Marché

L’univers des ETF suscite une concurrence croissante

Publié le 27 avril 2018 à 16h52    Mis à jour le 27 juillet 2021 à 10h51

Pierre Gelis

L’offre d’ETF continue de se densifier, à la fois par le développement des gammes des fournisseurs historiques mais aussi grâce à l’arrivée de gestionnaires actifs sur ce marché porteur. En outre, cette densification de la concurrence apporte une nouvelle validation à la structure ETF en tant qu’outil d’investissement efficace pour tout type d’investisseur mais aussi pour les gérants actifs.

Les ETF continuent de séduire les investisseurs. En 2017, leur encours a progressé de 34 % à 595 milliards de dollars, tandis qu’en Europe, bien que la demande ait quelque peu ralenti en fin d’année, elle augmente globalement de 23 milliards d’euros, ce qui porte l’encours total à un nouveau sommet de 93,9 milliards d’euros. Pour autant, l’année passée constitue une nouvelle étape dans l’évolution de l’activité des ETF. Tout d’abord, bien que la gestion passive ait attiré davantage de flux que la gestion active en 2017, l’écart entre les deux styles s’est sensiblement réduit. Ensuite, les ETF sur actions européennes ont collecté en net le double de leurs concurrents sur actions Etats-Unis. 

Après un début en fanfare, les craintes d’une forte hausse de l’inflation et des taux d’intérêt infléchissent quelque peu la demande sans la remettre en cause : «La consolidation de début février qui a accompagné la forte hausse de la volatilité n’a pas remis en cause la tendance favorable aux actifs risqués. Globalement, la demande reste forte sur les actions Europe, Etats-Unis, Asie et pays émergents», rassure Marlène Hassine-Konqui, directrice de la recherche ETF chez Lyxor ETF. «Les flux se redressent un peu sur les actifs obligataires et sont toujours soutenus sur la dette émergente et les indexées à l’inflation, précise-t-elle. En revanche, nous enregistrons des sorties sur les obligations d’entreprises sur les notations sans risque et plus encore sur le haut rendement.» 

La tendance reste tout aussi positive du côté de la concurrence. Ainsi, pour Thibaud de Cherisey, directeur du développement des ETF chez Invesco PowerShares, «depuis le début de l’année, Invesco PowerShares a collecté à mi-février 700 millions de dollars. En termes d’importance de flux, la stratégie bêta tient toujours le haut du pavé, mais quand on regarde la diversité des ETF, il y a beaucoup de produits très spécifiques qui reviennent : en dehors du Goldman Sachs Equity Factor Europe qui est un smart beta d’actions européennes qui tend à rechercher les valeurs value de façon intelligente, il y a le Nasdaq Biotech, le Russell 2000 et les matières premières. Parmi les ETF obligataires, ce sont les Pimco US Short-Term HY Corporate Bond et Pimco EM Advantage qui ont suscité le plus d’intérêt». «Très clairement, il y a des fonds de smart beta que les investisseurs ne comparent pas avec des fonds passifs, mais ils les mettent en concurrence avec des fonds activement gérés et regardent lesquels conviennent le mieux à leurs contraintes. Donc le succès du smart beta ne résulte pas simplement d’une division ou d’un affaiblissement de la poche passive, cela vient aussi de la poche active», poursuit Thibaud de Cherisey.

La frontière entre gestion passive et gestion active s’estompe

Comme on le voit, la demande réagit positivement à une offre de plus en plus ciblée et d’expositions à des univers où la flexibilité n’est pas absente, au point d’estomper la frontière entre gestion passive et gestion active. «Nous pensons que le débat gestion active contre gestion passive a de moins en moins de sens pour les investisseurs. Ils regardent le couple rendement risque et la qualité des produits que nous pouvons leur apporter. Ensuite, que ces produits soient gérés selon une méthode passive ou selon une méthode active, l’important tient à leur capacité à délivrer dans le temps et les risques auxquels ils exposent leur acheteur», estime Thibaud de Cherisey.

D’ailleurs, outre Invesco, les gestionnaires actifs investissent de plus en plus l’univers des ETF : tel est le cas notamment de Candriam, Templeton, Fidelity et plus récemment JP Morgan Asset Management. «Pour le moment, trois segments de marché nous intéressent : les gérants de convictions sélectionneurs de titres, les gérants de fonds de fonds car les ETF sont des blocs qui leur permettent de construire une allocation d’actifs et les investisseurs institutionnels. Dans ce troisième axe de développement, j’inclus les entreprises et les compagnies d’assurance tant pour leur actif général que pour les unités de compte», précise Olivier Paquier, responsable de la distribution ETF pour l’Europe continentale chez JP Morgan AM.

Compte tenu de l’encombrement du marché, la nouvelle vague d’offre se veut plus spécialisée destinée à une cible bien identifiée. Ainsi, les ETF de Candriam combinent des critères de l’investissement socialement responsable et l’intégration à plus grande échelle de l’investissement factoriel. De même, confirme Olivier Paquier : «Nous ne voulons pas proposer une gamme de produits identiques à ceux qui existent déjà. Au contraire, nous construisons une offre assez innovante, qui propose des expositions alternatives, actives, de smart beta. Notre gamme naissante se positionne sur ce qui n’est pas couvert aujourd’hui par la concurrence.»

