Le vertige de l’effet de levier

Publié le 2 avril 2021 à 15h17

Thierry Million

L’implosion d’un hedge fund, Archegos CM, n’a pas créé de panique sur les marchés, car elle est considérée comme un risque idiosyncratique. Même si certains prime brokers devront éponger des milliards de pertes, le secteur financier a très rapidement effacé la baisse provoquée par l’effet d’annonce. Néanmoins, cet événement constitue un nouveau signal d’alarme pour les régulateurs et les banques centrales. L’argent qu’elles injectent depuis des mois stimule de facto l’effet de levier bien au-delà des 5 à 15 fois généralement déclarés par les hedge funds. De plus, la nature secrète de transactions comme les CFD (Contracts for Difference), non soumis à des déclarations de seuil, a pour conséquence que les prime brokers d’un fonds ne connaissent pas l’implication à grande échelle d’autres courtiers. Et lorsque les ventes forcées commencent, chaque prime broker n’est pas seul à dénouer les positions. Tous s’arc-boutent à faire la même chose, faisant disparaître la liquidité.

Les taux et la volatilité comprimés à l’extrême et la perception que les banques centrales voleront au secours des marchés clés encouragent le trading sur marge à grande échelle. Aujourd’hui, il s’établit à un niveau record (données FINRA) sans que l’on sache réellement en mesurer l’ampleur, car le levier réel reste caché jusqu’à la déflagration.

Combien de hedge funds doivent encore imploser, avec le risque de créer une vague systémique, avant que les autorités des marchés financiers ne réagissent ?

Thierry Million Directeur de la gestion obligataire ,  Allianz Global Investors France

Thierry Million est directeur de la gestion obligataire d'Allianz Global Investors France. Ingénieur diplômé en Informatique de l’Institut de Recherche polytechnique de Mulhouse, titulaire d’un DESS en finance de l’Institut Supérieur de Gestion et diplômé de la SFAF, Thierry Million débute sa carrière en 1987 en tant que courtier et responsable de la Trésorerie chez Dynabourse. Il est ensuite gérant obligataire à la Banque Vernes. En 1994 il rejoint Dresdner RCM Gestion en tant que directeur de la gestion obligataire. En 2001 il devient Responsable des activités Product Management et Conseil d’AGF Asset Management. A partir de 2003, il prend la responsabilité des portefeuilles diversifiés des institutionnels et entreprises, ainsi que de la recherche quantitative et économique. En 2006, il est nommé directeur de la recherche économique et quantitative et du Conseil, puis directeur de la gestion obligataire d’Allianz Global Investors en 2008. Depuis 2013, il est directeur de la gestion obligataire institutionnelle.

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