Baromètre rémunérations 2016

Les salaires des directeurs financiers rebondissent

Publié le 2 décembre 2016 à 17h04

Guillaume Clément

Les rémunérations fixes des directeurs financiers ont enregistré une légère hausse en 2016, selon la 5e édition du baromètre annuel réalisé par Michael Page, la DFCG, l’AFTE, l’IFACI et Option Finance. Cette progression s’explique notamment par le fait que certaines entreprises choisissent désormais d’intégrer la part de variable au salaire fixe des responsables financiers.

Après avoir reculé en 2015, les rémunérations des directeurs financiers repartent légèrement à la hausse cette année. Tel est le constat de la 5e édition du baromètre annuel des rémunérations des fonctions finance réalisé auprès de 242 responsables des finances par Michael Page, l’Association nationale des directeurs financiers et de contrôle de gestion (DFCG), l’Association française des trésoriers d’entreprise (AFTE), l’Institut français de l’audit et du contrôle internes (IFACI) et Option Finance. En effet, le salaire brut moyen des directeurs financiers interrogés est estimé cette année à 95 300 euros, contre 94 300 euros en 2015. De plus, ils sont plus nombreux à avoir bénéficié de revalorisations salariales en 2016 : 56 % des sondés sont dans ce cas, contre 51 % en 2015 et 53 % en 2014. «Cette situation s’explique notamment par l’amélioration, certes encore fragile, de la conjoncture économique et de la situation financière de nombreuses entreprises, indique Mikaël Deiller, directeur des divisions finance et comptabilité chez Michael Page. Ces éléments sont en effet de nature à favoriser les revalorisations salariales.»

Des revalorisations salariales limitées

Pour autant, le montant de ces augmentations est le plus souvent limité.

Un tiers des directeurs financiers interrogés ont obtenu une hausse de leur salaire fixe comprise entre 1 % et 3 %, tandis que seulement 12 % d’entre eux ont vu leur rémunération progresser entre 3 % et 8 %. Enfin, la progression a été supérieure à 10 % pour à peine 8 % des répondants. «Ces hausses modérées résultent principalement de deux facteurs, poursuit Mikaël Deiller. D’une part et en dépit de la légère reprise des recrutements de directeurs financiers que nous observons depuis quelques mois, le nombre de candidats à cette fonction demeure supérieur au volume de postes à pourvoir au sein des entreprises, ce qui avantage ces dernières en matière de négociations salariales. D’autre part, le fait que les rémunérations de ces professionnels se situent déjà à des niveaux élevés limite de facto leurs perspectives de progression.»

Ce constat se retrouve d’ailleurs dans l’étude. «40 % des sondés déclarent bénéficier d’une rémunération annuelle comprise entre 60 000 et 89 000 euros, 26 % reçoivent entre 90 000 et 119 000 euros, 11 % de 120 000 à 149 000 euros tandis que 8 % perçoivent plus de 150 000 euros (voir graphique)», détaille Charles Bonati, analyste édition et études au sein de la DFCG. Ces différences sont dues à plusieurs critères. «Elles dépendent principalement de la taille des entreprises et de celle des équipes placées sous la supervision du directeur financier», précise Mikaël Deiller. Pour les salaires les plus élevés, d’autres facteurs peuvent également entrer en ligne de compte, comme par exemple une compétence spécifique en matière de financements structurés, ou un contexte requérant une charge de travail particulièrement importante (préparation d’une introduction en bourse, LBO, déplacements fréquents à l’étranger, etc.).»

Des bonus incorporés au salaire fixe

Si davantage de répondants ont vu cette année leur salaire fixe augmenter, par rapport aux sondés lors de la précédente édition de ce baromètre, ils ne sont en revanche plus que 75 % à bénéficier d’une gratification variable, contre 81 % en 2015. «Quelques entreprises ont en effet récemment fait le choix de réduire – voire de supprimer – la part variable de la rémunération des directeurs financiers et d’augmenter en contrepartie leur salaire fixe, constate Mikaël Deiller. Cette démarche s’explique par le fait que la majorité de ces professionnels considèrent de plus en plus comme acquis le versement de l’intégralité de leur “bonus”, et ressentent donc une réelle frustration lorsque ce n’est pas le cas. Or comme il s’avère que ces fonctions reçoivent effectivement la plupart du temps la totalité de ces émoluments, certains groupes ont considéré qu’il leur serait plus simple, et sans incidence budgétaire majeure, d’inclure ces bonus dans le salaire fixe.»Ce type de démarche est toutefois encore peu courante. Ainsi, pour 31 % des répondants, la part de variable représente moins de 10 % de leur rémunération, alors qu’elle est comprise entre 15 % et 25 % pour 17 % d’entre eux, et est supérieure à 25 % pour 9 % des sondés (voir graphique).

Cette diversité s’observe également en matière de critères de versement : 50 % des bonus sont liés aux objectifs de l’entreprise (marge, chiffre d’affaires, etc.), 46 % dépendent de performances individuelles (réduction des coûts, renégociation des frais bancaires, etc.), tandis que 18 % et 13 % sont conditionnés à des réalisations respectivement «non quantitatives» et «d’équipe». Ces deux derniers types d’objectifs portent par exemple sur le déploiement d’un système d’informations, la rétention des collaborateurs ou encore la réduction des délais de clôture des comptes. En ce qui concerne les modalités de paiement des rémunérations variables, 88 % des directeurs financiers déclarent les recevoir intégralement chaque année, tandis que 9 % en perçoivent une partie en différé l’année suivante et 3 % se les voient attribuer progressivement sur plusieurs années. «Certaines entreprises utilisent en effet le déblocage d’un salaire variable en plusieurs temps comme une technique de rétention des collaborateurs, ces derniers étant souvent moins enclins à changer d’employeur durant les derniers mois qui précèdent le versement d’une prime», explique Mikaël Deiller.

