Les conditions de crédit dans le viseur de la Fed

Publié le 3 décembre 2018 à 10h21

Didier Borowski

La conjoncture américaine reste solide et plaide pour la poursuite de la hausse des taux de la Fed. Mais la remontée des spreads de crédit pourrait changer la donne, surtout si elle se poursuit. Depuis début octobre, le spread du high yield (HY) s’est accru de quelque 100 points de base, et celui de la catégorie BBB au sein de l’investment grade de 40 pb sur la même période. Même si le repli marqué des prix du pétrole et de l’énergie explique en grande partie la remontée du spread HY (le secteur pétrolier représente 16 % de l’indice, et le reste de l’énergie 4 %), il s’agit de facto d’un durcissement des conditions de crédit que la Fed ne peut ignorer.

En effet, l’encours de dette obligataire s’est très nettement accru au cours de ce cycle, notamment sur la période récente pour les entreprises dont les profits sont faibles et la dette élevée. L’encours de dette risquée s’élève désormais à plus de 2 300 milliards de dollars. Parallèlement, on observe que la part des obligations investment grade les plus mal notées (BBB) atteint des niveaux record (35 % de la dette obligataire des entreprises, soit plus de 2 200 milliards de dollars). Un ralentissement brutal de l’économie américaine ferait basculer rapidement une partie de ces obligations dans la catégorie HY, provoquant des ventes forcées de ces dernières et, de ce fait, un durcissement brutal de l’ensemble des conditions de crédit.

Pour la Fed, il s’agit moins d’un débat sur le niveau du taux d’équilibre (dont la mesure est, on le sait, très incertaine) que sur la capacité des entreprises à absorber un durcissement supplémentaire de leurs conditions de financement sans que cela ne pèse sur leurs investissements, et donc sur les perspectives de croissance.

Didier Borowski Responsable recherche politiques macro ,  Amundi Investment Institute

Didier Borowski est responsable de la recherche sur les politiques macroéconomiques au sein de l’Amundi Investment Institute. Auparavant, il a exercé plusieurs fonctions : responsable de la stratégie Taux et Changes, co responsable de l’équipe de Stratégie et Recherche économique, responsable de la macroéconomie puis plus récemment responsable global views. Avant de rejoindre Amundi, il était économiste et stratégiste senior de Société Générale Asset Management (2000-2009). Didier Borowski a commencé sa carrière au sein de la Direction de la Prévision du Ministère de l’économie et des finances. Il a également exercé les fonctions d’expert auprès de la Commission européenne. Didier Borowski est Docteur ès sciences économiques. Il a été Professeur associé à l’Université Paris Nord (2007-2011) puis a enseigné plusieurs années à l’université Paris-Dauphine.

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