Ne pas oublier les effets de la hausse du prix du pétrole

Publié le 8 juin 2018 à 14h43    Mis à jour le 28 juin 2018 à 18h28

Patrick Artus

Il semble parfois que les économistes, les prévisionnistes et les marchés financiers ont oublié que le prix du pétrole est passé de 42 dollars le baril il y a un an à près de 80 dollars aujourd’hui. Pourtant cette hausse est forte, et affecte l’inflation, la croissance et les politiques monétaires. Depuis un an, elle a réduit la croissance de 0,5 point dans la zone euro, de 0,3 point aux Etats-Unis, et accroît l’inflation de 0,6 point aux Etats-Unis, 0,4 point dans la zone euro.

La perte de croissance vient surtout de la consommation : puisque les salaires nominaux réagissent peu à l’inflation, la hausse des prix due à celle du pétrole a un effet négatif fort sur les salaires réels.

Si la hausse de l’inflation a été à peu près correctement vue par les marchés financiers (les anticipations d’inflation ont augmenté), la perte de croissance n’est, elle, pas correctement mesurée par les prévisionnistes ou par les investisseurs : les perspectives de «bénéfices par action», par exemple, correspondent à une croissance beaucoup plus forte que celle qui va se réaliser.

Il faut de plus s’interroger sur la réaction des banques centrales. Si les salaires nominaux restent faiblement indexés sur les prix, l’inflation sous-jacente va peu augmenter : il est probable alors que les banques centrales vont réagir davantage à la perte de croissance qu’à la hausse de l’inflation, donc elles vont être prudentes dans la remontée des taux d’intérêt.

Il ne faut pas oublier tous ces effets (sur la croissance, l’inflation, les salaires réels et la consommation, les résultats des entreprises) de ce qui est presque un choc pétrolier.

Patrick Artus Chef économiste ,  Natixis

Patrick Artus est Chef économiste de Natixis depuis mai 2013. Polytechnicien, diplômé de l’Ensae, et de l’IEP Paris, Patrick Artus intègre l’Insee en 1975, où il participe notamment à des travaux de prévision et de modélisation, avant de rejoindre, cinq ans plus tard, le département d’économie de l’OCDE. En 1982, il devient directeur des études à l’Ensae puis il est nommé, trois ans plus tard, conseiller scientifique au sein de la direction générale des études de la Banque de France. En 1988, il intègre la Caisse des dépôts et consignations, où il exerce successivement en tant que chef du service des études économiques et financières puis responsable de la gestion actif-passif. En 1993, il est nommé directeur des études économiques, responsable de la recherche de marché chez CDC-Ixis. Depuis 1998, il était directeur de la recherche et des études de Natixis. Il a été promu chef économiste en mai 2013.

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