Gestion sous mandat

Une offre renouvelée à destination des CGP et des clients privés

Publié le 7 mai 2020 à 17h02

Propos recueillis par Catherine Rekik

Face aux nombreuses incertitudes sur les marchés financiers et à la difficulté de construire des allocations d’actifs dans un contexte de faibles rendements, les sociétés de gestion ont développé, ces derniers mois, une offre de gestion sous mandat destinée aux conseillers et aux clients privés. Du côté des CGP, par exemple, cette délégation de l’allocation d’actifs permet de se concentrer sur la relation client tout en permettant d’avoir accès à des solutions adaptées à leurs profils. Ce qui dans le contexte peut être un atout.

La gestion sous mandat existe depuis longtemps dans certaines maisons mais a pris beaucoup d’essor ces dernières années. Pour quelles raisons ? A quels besoins des clients répond-elle ?

Alexis Naacke

Le cœur de notre clientèle est plutôt «mass market», des clients privés avec de faibles connaissances financières. Ils ont une certitude, celle de vouloir investir, mais ils ne savent pas très bien quelle forme doivent prendre leurs investissements financiers. Pour ce type de clients, la gestion sous mandat est essentielle et repose sur des profils très précis. Chez Yomoni, nous avons donc élaboré dix profils de risque afin de bien cadrer leurs besoins. Une fois que le profil de gestion est défini, nous construisons l’allocation stratégique qui lui correspond.

Maxime Ricomes

Les clients de nos réseaux assuranciels n’ont pas toujours, en effet, ni le temps ni l’expertise nécessaire pour piloter eux-mêmes leur épargne sur les marchés financiers. L’accès aux unités de compte se fait donc à travers un pilotage de la gestion et un paramétrage du risque. Par ailleurs, face à un large choix de produits, le client privé peut se retrouver soit paralysé, et finalement ne rien choisir ce qui génère pour lui un manque à gagner, soit choisir un peu de tout et n’avoir que l’illusion d’une diversification qui ne correspondrait en réalité peut-être pas à sa tolérance au risque. La gestion sous mandat permet d’investir dans des unités de compte de façon adéquate par rapport à son profil de risque.

Loïc L’Hermitte

Chez Federal Finance Gestion, la gestion sous mandat, existante depuis plus de trente-cinq ans, s’est fortement développée récemment dans un environnement de baisse des taux et de recherche de diversification. En parallèle, l’offre de produits financiers est devenue foisonnante, aussi bien en gestion active que passive et, bien que facilement disponible sur Internet notamment, il est nécessaire, pour les clients particuliers, de prioriser leurs investissements. La gestion sous mandat répond à cette demande en offrant des solutions clé en main. Notre offre s’adresse aussi bien à une clientèle patrimoniale, fortunée ou mass market, cette dernière ayant accès à une gestion autrefois peu démocratisée. Pour la clientèle plus fortunée, nous proposons une gestion davantage sur mesure. Ces clients connaissent en général la gestion sous mandat mais ont aussi besoin d’avoir un interlocuteur de confiance.

Gilles Etcheberrigaray

Chez Invest AM, notre offre de gestion sous mandat est aussi bien destinée aux CGP qu’à une clientèle fortunée disposant d’un patrimoine financier d’au moins 1 million d’euros. Vis-à-vis de cette dernière, deux points sont importants : la confiance et l’absorption du risque. Cette clientèle, qui n’a pas forcément des connaissances financières très élevées, demande au gérant de pouvoir augmenter le niveau général du risque quand le cycle est bas et que les perspectives sont intéressantes et, inversement, de réduire ce risque quand l’environnement se dégrade comme c’est le cas actuellement. Nous avons quatre profils, assez larges, et nous pilotons les actifs de nos clients dans les différentes phases du cycle économique et financier. En ce qui concerne les CGP, la gestion sous mandat leur permet d’échapper en partie à des contraintes réglementaires de plus en plus lourdes.

