L'analyse de Jacques-Aurélien Marcireau

La fin de la linéarité : naviguer par temps de chaos

Publié le 27 mars 2020 à 14h47

Jacques-Aurélien Marcireau

Les cartographies du passé sont devenues obsolètes, laissant la place à une nouvelle donne. Par leur capacité d’adaptation, les marchés actions apportent une réponse face aux nouvelles incertitudes. Une gestion active de conviction permet d’identifier les opportunités qui vont naître du chaos.

Quelle ne serait pas la surprise d’un Christophe Colomb, si seulement quelques années après sa découverte des Amériques, le monde subissait un changement de magnétisme, une inversion des pôles, bref, quelque chose qui rende toutes les cartes de navigation antérieures obsolètes ?

Lorsque ce ne sont pas seulement les cartes qui sont rebattues, mais également les règles du jeu qui changent brusquement, cela peut représenter une opportunité, mais cela nécessite de repenser sa stratégie et en premier lieu d’avoir conscience de cette nouvelle donne.

C’est une conviction très forte : nous venons de vivre un moment similaire pour un investisseur. Les règles ont durablement changé et les cartographies du passé concernant la façon d’investir son épargne afin de s’inscrire dans le temps sont désormais partiellement inutilisables.

En partant du paysage le plus macroéconomique au plus microéconomique, nous identifions cinq changements majeurs : l’inconnue écologique, le progrès technologique, la fin du multilatéralisme, l’essor des populismes et la déformation de la structure de marché des actions cotées. Chacun de ces facteurs augmente sensiblement la probabilité d’événements extrêmes, les effets de seuil et rend dangereux tout raisonnement linéaire, ce qui est pourtant notre zone de confort et le climat qui a prévalu au cours des 30 dernières années.

Combinés, les cinq facteurs mentionnés (écologie, technologie, unilatéralisme, populisme et microstructure de marchés) impliquent une nouvelle cartographie, une nouvelle façon de naviguer. Les actions sont une classe d’actifs à part dans la mesure où la valeur intrinsèque d’une entreprise n’est jamais définitivement fixée et dépend de la façon dont les hommes et les femmes qui la composent réagissent face aux circonstances, à l’environnement de l’entreprise. La capacité d’une action à rebondir est donc infinie, ou nulle, selon le capital humain qui la compose.

Ainsi, par sa capacité d’évolution et d’adaptation et en opposition aux classes d’actifs «fixes», l’action est potentiellement l’un des meilleurs investissements face aux incertitudes qui caractérisent le monde actuel. Plus que jamais, pour naviguer par temps de chaos, détenir des actions s’avère nécessaire selon nous.

Nous ne croyons pas au scénario catastrophe et pensons au contraire que des opportunités vont naître de ce chaos potentiel pour celui qui fait preuve de principes, de convictions, mais également de pragmatisme dans sa façon d’investir.

C’est pourquoi, aujourd’hui, nous pensons que les sociétés qui apportent des solutions ou prennent en compte sérieusement le sujet de l’écologie, disposent de capacités d’adaptation, face à l’environnement géopolitique et politique devenu bien plus complexe partout sur la planète, s’emparent de la technologie pour en faire un avantage concurrentiel tout en investissant massivement dans le capital humain, constituent des placements performants.

Pour tirer pleinement parti de ces opportunités, encore faut-il regarder au-delà du bruit perturbant que nous envoie le marché. D’une part, le prix d’une action quotidiennement affichée ne reflète que le prix de la dernière transaction effectuée : lorsque cette dernière est le fait dans plus de 70 % des cas de flux passifs, de gestions quantitatives ou de trading à haute fréquence, cela ne vous donne absolument aucun renseignement sur la valeur de cette entreprise, ses perspectives futures et sa capacité à appréhender les défis évoqués précédemment.

Une gestion actions active de conviction, par ses aspects traditionnels, se situe peut-être pour certains, aux antipodes de l’innovation. Elle devrait pourtant se tailler la part du lion au sein de toutes les allocations des investisseurs lorsque les défis se matérialiseront avec un peu plus d’âpreté. 

Jacques-Aurélien Marcireau

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