que c’est plutôt le travail du gérant de pondérer les facteurs entre eux et va privilégier des fonds exposés à plusieurs primes de risque. 

Etienne Vincent

Comme évoqué précédemment, chez Theam nous privilégions quatre facteurs, value, low volatility, qualité et momentum, pour lesquels nous utilisons des indicateurs diversifiés. Nous privilégions le fait de concentrer les expositions factorielles à ces quatre facteurs, en enlevant les sources de risque qui ne sont pas rémunérées, comme les biais sectoriels ou le biais d’exposition globale au marché (beta). En effet, nul n’est besoin du smart beta pour jouer juste la hausse ou la baisse du marché sur l’un de ces segments…

Une fois concentrés, les facteurs sont plus faciles à combiner efficacement, sans «jeter le bébé avec l’eau du bain», c’est-à-dire sans perdre ce qui faisait leur source de performance à chacun séparément. Nous ne croyons pas au timing des facteurs, et nous allouons généralement des budgets de risques égaux et constants aux quatre facteurs, ce qui permet de bénéficier au mieux de leur diversification. Il ne sert à rien d’essayer de n’être prudent que quand on sait qu’on va avoir un accident…

Nicolas Just

Tout dépend des clients. Le fonds de pension norvégien, dont nous parlions précédemment, aidé par des analystes et des consultants, a créé lui-même une approche multifactorielle sur mesure. Un investisseur sophistiqué peut donc choisir ses facteurs, ainsi que la méthode de combinaison. 

Il est possible également de tout déléguer, car le travail d’analyse et de choix des facteurs est complexe. Dans un premier temps, il faut définir le facteur susceptible de générer une prime, puis construire des proxy – c’est-à-dire des paniers réels d’actifs – qui vont représenter au mieux les facteurs que le gérant veut cibler. Ce travail permet de différencier les gérants. Ensuite, il faut déterminer la combinaison des différents facteurs. Une fois ces différentes étapes réalisées, il faut définir la stratégie d’implémentation en fonction de la liquidité et des coûts. 

Tatjana Xenia Puhan

Il est important d’avoir une diversification des primes de risque pour obtenir une surperformance élevée et stable. En effet, les primes de risque évoluent dans le temps et ont une certaine volatilité. Les facteurs valorisation ou momentum ne donnent pas toujours de bonnes primes et peuvent avoir des drawdowns importants. S’exposer à un seul facteur revient donc à prendre un grand risque. 

Il est important d’avoir une diversification des primes de risque pour obtenir une surperformance élevée et stable. En effet, les primes de risque évoluent dans le temps et ont une certaine volatilité. Les facteurs valorisation ou momentum ne donnent pas toujours de bonnes primes et peuvent avoir des drawdowns importants. S’exposer à un seul facteur revient donc à prendre un grand risque. 

Pierre Hervé

Comme évoqué précédemment, 95 % de la gestion multifactorielle concernent les actions, mais cette approche n’est pas utilisée comme un indicateur d’aide au taux d’investissement d’un portefeuille. Même si le travail du gérant a été bien fait en amont, si le marché baisse, le portefeuille aussi. Chez Convictions AM, nous avons travaillé à l’identification de facteurs qui indiqueraient à quel moment il faut sortir du marché. Nos clients ne souhaitent pas être investis à 100 % en permanence et veulent être protégés quand les marchés baissent. Nous avons passé beaucoup de temps à identifier les facteurs qui, dans un portefeuille, permettent de savoir à quel moment il faut se mettre en cash et quand réinvestir. Cette information existe, mais la plupart des gérants ne l’utilisent pas car ils restent investis à 100 %. 

Tatjana Xenia Puhan

Je ne suis pas totalement d’accord avec ce qui vient d’être dit. Selon moi, il ne s’agit pas de facteurs mais de signaux de risque. Un facteur explique la variation entre les rendements des différents actifs, alors qu’un signal de risque explique une augmentation du risque de marché. 

Nicolas Just 

Dans l’approche multifactorielle, les facteurs identifiés comme étant susceptibles d’expliquer les variations du marché ou de certains pans de marché sont souvent symétriques. Il est possible de construire un portefeuille avec les valeurs qui ont le mieux performé durant les douze derniers mois, donc avec un facteur momentum, et de calculer également le facteur short momentum. Il est très facile de construire des portefeuilles long/short multifactoriels. Cette offre existe déjà en format Ucits. 

En revanche, il existe une différence entre la recherche d’une prime factorielle et l’analyse d’un facteur. La prime permet de construire les portefeuilles. Si un facteur ne permet pas, sur longue période, de surperformer, il n’a pas grand intérêt. C’est le cas par exemple du facteur qualité qui surperforme depuis la crise, mais quid de sa persistance sur plus longue période ? Nos études chez Seeyond ont mis en évidence a posteriori le fait que ce facteur n’a pas délivré de prime satisfaisante sur plus de quinze ou vingt ans.

Faire de l’analyse sur les facteurs de risque pour comprendre les marchés est très intéressant. Cela revient à une analyse de signal par les facteurs. L’intensité de l’anomalie de la faible volatilité permet de comprendre en effet certains comportements. Certains de nos clients nous demandent de plus en plus de faire des analyses sur nos facteurs, non pas pour acheter nos portefeuilles, mais pour comprendre ce qui se passe sur les marchés. 

Pour l’instant, il y a peu de recherches académiques sur l’utilisation des facteurs pour expliquer des biais comportementaux. Nous pensons que nous n’en sommes qu’aux prémices de ces analyses. 

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