Dans le cas des CGP, comment abordent-ils la gestion sous mandat ? Ils vous délèguent l’allocation d’actifs ?

Gilles Etcheberrigaray

Invest AM est une filiale d’un des plus importants regroupements de CGP, et nous avons plusieurs niveaux de délégation : la gestion sous mandat ou la gestion pilotée en allocation d’actifs. De façon générale, les CGP qui délèguent à des sociétés de gestion des mandats veulent avoir une meilleure qualité de services compte tenu de la réglementation actuelle.

Comment s’incarne votre offre de gestion sous mandat ? La création de profils est-elle le point de départ ? La gestion sur mesure dépend-elle des profils des clients ou de leur patrimoine ?

Loïc L’Hermitte

Nos offres sont construites conjointement avec tous nos partenaires distributeurs : réseau assureur, agences bancaires, banque privée et CGP. Nous avons en moyenne trois ou quatre profils pour les offres en gestion pilotée par le réseau distributeur. Pour la clientèle fortunée, nous avons plutôt cinq profils, dont un «carte blanche».

En gestion sous mandat, il est important de faire connaître au client le processus de gestion que nous lui proposons. Pour cela, nous nous appuyons sur des produits simples et liquides aussi bien pour la gestion pilotée que la gestion sur mesure : des OPC à valeur liquidative quotidienne pour toutes les offres, avec des titres vifs en plus pour la clientèle fortunée. Notre offre est en architecture ouverte, en moyenne de 60 % à 70 %. Pour sélectionner les fonds, nous nous appuyons sur l’équipe de multigestion qui a été rapprochée de l’équipe de gestion sous mandat il y a dix-huit mois afin d’améliorer les synergies. Nous avons mis en place quatre binômes sur quatre classes d’actifs principales pour suivre de manière fine les fonds dans lesquels nous avons investi. Enfin, nous disposons également en interne d’une équipe Cross Asset Solutions avec qui nous avons créé des solutions toutes faites exclusivement réservées à la gestion sous mandat.

Alexis Naacke

Nous avons construit dix profils de risque, du profil un investi à 100 % dans le fonds en euros au profil dix investi à 100 % dans les actions. En ce qui nous concerne, l’innovation est dans le profilage des clients et non pas la gestion, qui est très classique. Nos algorithmes vont conseiller un profil de risque pour le client en fonction de trois facteurs, déterminés sur la base d’une vingtaine de questions : l’horizon de temps, l’appétence au risque et la part du patrimoine que représente son investissement financier. En fonction de cela, nous lui proposons un profil de risque qu’il accepte ou qu’il peut revoir à la hausse ou à la baisse. Pour des clients plus fortunés (patrimoine supérieur à 150 000 euros), nous avons mis à disposition une poche libre dans le contrat d’assurance-vie, dans laquelle ils peuvent piocher des fonds gérés de façon active comme les fonds thématiques, de stock picking ou décorrelés des marchés. Le cœur de cette gestion sous mandat est ainsi indiciel, et en satellite les fonds actifs choisis par le client. Sur cette partie, il peut demander conseil à un CGP. Si nous avons opté pour dix profils, c’est pour calibrer au mieux le risque que peut supporter un client. Dans la période actuelle, si les clients nous appellent parce qu’ils sont inquiets, c’est parce que leur profil a été mal calibré au départ. Nous leur recommandons de rester dans leur profil car, s’ils en sortent, ils auront beaucoup de mal à retrouver leur performance quand les marchés repartiront à la hausse.

Gilles Etcheberrigaray

Pour la gestion sous mandat en direct, qui concerne des patrimoines supérieurs à 750 000 euros, nous proposons des idées à nos clients qui les acceptent à 80/85 %, les autres souhaitant plutôt personnaliser et optimiser leur mandat en fonction de demandes particulières (pas de marchés émergents, des fonds actifs plutôt que des ETF ou inversement, etc.). La grande majorité des clients suit toutefois les recommandations globales, puisque nous avons une approche top-down. En ce qui concerne les profils, nous en avons quatre : modéré, équilibré, dynamique ainsi qu’une allocation spécifique pour les PEA. Nous préférons avoir des bornes très larges plutôt que d’avoir carte blanche. Cela permet aux clients de se positionner et au gérant de jouer un rôle d’amortisseur du cycle.

