La recherche d’actifs obligataires «protecteurs» est un vrai défi

Publié le 23 septembre 2016 à 9h47    Mis à jour le 4 octobre 2016 à 17h29

Marc Olivier

Dans une période de taux d’intérêt nuls, voire négatifs, l’approche allocataire des investisseurs «patrimoniaux» doit répondre à de nouvelles réalités. Quelle place accorder à l’obligataire quand la chute des rendements dégrade significativement son profil de risque ?

Revenons brièvement sur les distorsions de valorisation qui caractérisent les marchés aujourd’hui. Les politiques monétaires ultra-accommodantes et «reflationnistes» des banques centrales ont, au cours des dernières années, contribué à envoyer les taux souverains au plancher. Les rémunérations négatives de certaines obligations considérées jusqu’ici comme valeurs refuges – c’est le cas du Bund allemand ont mécaniquement rehaussé le risque de taux et de spread de ces titres. Le phénomène s’est propagé à certaines émissions du crédit corporate, et cette pression continue sur la courbe des taux a créé une quête légitime, mais souvent dangereuse, de rendement. Les investisseurs ont dû explorer de nouveaux segments obligataires, toujours plus loin dans le spectre du risque, pour pouvoir capter seulement quelques points de base de rendement supplémentaire.

Faire preuve d’agilité dans la gestion obligataire

C’est donc un défi majeur d’identifier des actifs obligataires encore capables de jouer leur rôle traditionnel de contrepoids aux actifs dits «risqués», dans le cadre d’une allocation diversifiée. Et la flexibilité s’impose comme la meilleure des réponses : il s’agit pour les gérants obligataires de jouir de toute la latitude nécessaire, non seulement pour sélectionner les titres les mieux-disants en matière de rendement ajusté au risque, mais aussi pour gérer activement la duration. Cela implique naturellement une approche globale et non contrainte (par un quelconque benchmark) des marchés de taux.

Une telle liberté permet une meilleure diversification, géographique, des styles de titres ou des maturités, qui est la pierre angulaire du bon équilibre des risques. Parmi les arbitrages à réaliser aujourd’hui, il faut privilégier les bons du Trésor américain aux obligations d’Etat allemandes et françaises. Dans un contexte économique bien plus dynamique aux Etats-Unis qu’en Europe, des positions longues sur les obligations souveraines américaines et sur le dollar US s’avèrent bien plus protectrices. Le taux à 10 ans américain s’établit à 1,60 % contre - 0,08 % pour son équivalent allemand !

La nécessité de la diversification ou comment capter des rendements à moindre risque

Les obligations sécurisées («covered bonds») affichent également des caractéristiques très intéressantes. En particulier celles du marché danois, qui est le plus ancien au monde en la matière. Grâce à leur adossement à des crédits hypothécaires de bonne qualité ou à des créances du secteur public, ces titres offrent de solides garanties et un niveau de séniorité appréciable. Ces obligations quasi souveraines se distinguent donc par un profil de risque de meilleure qualité que celui de bon nombre d’obligations d’Etat de pays «core».

Enfin, au sein du marché du crédit, le compartiment «cross-over» représente lui aussi une source de rendement à moindre risque. Il regroupe les obligations d’entreprises classées au seuil de deux catégories : celles dont le niveau de qualité n’est plus tout à fait investment grade et celles dont le niveau de qualité n’est pas assez dégradé pour être considéré comme high yield. En somme, les titres notés BBB, BB et B par les agences. Moins prisés que le reste du marché corporate, ces titres recèlent aujourd’hui des spreads un peu plus consistants. La valeur ajoutée des «6 B» se situe bel et bien dans la combinaison d’un rendement supérieur à celui proposé en investment grade pur, et d’un niveau de risque inférieur à celui du segment high yield pur.

Quand les vertus protectrices traditionnelles de la classe d’actifs obligataire sont mises à rude épreuve, une redéfinition de la balance des risques, ainsi qu’une recherche de diversification vers des segments rémunérant encore le risque à sa juste valeur, présentent quelques gages de robustesse.

Marc Olivier

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