La lettre de l'immobilier

Décembre 2014

Régime de TVA applicable aux droits réels immobiliers démembrés : les complexités de la nue-propriété

Publié le 28 novembre 2014 à 15h08

Par Philippe Tournès, avocat associé

Le régime des droits réels immobiliers a été profondément remanié par la loi de réforme de la TVA immobilière du 9 mars 2010 qui, au plan de la TVA, les a fait passer du régime des prestations de services à celui de l’immeuble auquel ils se rattachent. Cette assimilation peut conduire à un régime complexe, notamment au niveau du nu-propriétaire.

Par Philippe Tournès, avocat associé, spécialisé dans les questions de TVA notamment liées à l’immobilier.

L’article 257 du Code général des impôts (CGI) assimile les droits réels immobiliers (à l’exception des locations résultant de baux qui confèrent un droit de jouissance) à des biens corporels, qui suivent le régime du bien immeuble auquel ils se rapportent. Cette disposition vise donc les droits réels démembrés (nue-propriété, usufruit, etc.), le droit de construire attaché à un terrain (droit de surélévation, servitude, etc.), ou même un droit réel conférant simplement le bénéfice d’une jouissance spéciale du bien, distinct du droit d’usage et d’habitation. Il résulte donc de l’article 257 que la constitution ou la cession de ces droits réels suit le régime de l’immeuble auxquels ils se rattachent : TVA applicable de plein droit s’il s’agit d’un immeuble achevé depuis moins de cinq ans, exonération avec possibilité d’option si l’immeuble est achevé depuis plus de cinq ans.

La cession, par un promoteur à des investisseurs, de l’usufruit ou de la nue-propriété d’un immeuble neuf est assimilée à la cession de l’immeuble auxquels ils se rapportent.

La cession portant sur un immeuble achevé depuis moins de cinq ans est donc de plein droit passible de la TVA sur le prix total de vente. De plus l’acquéreur est redevable de la taxe de publicité foncière de 0,715 %.

L’usufruitier peut récupérer la TVA qui grève son acquisition dans les conditions de droit commun, c’est-à-dire s’il utilise l’immeuble pour réaliser des opérations soumises à TVA (location assujettie à la TVA…).

En revanche, la personne qui acquiert la nue-propriété de l’immeuble ne peut, elle-même, récupérer la TVA y afférente, faute, selon l’administration fiscale, d’utiliser la nue-propriété pour la réalisation d’opérations économiques soumises à la TVA.

Toutefois, l’administration fiscale admet que le nu-propriétaire peut transmettre cette taxe, au moyen d’une attestation, à l’usufruitier pour que ce dernier la récupère, à la condition que l’immeuble soit immobilisé tant au niveau de l’usufruitier que du nu-propriétaire, et que les parties se situent dans des conditions analogues à celles de l’article 207-III-3 de l’annexe II au CGI.

La référence à cette disposition pose problème, puisqu’elle suppose que, non seulement l’usufruitier utilise l’immeuble pour la réalisation d’une activité économique, mais également le nu-propriétaire, ce qui écarte la possibilité de transfert lorsque le nu-propriétaire est un non-assujetti.

Cette précision est également difficilement conciliable avec l’affirmation précédente de l’administration fiscale selon laquelle le nu-propriétaire n’affecte pas son droit réel à une activité économique. Les hypothèses dans lesquelles la TVA est transférable par le nu-propriétaire à l’usufruitier devraient donc être clarifiées par l’administration fiscale, afin d’éliminer toute source d’incertitude.

Par ailleurs, les parties devront régler contractuellement les modalités selon lesquelles l’usufruitier reversera au nu-propriétaire la TVA récupérée pour son compte, ainsi que les modalités de reversement de la TVA par le nu-propriétaire à l’usufruitier dans l’hypothèse où des régularisations seraient exigibles.

Enfin, que se passe-t-il en cas de revente de la nue-propriété dans le délai de cinq ans de l’achèvement de l’immeuble ? En d’autres termes, le nu-propriétaire peut-il revendre la nue-propriété dans le cadre d’une activité économique ? La réponse est assurément négative s’il s’agit d’un particulier. Mais la réponse n’est pas non plus assurée si le nu-propriétaire est par ailleurs un assujetti, puisque nous avons vu que l’administration fiscale considère qu’il n’agit pas en tant que tel en investissant dans la nue-propriété d’un immeuble…


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