La lettre de l'immobilier

Septembre 2017

Les enjeux de propriété intellectuelle lors de la participation à un Building Information Model

Publié le 15 septembre 2017 à 11h02    Mis à jour le 15 septembre 2017 à 16h56

Aline Divo et Maxime Hanriot

Le Building Information Model (BIM) ou «maquette numérique» est une méthode de travail collaborative permettant aux différents intervenants à un projet de construction de partager l’ensemble des informations liées à l’ouvrage, de la conception à l’exploitation1 de celui-ci.

Par Aline Divo, avocat associé en droit immobilier. Elle intervient dans tous les domaines du droit immobilier et notamment dans la rédaction, la négociation et le contentieux des baux commerciaux, tant côté locataire que côté bailleur. Elle est coauteur des Mémentos Experts Francis Lefebvre Baux commerciaux et Gestion Immobilière. aline.divo@cms-bfl.com et Maxime Hanriot, avocat en droit de la propriété intellectuelle et des nouvelles technologies. Il intervient tant en conseil qu’en contentieux, notamment en matière de droit d’auteur, droits de l’informatique et d’Internet et droit des données personnelles. maxime.hanriot@cms-bfl.com

Cette maquette numérique contient à la fois une base de données techniques ainsi qu’une représentation graphique en 3D de l’ouvrage.

La multiplicité des acteurs et le partage collaboratif d’informations engendrent des problématiques liées à la titularité et à la protection des droits de propriété intellectuelle sur les éléments développés ou échangés dans le cadre d’un BIM.

Droits d’auteur

L’article L. 111-1 du Code de la propriété intellectuelle (CPI) peut accorder une protection à tout œuvre de l’esprit originale développée ou utilisée dans le cadre d’un projet BIM2. L’auteur de l’œuvre se voit ainsi investi, entre autres, des droits patrimoniaux relatifs à celle-ci, notamment le droit de la représenter et de la reproduire.

La multiplicité des participants ainsi que le travail collaboratif sont susceptibles d’entraîner une titularité partagée des œuvres développées dans le cadre d’un projet BIM. En effet, lorsque plusieurs personnes concourent à la création d’une œuvre, l’étendue de leurs droits dépendra de la qualification juridique de l’œuvre telle que définie par le CPI3 et la jurisprudence.

Si l’œuvre développée est qualifiée d’œuvre de collaboration, œuvre dans laquelle plusieurs personnes ont contribué, que leur apport soit individualisé ou non, les droits d’auteur qui y sont attachés appartiennent à chaque auteur ayant fait un apport original.

Autre qualification envisageable, celle d’œuvre composite qui correspond à une œuvre à «laquelle est incorporée une œuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière». L’auteur de l’œuvre initiale reste titulaire de ses propres droits mais l’auteur qui a réalisé le nouvel apport original est titulaire des droits d’auteur relatifs à l’ensemble de l’œuvre composite nouvellement créée. Dans le cadre du BIM, les participants soumettant leurs contributions à différents stades du processus, la dernière personne réalisant un apport original est susceptible de se voir conférer la titularité des droits de propriété intellectuelle sur l’œuvre finale.

Si l’œuvre est qualifiée d’œuvre collective, c’est-à-dire une œuvre créée à l’initiative et sous la direction d’une personne physique ou morale et dans laquelle les contributions individuelles de chaque auteur ne peuvent être identifiées, le titulaire des droits d’auteur sera la personne physique ou morale ayant pris l’initiative et la direction de la création de l’œuvre.

Protection sui generis des bases de données

Une base de données peut également bénéficier de la protection du droit d’auteur lorsqu’elle se distingue par l’originalité de sa sélection ou de sa disposition.

A défaut, celle-ci pourra toutefois prétendre à la protection sui generis des bases de données prévue par l’article L. 341-1 du CPI. Le producteur de la base de données, celui qui «prend l’initiative et le risque des investissements correspondants», peut ainsi bénéficier d’une protection sur le contenu de cette base à la condition que des investissements substantiels aient été réalisés pour la constituer.

L’encadrement contractuel de la participation à un BIM

La protection des droits de propriété intellectuelle sur une œuvre développée ou utilisée dans le cadre d’un BIM peut donc être affectée selon l’implication et les différents apports réalisés par les participants.

Il convient dès lors d’être particulièrement vigilant lors du recours à un BIM, notamment pour les éléments ne pouvant bénéficier à l’origine d’une protection légale (méthodes, procédés, savoir-faire du participant), en contractualisant les conditions d’utilisation et de réutilisation des éléments communiqués aux parties ainsi que le sort des éléments qui seront nouvellement créés.

1. Le recours à ce procédé est en pleine expansion au sein de l’Union européenne. En France, par un décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 transposant la directive européenne 2014/24/EU sur la passation des marchés publics, les acheteurs publics peuvent désormais imposer l’utilisation d’un BIM pour le marché concerné.

2. Plans, études, dessins, modèles, photographies, modélisations 3D, etc.

3. Art. L. 113-2 du Code de la propriété intellectuelle.

Retrouvez tous les trimestres la Lettre de l'Immobilier avec notre partenaire, CMS Francis Lefebvre.
CMS Francis Lefebvre est l’un des principaux cabinets d’avocats d’affaires français, dont l'enracinement local, le positionnement unique et l'expertise reconnue lui permettent de fournir des solutions innovantes et à haute valeur ajoutée en droit fiscal, en droit des sociétés et en droit du travail. 

 

Au sommaire de la lettre


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