Maxime Ricomes

Chez Aviva Investors, c’est notre maison mère, l’assureur Aviva France, qui détermine le profil de risque des clients afin de les affecter à l’un des trois profils auxquels sont associés des budgets de risque et des allocations adaptés. Nous avons la charge du conseil et de la gestion de l’allocation dans le respect de ce budget de risque. Notre gestion sous mandat s’inscrit dans la démarche ESG du groupe, et tous les fonds sélectionnés sont a minima en intégration ESG, avec une grande majorité de fonds labellisés.

En termes de gestion, nous travaillons à 70 % en architecture ouverte. Notre équipe de solutions d’investissement définit des allocations stratégiques qui correspondent aux budgets de risque. Elles ont vocation à être les plus diversifiées possible. L’allocation d’actifs utilise de nombreux supports de gestion active. Nous pensons, en effet, pouvoir créer de la valeur aussi bien dans l’allocation tactique que dans le choix des fonds. Nous avons une liste constituée par notre équipe de sélection, qui permet aux clients particuliers d’accéder à des fonds de sociétés de gestion de premier ordre qui sont parfois plus tournées vers la clientèle institutionnelle.

Vous avez évoqué précédemment l’apport de la multigestion au travail de l’équipe de gestion sous mandat. Constate-t-on une tendance au rapprochement de ces deux équipes ?

Loïc L’Hermitte

Nous avons, en effet, rapproché les équipes de multigestion et de gestion sous mandat, même si chacune gère des produits spécifiques. Comme nous utilisons des instruments similaires, nous avons choisi de mettre en place cette organisation, source d’économies d’échelle et de synergies. De plus, avec l’intégration des critères ESG, qui prend plus d’ampleur, il nous semble plus pertinent de mutualiser les moyens. Nous avons une liste d’environ 300 fonds commune aux deux équipes et constamment revue. Depuis début mars, avec la crise liée au coronavirus, notre équipe a beaucoup sollicité les gérants des fonds dans lesquels nous sommes investis avec une répartition des tâches beaucoup plus aisée.

Gilles Etcheberrigaray

En tant que «pure player» de l’allocation d’actifs, notre gestion est résolument internationale, et nous intervenons sur toutes les zones géographiques, toutes les classes d’actifs, tous les secteurs et toutes les devises afin de mettre en œuvre notre vision de marché. Nous le faisons en n’investissant que via des fonds, ETF et dérivés, et c’est pour nous le meilleur moyen de mettre en place notre approche purement top-down. Un point important : nous sommes à 100 % en architecture ouverte.

Quels sont vos supports d’investissements : fonds actifs ou ETF ? Une combinaison des deux ?

Maxime Ricomes

Les équipes multi-actifs et de sélection de fonds travaillent conjointement : cinq analystes de fonds et une dizaine de gérants multi-actifs, la gestion sous mandat étant une combinaison des deux expertises. En ce qui concerne le choix des supports, nous mêlons gestion active et gestion indicielle. Nous utilisons notamment un fonds indiciel investi dans les grandes valeurs américaines avec un filtre ISR. Du côté de la gestion active, certaines stratégies génèrent des alphas décorrélés et, en termes de construction de portefeuille sur une classe d’actifs, c’est très important. Par exemple, pour les actions européennes, nous utilisons trois fonds dont les alphas sont bien décorrélés et dont nous pensons qu’ils sont en mesure de surperformer les indices. Nous avons créé des attributions de performance afin de visualiser quelle est la contribution de l’allocation d’actifs et celle de la sélection de fonds. L’une peut compenser l’autre et, si nous avons eu raison sur les deux, cela crée de la valeur pour nos clients.

