Exportateurs, méfiance : le risque d’impayés se renforce !

Publié le 24 janvier 2020 à 15h34    Mis à jour le 24 janvier 2020 à 18h20

Alexis Garatti

Nouvelle décennie, nouvelles perspectives : en 2020, les exportateurs français auront de belles opportunités à saisir à l’international. En effet, les exportations françaises pourraient croître de + 8 milliards d’euros cette année, avec des foyers de demandes principalement situés en Europe (+ 3,5 milliards d’euros), mais également au grand export : aux Etats-Unis (+ 1 milliard d’euros), au Japon et en Chine (+ 0,4 milliard d’euros), au Vietnam et au Qatar (+ 0,3 milliards d’euros). De quoi aller conquérir de nouvelles parts de marché, plus ou moins loin de nos frontières, et démarrer ou poursuivre son développement international.

Malheureusement, une bonne nouvelle s’accompagne bien souvent d’une mauvaise. Certes, des opportunités commerciales internationales existent, mais, pour les saisir, il faudra se montrer particulièrement sélectif dans le choix de ses partenaires. Pourquoi ? Parce que le risque d’impayés, menace majeure pour les entreprises, ne cesse de se renforcer.

On mesure le risque d’impayés par l’évolution des défaillances d’entreprises : si les défaillances d’entreprises augmentent, le risque s’accroît, et vice versa. En 2019, les défaillances d’entreprises ont crû à l’échelle mondiale de 9 %. En cause, une forte croissance des défaillances constatée en Chine (+ 20 %) et une inversion de tendance en Europe de l’Ouest (+ 2 %) et en Amérique du Nord (+ 3 %). Comment expliquer cette tendance ? Deux facteurs principaux sont à retenir : l’installation durable d’une dynamique de croissance économique faible, notamment dans les économies avancées et dans le secteur industriel ; les effets des conflits commerciaux, des incertitudes politiques et des tensions sociales.

Avant de sortir, pensez à bien vous couvrir

Vous pensiez qu’en démarrant une nouvelle décennie on pourrait faire table rase du passé et partir sur une nouvelle dynamique ? Raté ! Cette année, les politiques monétaires devraient, certes, rester accommodantes. Mais cela ne sera pas suffisant pour compenser une demande plus faible, une concurrence par les prix plus féroce, et des coûts de production plus élevés (notamment les salaires).

Ainsi, en 2020, le risque d’impayés continuera de s’accroître dans le monde, avec une hausse des défaillances d’entreprises attendue à + 6 %. Il s’agira alors de la quatrième année consécutive de hausse des défaillances, signe que le nombre d’entreprises en difficulté de paiement devient particulièrement élevé. In fine, quatre pays sur cinq seront touchés par une hausse des défaillances cette année (deux pays sur trois en 2019). Conclusion : peu importe où vous exportez, vous êtes fortement exposé au risque de non-paiement de vos créances.

Mais regardons quand même de plus près les zones où le danger semble important. L’Asie sera toujours le principal contributeur de cette hausse des défaillances (+ 8 %), avec une situation particulièrement inquiétante en Chine (+ 10 %) et en Inde (+ 11 %). En Europe de l’Ouest, le ralentissement économique pèsera également. Les défaillances devraient y croître de + 3 % cette année, avec des pics à prévoir en Espagne (+ 5 %), en Italie (+ 4 %), en Allemagne et au Royaume-Uni (+ 3 %). Enfin, aux Etats-Unis, une hausse de + 4 % est attendue en 2020. Europe, Asie, USA : cette liste ne vous rappelle rien ? Si vous voulez saisir les opportunités qui existent dans ces pays, il vous faudra absolument analyser la solidité financière des entreprises avec lesquelles vous envisagez de commercer.

Quand les grands s’enrhument, les plus petits éternuent

Autre facteur d’inquiétude, les défaillances de grandes entreprises (celles dont le chiffre d’affaires est supérieur à 50 millions d’euros). A l’échelle mondiale, le nombre de défaillances de grandes entreprises sur les neuf premiers mois de 2019 est resté stable par rapport aux neuf premiers mois de 2018 (249 cas constatés). En revanche, la sévérité de ces défaillances a fortement crû : le chiffre d’affaires cumulé des grandes entreprises défaillantes a augmenté de + 39,1 milliards d’euros en 2019, pour atteindre désormais 145,2 milliards d’euros.

Un scénario d’effet domino n’est pas à exclure : les plus petits fournisseurs, souvent dépendants de quelques gros clients, pourraient souffrir des difficultés rencontrées par leurs principaux partenaires commerciaux. Les zones d’alerte se situent dans la construction en Asie, l’énergie et la distribution en Amérique du Nord, la distribution et les services en Europe de l’Ouest.

Vous l’aurez compris, 2020 sera synonyme d’opportunités, mais aussi de danger. Soyez audacieux, c’est nécessaire. Mais soyez aussi vigilants, c’est primordial. Anticipation et préparation sont gages de réussite à l’export.

Alexis Garatti Directeur de la recherche économique ,  Euler Hermes

Alexis Garatti, directeur de la recherche économique, Euler Hermes

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