La lettre des fusions-acquisition et du private equity

Mars 2019

Droits de vote et seuils fiscaux : gardez le contrôle !

Publié le 22 mars 2019 à 16h17

Laurent Hepp et Vincent Forestier

L’application des régimes fiscaux de faveur qui assurent l’efficacité fiscale de l’acquisition ou de la détention d’une participation est conditionnée par l’atteinte de seuils variables – et pas toujours cohérents – de droits de vote. Morceaux choisis.

Par Laurent Hepp, avocat associé en fiscalité. Il intervient tant en matière de fiscalité des entreprises et groupes de sociétés qu’en fiscalité des transactions et private equity.

laurent.hepp@cms-fl.com et Vincent Forestier, avocat en fiscalité. Il conseille au quotidien des sociétés dans le cadre de leurs problématiques en fiscalité directe ainsi que dans leurs opérations d’acquisitions, de capital-transmission et de restructuration. vincent.forestier@cms-fl.com

Intégration fiscale et contrôle absolu

Dans le cadre d’une acquisition par endettement de type Leverage Buy-Out (LBO), l’accès au régime de l’intégration fiscale est la composante essentielle de «l’effet de levier fiscal» consistant à imputer sur le résultat bénéficiaire de la société cible opérationnelle le déficit fiscal structurel de la holding de reprise, généré par les frais de transaction et les charges financières encourues à raison de la dette d’acquisition.

Depuis le 1er janvier 2019, ce régime est d’autant plus déterminant que le «dispositif ATAD» introduit par la loi de finances pour 2019 conduit à plafonner la déduction fiscale des «charges financières nettes» au plus élevé des deux montants suivants : 3 millions d’euros ou 30 % d’un «EBITDA fiscal». L’appartenance à un groupe intégré autorise une holding de reprise endettée, dont l’EBITDA fiscal est par hypothèse faible ou négatif, à élargir le champ d’appréciation de celui-ci à l’ensemble du périmètre d’intégration fiscale, incluant donc l’EBITDA des filiales opérationnelles.

Or, l’intégration fiscale française exige un seuil de détention direct ou indirect de 95 % du capital des filiales, cette détention étant définie comme la pleine propriété d’au moins 95 % des droits à dividendes comme des droits de vote.

Ce seuil particulièrement élevé (en Allemagne, il est seulement de 50 % des droits de vote + 1 voix) est de nature à écarter du dispositif les groupes dans lesquels un tel niveau de participation ne peut être réuni pour des raisons contractuelles ou réglementaires1.

Taux d’intérêts déductibles et contrôle majoritaire

Le Code général des impôts limite à un taux fiscal de référence la déductibilité fiscale des intérêts afférents à une dette contractée auprès d’un associé. Toutefois, lorsque ledit associé peut être considéré comme «contrôlant»2, la filiale emprunteuse pourra se prévaloir de l’exception dite du «taux de marché»3, selon laquelle est déductible «le taux que cette entreprise emprunteuse aurait pu obtenir d’établissements ou d’organismes financiers indépendants dans des conditions analogues».

Caractérise notamment le contrôle au sens de ce texte, selon la doctrine administrative, la détention de plus de 50 % des droits de vote4.

Amendement Charasse et contrôle conjoint

L’amendement dit «Charasse» limite les bénéfices de l’intégration fiscale en prévoyant la réintégration au résultat imposable des charges financières relatives à l’acquisition par une société, auprès de personnes qui la contrôlent ou à des sociétés que ces personnes contrôlent, de titres d’une cible qui est ou devient membre du même groupe intégré.

Le Conseil d’Etat vient de confirmer l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes qui a ouvert la porte à l’application de ce dispositif dans des opérations de LBO où le cédant devient actionnaire minoritaire de la holding de reprise dans des conditions telles qu’une situation de contrôle conjoint pourrait être, selon l’Administration, caractérisée entre ce dernier et les actionnaires de la holding5. Dans une telle situation, il est ainsi fiscalement recommandé de s’assurer que les droits consentis aux associés minoritaires n’octroient pas à ces derniers un contrôle conjoint sur l’émettrice (ce qui supposerait des droits étendus allant au-delà d’une simple protection patrimoniale).

Et un régime mère-fille sans droit de vote !

Le régime mère-fille permet d’exonérer à hauteur de 95 % les dividendes reçus d’une participation lorsqu’elle représente 5 % au moins du capital de la filiale, sans qu’il soit nécessaire que cette détention ne soit assortie des droits de vote.

Ce régime ouvre par ailleurs l’accès au régime des plus-values à long terme qui exonère à concurrence de 88 % les gains sur cession de titres détenus depuis plus de deux ans. Mais pour cela, la détention d’au moins 5 % des droits de vote est requise !

1. Par exemple, lorsqu’une disposition légale exige que les associés exerçant dans la filiale détiennent un certain pourcentage de droits de vote.

2. Au sens du 12. de l’article 39 du CGI.

3. Prévue à l’article 212, I, a du CGI.

4. BOI-IS-BASE-35-20-20-10, n° 130, à jour au 15 avril 2014.

5. CE, 15 mars 2019, n° 412155, société Mi Développement 2.


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Recommandations de l’AMF relatives aux assemblées générales des sociétés non cotées

François Gilbert

Un groupe de travail de l’Autorité des marchés financiers (AMF) a élaboré en juillet 2018 un rapport comprenant sept propositions visant à renforcer la transparence et l’effectivité du vote en assemblée générale (AG). L’AMF a décidé le 5 octobre 2018 de reprendre à son compte l’ensemble de ces propositions en les intégrant à sa recommandation n° 2012-05 relative aux AG d’actionnaires.

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