Alexis Naacke

Sur le long terme, la gestion passive surperforme la gestion active, notamment en raison de frais moins élevés. C’est la raison pour laquelle nous avons fait le choix de la gestion indicielle. L’équipe de gestion sélectionne les ETF avec un critère principal : la qualité de sa réplication. Tous les ETF ne se valent pas, donc il y a un vrai travail de sélection à faire. Ensuite, l’équipe de gestion construit les allocations stratégiques de chacun des profils puis l’allocation tactique. L’allocation stratégique est très importante, car elle correspond au projet choisi par le client, tandis que l’allocation tactique est uniquement macroéconomique. Aucune décision ne sera prise sur une conviction personnelle ou sur l’intuition d’un gérant. La décision est prise en fonction des risques macroéconomiques à court terme.

Loïc L’Hermitte

Nos gestions profilées ou sur mesure sont construites sur le principe d’une allocation d’actifs en fonction du profil choisi. Tous les mois, l’exposition au marché actions est calibrée autour de notre allocation cible. Nous procédons de même pour le niveau de duration. De manière générale, nous utilisons des fonds actifs tant sur la partie taux qu’actions mais n’écartons pas les fonds indiciels dans certaines circonstances. Quant aux actions, nous privilégions clairement la gestion active avec des grandes capitalisations de préférence.

Gilles Etcheberrigaray

Chez Invest AM, nous mettons en œuvre une approche top-down avec des idées d’allocation très fortes et, si nécessaire, le niveau de cash en portefeuille peut être élevé. Nous investissons de façon globale : actuellement, par exemple, nous n’avons pas d’actions ou de taux européens. Nous utilisons aussi bien des fonds actifs que des fonds indiciels, mais nous avons une règle : les trackers plutôt pour les actions, et les fonds actifs pour les obligations.

La gestion sous mandat est-elle coûteuse pour le client, surtout quand elle utilise des fonds gérés activement ? Le client doit-il supporter un empilement des frais ? Comment parvenez-vous à rendre cette offre plus accessible ?

Alexis Naacke

Les frais sont un des premiers vecteurs de destruction de performance sur le long terme. C’est d’autant plus important dans un environnement de taux bas, surtout pour les profils les plus défensifs. Nous avons fait le choix de réduire autant que possible les frais de gestion, et nous affichons les frais de nos sous-jacents, ce que font rarement nos concurrents.

Loïc L’Hermitte

Outre les frais classiques des mandats de gestion qui varient en fonction de l’offre construite, il y a en effet les frais des sous-jacents, mais la réglementation MIF 2 les a rendus plus transparents. Pour les comptes-titres et les PEA, les gérants sous mandat ont l’obligation de privilégier des «clean shares». Toutes les performances que nous publions sont nettes de frais. Le client peut par ailleurs être informé des coûts ex ante et ex post de son mandat de gestion. Que ce soit en gestion indicielle ou en gestion active, le juge de paix final demeure la performance nette de frais.

Maxime Ricomes

La performance finale est en effet ce qui compte le plus pour les clients particuliers ! En ce qui nous concerne, il revient à l’assureur de définir les frais de façon transparente comme le prévoit la réglementation. Dans la sélection des supports que nous intégrons, la structure des frais, entre frais fixes, commissions de surperformance et frais courants, est évidemment un élément que nous regardons attentivement, notamment au regard de l’alpha généré. Nous recherchons pour ce faire des gérants dont nous estimons qu’ils sont susceptibles d’apporter une forte valeur ajoutée dans le cadre de la gestion de leurs fonds.

Gilles Etcheberrigaray

La chasse aux frais est importante, car cela affecte la performance. Mais avoir une gestion de qualité a un prix. Nous sommes totalement transparents avec nos clients, à qui nous expliquons que les frais reflètent la qualité de la gestion, la confiance, la proximité mais aussi la capacité à absorber les cycles. Mais nous essayons de trouver les produits les moins coûteux pour mettre en œuvre notre allocation d’actifs.