D’ailleurs, JP Morgan AM annonçait en février le lancement de trois nouveaux ETF obligataires (USD Ultra Short Income Ucits ETF ; USD Emerging Markets Sovereign Bon ETF et BetaBuilders Eur Govt Bond 1-3yr Ucits ETF). La consolidation des marchés entamée début février ne refroidit pas les ardeurs. Bien au contraire. «Les ETF fonctionnent particulièrement bien dans ces phases de marché heurté. Ainsi, nos deux premiers ETF dont l’un est un fonds de manage futures et l’autre un long short equity, les spreads observés sur plusieurs semaines ont été de 9 points de base, soit 4,5 points à l’achat et 4,5 points à la vente. Ainsi nos clients peuvent s’intéresser à des stratégies long short au format ETF avec un coût d’accès à la liquidité de 4,5 points», assure Olivier Gentier.

Le marché des particuliers reste à conquérir

Contrairement aux Etats-Unis où les particuliers ont été séduits par les ETF dès leur lancement, les investisseurs européens et notamment français tardent à adopter ces supports. Outre le besoin de plus de pédagogie, le développement auprès de cette clientèle potentielle passe semble-t-il par des services d’allocation. «Nous essayons de démocratiser l’univers de l’épargne en développant une offre de solutions clés en main à base d’ETF avec un objectif de performance stable et récurrente dans le temps, à l’instar de ce que nous proposons à la clientèle institutionnelle», explique Jérémy Tubiana, responsable vente distribution France chez Lyxor ETF. En 2017, le fournisseur d’ETF a noué un partenariat avec Primonial qui lui a confié la gestion de quatre profils de risque. «Les profils se distinguent par une gestion sous contrainte de volatilité qui est de 4,5 % pour le profil prudent, de 7,5 % pour l’équilibré et de 11 % pour le dynamique. Pour optimiser la performance tout en respectant le profil de risque, nous disposons d’un univers d’une trentaine d’ETF actions, obligations, monétaires et matières premières dont l’assemblage est activement géré.» Un des principaux avantages de cette solution tient à son adaptabilité à l’environnement de marché. Ainsi, en 2017, lorsque la volatilité des actions évoluait à des niveaux historiquement faibles, le profil prudent était exposé aux risques actions à hauteur de 50 %, alors que dans la plupart des fonds profilés elle n’aurait pas dépassé 20 %. Quant au profil offensif, il a vocation à être entièrement investi en ETF actions, les obligations et matières premières ne rentrent donc pas dans son univers. En revanche, le gérant peut répartir le portefeuille sur une cinquantaine d’ETF et en cas de tendance baissière sur les marchés, il dispose de deux fonds monétaires en refuge. 

Une offensive prometteuse dans le retail

Contrairement aux Américains, les Français peinent à adopter les ETF comme support d’investissement malgré leurs avantages en termes d’outils de diversification et d’accessibilité. Dans un contexte de baisse du rendement des fonds en euros, Primonial a lancé fin janvier 2017 sur sa plateforme Link by Primonial le contrat d’assurance Link Vie composé d’unités de compte presque exclusivement investis en ETF. L’initiative vise à démocratiser l’accès aux ETF tout en élargissant la cible de clientèle de ses partenaires distributeurs. Ce contrat accessible dès un premier versement de 1 000 euros comporte, outre l’incontournable part sécuritaire en euros, quatre unités de compte à profils de risque différenciés gérés par Lyxor ETF. Les performances obtenues sur la première année d’existence des quatre solutions d’investissement en ETF sont plus qu’encourageantes. A fin janvier 2018, celles-ci s’étagent de 7,67 % pour le profil modéré, à 11,08 % pour l’équilibré, 14,32 % pour le dynamique et 11,82 % pour l’offensif. 

Simultanément, le support sécuritaire euros a servi un taux de 1,45 %. Pour l’instant, Primonial ne dévoile pas de détails sur les encours recueillis par les différentes unités de compte mais anticipe une accélération du nombre de souscriptions après une première phase de découverte de cette solution de placement. L’offre, assez novatrice, nécessite effectivement un temps d’adaptation tant du côté des conseillers financiers appelés à parrainer l’investisseur que de l’épargnant qui doit s’impliquer un minimum pour sélectionner la solution qui lui conviendra le mieux.

Lyxor ETF joue davantage sur du velours en déclinant une solution largement éprouvée car précédemment développée pour ses clients investisseurs institutionnels. Il s’agit d’une offre peu chargée : 0,31 % de frais de gestion en moyenne pour la cinquantaine d’ETF de Lyxor, auquel s’ajoutent 0,6 % de frais de gestion du contrat d’assurance vie et 0,7 % au titre du frais de mandat de l’intermédiaire qui, par ailleurs, ne bénéficie pas de rétrocessions.

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