Trois directeurs financiers sur cinq satisfaits de leur poste

Ce type de démarches se révèle d’autant plus pertinent pour retenir les directeurs financiers compte tenu du fait que seulement 61 % des sondés se déclarent satisfaits de leur poste actuel… soit le taux le plus bas enregistré parmi les fonctions finances ! A titre de comparaison, 65 % des contrôleurs de gestion, 73 % des auditeurs financiers et 80 % des trésoriers ont exprimé cette année un avis positif dans ce domaine. Différents facteurs de frustrations expliquent le taux de satisfaction relativement mitigé des directeurs financiers. Parmi les éléments qu’ils souhaiteraient voir s’améliorer dans leur quotidien, 46 % des sondés indiquent en priorité l’équilibre entre leur vie privée et leur vie professionnelle. «Les directeurs financiers travaillent le plus souvent durant des plages horaires étendues, et parfois même les week-ends, confirme Mikaël Deiller. Il n’est pas inhabituel, par exemple, qu’ils participent tôt le matin ou tard le soir à des conférences téléphoniques avec des partenaires bancaires ou des investisseurs basés à l’international (en raison du décalage horaire), ou qu’ils soient appelés à se déplacer à l’étranger durant plusieurs jours.»Un rythme de travail de nature à limiter le temps disponible des directeurs financiers pour leurs activités personnelles et pour leurs proches, ce qui peut peser sur leur moral. Pour autant, seulement 31 % des répondants estiment qu’ils disposent d’une charge de travail trop élevée… «Ce décalage résulte notamment du fait que les directeurs financiers consacrent une part importante de leur temps de travail à des réunions et à des rencontres, en interne comme en externe, explique Mikaël Deiller. Or si ces tâches sont bel et bien chronophages, elles ne sont toutefois généralement pas considérées par les répondants comme représentant une charge de travail trop significative.»

Autre motif d’insatisfaction, 36 % des profils interrogés souhaiteraient bénéficier d’une meilleure reconnaissance de leur travail. «Les réalisations quotidiennes des directeurs financiers sont de manière générale moins “visibles” que celles d’autres équipes plus opérationnelles, ce qui limite souvent l’attention que leur porte la direction générale, et peut générer des frustrations, reconnaît Mikaël Deiller. Par exemple, un responsable financier sera rarement félicité pour avoir clôturé des comptes sans erreur, alors que ce sera plus le cas pour une direction commerciale lorsqu’elle signe un important contrat.» En outre, les directeurs financiers n’ont pas toujours une bonne image auprès des salariés de l’entreprise. «A l’instar des contrôleurs de gestion, les directeurs financiers doivent davantage expliquer leurs missions afin qu’elles soient mieux comprises et acceptées par les équipes opérationnelles, indique Pierre-Yves Bing. Ces dernières peuvent par exemple considérer la mise en place d’un processus de suivi budgétaire plus rigoureux au sein de leur service uniquement comme une contrainte, sans percevoir l’intérêt d’une telle démarche.»

Des perspectives encourageantes

Mais en dépit de ces préoccupations, la majorité des professionnels réaffirment leur désir de poursuivre leur carrière dans leur domaine de prédilection : 64 % d’entre eux ont pour ambition de postuler à un nouveau poste de directeur financier à l’avenir, tandis que 19 % visent la fonction de directeur général. «Bénéficiant d’un rôle de plus en plus stratégique au sein des sociétés, la plupart des directeurs financiers préfèrent obtenir des responsabilités étendues au sein de leur domaine d’expertise plutôt que de se diriger des fonctions plus transversales», souligne Mikaël Deiller. Pour répondre à ces aspirations, les sondés peuvent actuellement compter sur un marché de l’emploi un peu moins tendu qu’il y a quelques années. Au cours des douze derniers mois, 69 % se sont vu proposer un nouveau poste. Plus précisément, 10 % ont reçu une offre d’emploi, 48 % entre deux et quatre propositions, et 11 % ont été sollicités au moins cinq fois. En outre, les opportunités présentées ont été plus nombreuses que l’an dernier pour 26 % des répondants, stables en volume pour 26 % d’entre eux, et en baisse pour seulement 17 %. «S’il est trop tôt pour parler de forte reprise des recrutements, nous avons indéniablement constaté une hausse des demandes des entreprises pour ces profils au cours des derniers mois», souligne Mikaël Deiller. Un début de tendance qui pourrait se confirmer en 2017, selon les professionnels.

A la recherche de contrôleurs de gestion et de comptables

Dans le but à la fois d’acquérir de nouvelles compétences et de remplacer des départs, les directeurs financiers ont continué à procéder à des recrutements au cours des douze derniers mois. A ce titre, 53 % des embauches ont concerné des fonctions comptables, contre 43 % en 2015, et 28 % des contrôleurs de gestion (contre 30 %) (voir graphique). «Ces deux fonctions connaissent actuellement de profondes transformations, notamment liées à la montée en puissance des nouveaux outils numériques, ce qui incite de nombreux directeurs financiers à rechercher des profils disposant de compétences dans ce domaine», indique Charles Bonati, analyste édition et études à la DFCG.

Cette situation s’explique en outre par la plus grande difficulté des directeurs financiers à fidéliser ce type de collaborateurs : 9 % des sondés disent avoir du mal à conserver des comptables à long terme et 5 % des contrôleurs de gestion, alors qu’ils ne sont que 3 % à exprimer un avis similaire en ce qui concerne les auditeurs internes, les consolideurs et les trésoriers.

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