La gestion sous mandat offre-t-elle aux clients l’opportunité d’investir dans des solutions innovantes ou des classes d’actifs plutôt réservées aux investisseurs institutionnels ?

Alexis Naacke

Pour notre cœur de clientèle dont les connaissances financières sont faibles, la gestion sous mandat donne accès à la diversification sur une large palette d’actifs. Pour un profil équilibré (50 % actions et 50 % obligations), le client est investi dans plus de 7 000 dettes d’Etat ou d’entreprises. Seule la gestion sous mandat indicielle permet de construire une allocation de 1 000 euros aussi diversifiée.

Maxime Ricomes

Dans les réseaux, les clients particuliers sont demandeurs de solutions investies dans l’immobilier, le private equity ou la dette privée. Nous avons mené une réflexion avec notre assureur, mais il apparaît aujourd’hui assez compliqué d’intégrer des solutions d’investissements à ces classes d’actifs avec un niveau de liquidité adéquat pour ce segment de clientèle. Cela ne nous empêche pas de proposer des allocations bien diversifiées. Un des intérêts de la gestion sous mandat est de permettre la sélection de fonds sur des classes d’actifs pour lesquelles il n’est pas facile pour l’épargnant de choisir un support d’investissement, comme les small caps, le high yield ou la dette émergente. Par ailleurs, dans une allocation, nous avons des actifs défensifs comme des fonds monétaires ou d’obligations d’Etat, ainsi qu’une poche de performance absolue qui apporte de la décorrélation. Parmi ces gestions, certains des gestionnaires sous-jacents peuvent avoir des expositions à des actifs alternatifs (matières premières, actifs réels, closed-end funds…) ou offrir des stratégies alternatives (abitrage de crédit, usage d’options, obligations convertibles…)

Loïc L’Hermitte

En gestion sous mandat (pour le compte de personnes physiques), nous n’investissons pas dans les produits structurés, l’immobilier ou le private equity, car nous n’apportons pas de valeur ajoutée dans la sélection de ces produits qui justifierait une tarification. Ces solutions sont en revanche proposées en gestion libre. Au sein des OPC, nous pouvons investir en diversification dans des fonds visant une performance absolue à condition de bien suivre les stratégies. Il s’agit ici d’introduire plus de flexibilité en nous appuyant sur un savoir-faire de gérants externes. Le problème est que cela revient à déléguer complètement la gestion à ces gérants. Nous avons cherché d’autres solutions, comme protéger nos portefeuilles, mais acheter des futures ou des options est assez compliqué en gestion sous mandat. Avec l’équipe Cross Asset Solutions de Federal Finance Gestion, nous avons conjointement monté un fonds nourricier, à partir d’un fonds maître investi dans les actions européennes avec une approche ESG, dans lequel l’allocation varie entre 0 et 100 %. L’innovation réside dans le fait que c’est le gérant sous mandat qui décide lui-même de l’exposition aux actions. Nous donnons ainsi des instructions à cette équipe en fonction de notre propre stratégie et de nos propres vues de marché et réalisons cela sur une partie de la poche actions. Par ailleurs, il y a deux ans, nous avons décidé de construire, pour nos clients et pour la gestion sous mandat, un fonds de fonds, Federal Oxygène, autour de quatre thèmes : l’alimentation, l’eau, la santé et l’environnement. Beaucoup de fonds thématiques existent sur la Place, mais nous souhaitions maîtriser en interne, tout en maintenant des coûts compétitifs, l’allocation entre quatre thématiques de croissance, boursièrement homogènes et qui parlent facilement aux clients. Force est de reconnaître que l’actualité du moment renforce encore davantage l’intérêt de ce type de fonds. L’allocation de ce fonds est gérée conjointement par les équipes de multigestion et de gestion sous mandat.

Gilles Etcheberrigaray

Nous donnons accès à nos clients à des classes d’actifs comme la dette émergente, la dette privée ou les devises. Nous intégrons également des stratégies alternatives, à condition qu’elles soient lisibles et compréhensibles. En revanche, nous ne proposons pas de fonds immobiliers ou de private equity dans nos mandats financiers.

Comment intégrez-vous l’investissement responsable dans la gestion sous mandat ?

Loïc L’Hermitte

L’investissement responsable est bien ancré dans le monde institutionnel, mais nous avons de plus en plus de demandes de la part de nos distributeurs, notamment notre assureur Suravenir avec qui nous avons commencé des mandats ISR il y a deux ans pour le compte de la clientèle personnes physiques. La difficulté est de trouver le bon calibrage : soit on opte pour du 100 % ISR, mais, dans ce cas-là, l’exposition aux différentes classes d’actifs est plus restreinte, soit on s’appuie sur des méthodologies externes qui reposent elles-mêmes sur des données fournies par des sociétés cotées et trouvent donc rapidement leurs limites. Avec l’équipe d’analyse ESG du groupe Arkéa Investment Services, nous avons donc choisi de mettre en place une méthodologie propriétaire de suivi des fonds dans lesquels nous sommes investis.

Gilles Etcheberrigaray

Concernant la gestion sous mandat, nous sommes en train de construire une offre 100 % responsable, en plus de l’offre actuelle, qui sera bientôt disponible pour nos clients. Notre offre existante de gestion pilotée est également en train d’évoluer, et nous investissons de plus en plus dans des fonds dits «responsables» afin d’arriver dans le courant de l’année à des allocations avec, en grande majorité, des fonds ISR.

Maxime Ricomes

Notre groupe a fait le choix de l’ESG et, en France, cela passe notamment par l’obtention du label d’Etat ISR pour une grande partie de nos fonds ainsi que l’intégration des critères ESG dans toutes nos décisions de gestion. Nous avons la conviction que l’offre crée la demande. Ainsi, en avril 2019, notre gestion sous mandat est devenue 100 % ESG et, depuis, le développement de nos encours s’est accéléré. Dans l’offre de GSM, nous allons privilégier les fonds qui ont le label ISR et le label LuxFLAG, car les labels sont des signaux assez forts pour les clients particuliers. Si certaines maisons de gestion ont fait le choix de ne pas labelliser leurs fonds, notre équipe de sélection de fonds associée à nos analystes ESG sont tout à fait en mesure de valider (ou pas) la manière dont ils procèdent à leur intégration ESG

Alexis Naacke

Il existe beaucoup d’ETF ESG sur presque toutes les classes d’actifs. Cette offre a le mérite d’être objective et systématique, mais elle est encore discutable. Ce n’est pas de l’investissement responsable très engagé donc, pour l’instant, nous ne faisons pas de gestion sous mandat 100 % ISR. En revanche, dans notre processus de sélection des ETF, si les réplications sont identiques, nous allons privilégier un ETF ESG. Si le client recherche une thématique ISR bien définie, mieux vaut qu’il se tourne vers la gestion active, où il y a plus de valeur ajoutée.

Face à des marchés chahutés, la gestion sous mandat est-elle réactive ? Peut-elle s’adapter rapidement à un environnement tel que celui que nous connaissons actuellement ?

Alexis Naacke

Plus que jamais, la gestion sous mandat a son intérêt. Si le client a bien calibré son risque au départ, il doit pouvoir traverser cette période sans trop de stress. Il a délégué ce stress au gérant. Une étude réalisée sur les investissements des particuliers aux Etats-Unis montre bien que le principal facteur de sous-performance sur le long terme, c’est le client lui-même qui l’a créé en voulant acheter quand les marchés étaient très hauts et en vendant au plus bas. La gestion sous mandat évite ces biais cognitifs. Par ailleurs, dans les portefeuilles, nous avons une allocation tactique et, pour un profil équilibré, nous avons commencé l’année avec une exposition favorable aux actifs risqués, car l’environnement macroéconomique nous semblait favorable. Nous avons réduit progressivement cette exposition alors que les mesures de confinement s’étendaient dans le monde. Au sein des actions, nous avons intégré des secteurs défensifs. Nous avons adopté un biais plus défensif, mais sans trop nous éloigner de l’allocation cible.

Loïc L’Hermitte

Il me semble, en effet, important que le client reste dans le profil qu’il a choisi quel que soit l’environnement des marchés tout en conservant la liberté de changer si des évolutions patrimoniales sont intervenues entre-temps. Il est également essentiel de suivre et de respecter un process de gestion (basé sur l’analyse des fondamentaux et des valorisations), connu des clients, et qui a été éprouvé lors de différents cycles boursiers. Pour ce qui concerne l’environnement actuel, regardons d’abord d’où l’on venait : depuis l’été 2019, nous avions le sentiment que les marchés financiers étaient davantage guidés par des effets momentum liés à la nouvelle volte-face de la Fed (injection de liquidités), prolongeant assez artificiellement une fin de cycle qui se traduisait par une absence de croissance bénéficiaire pour les actions. En conséquence, nous avions réduit notre exposition au marché actions au profit du cash, des obligations et de l’or. Cela nous a coûté un peu de performance sur la fin de l’année. A partir de mi-février, nous avons continué à alléger la poche crédit et nous avons introduit des fonds flexibles comme celui évoqué précédemment. Puis, mi-mars, considérant que les valorisations des marchés actions redevenaient attractives, les portefeuilles ont été rééquilibrés et l’exposition aux actions via des fonds ou des titres vifs, accrue. Considérant toutefois que les marchés actions n’ont pas intégré toutes les mauvaises nouvelles, les portefeuilles conservent une exposition au cash et à l’or importante. Il reste encore beaucoup d’inconnues dans cette crise inédite, et une de taille concerne l’évolution du marché obligataire : va-t-on clore une période de près de quarante ans de baisse des taux après une précédente période de quarante années de hausse de 1941 à 1981 ? Ce qui ne serait pas sans conséquence sur les allocations d’actifs. L’humilité et la patience compteront autant que le pragmatisme et l’opportunisme.

Gilles Etcheberrigaray

Nous nous adaptons en permanence et n’avons pas peur de prendre des positions marquées en ligne avec notre vision des marchés. La gestion sous mandat reste malgré tout un peu moins «réactive» que la gestion de fonds, qui permet d’utiliser des futures facilitant la gestion des risques. Cependant, même si nous n’avons pas cette flexibilité dans la gestion sous mandat, nous avons par exemple réussi à limiter fortement la baisse de cette année en faisant des choix drastiques et en augmentant la part de cash, jusqu’à 50 % sur certains profils.

Maxime Ricomes

En début d’année, nous avions un scénario modérément positif avec une légère surpondération sur les actifs risqués. Dans les portefeuilles, nous avions implémenté une construction fondée sur la décorrélation avec une exposition à la duration de dettes souveraines, notamment américaines, très longues, ce qui nous a bien aidés quand les marchés ont plongé. En février, nous avons réduit l’exposition aux actions en faveur de stratégies de performance absolue. Mi-mars, les allocations d’actifs ont été revues : une grande partie du crédit de bonne qualité a été vendue au profit des fonds monétaires pour réduire l’exposition à la duration et afin d’avoir des liquidités que nous pourrons redéployer en fonction des conditions de marché. Cela illustre bien la réactivité de notre gestion en fonction des vues de marché. En matière de sélection de fonds, nous avons aussi augmenté la partie des fonds «low vol» (faible volatilité), moins sensibles au marché et générant de l’alpha ajusté au risque sur le long terme.  

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