La lettre des fusions-acquisition et du private equity

Janvier 2014

Le contrat de cession suffit-il à limiter la responsabilité du cédant à l’égard des salariés ?

Publié le 12 mai 2014 à 15h55    Mis à jour le 13 mai 2014 à 10h37

Alain Herrmann et Julia Zein

A la théorie du coemploi, qui permet aux salariés faisant partie d’une entreprise cédée ou d’une filiale qui dépose le bilan d’obtenir le paiement de dommages et intérêts ou de mesures du plan de sauvegarde de l’emploi de la société cédante ou de la société mère, est venue s’ajouter une nouvelle cause de responsabilité de l’ancien employeur fondée sur les principes de la responsabilité civile.

Par Alain Herrmann, avocat associé spécialiste en droit social. Il intervient en matière sociale sur les opérations de private equity et de fusion-acquisition, tant pour le conseil que pour le contentieux et Julia Zein, avocat spécialisé en droit social.

Des fautes de gestion peuvent ainsi être reprochées au cédant sur le fondement de l’article 1382 du Code civil. Ainsi, la Cour de cassation a admis que des salariés d’une société cédée à un acquéreur qui deux ans plus tard a été placée en liquidation judiciaire, puissent agir contre l’ancienne société holding au motif que les fautes de gestion commises avant la cession avaient conduit à la perte de leur emploi (Cass. Soc. 14 novembre 2007, n° 05-21239). La cour d’appel de renvoi a cependant débouté les salariés, considérant que le lien de causalité entre les fautes de la société holding et le préjudice de la perte d’emploi des salariés n’était pas caractérisé en l’espèce (CA Poitiers, 10 septembre 2013, n° 08-01707). Malgré le dénouement heureux pour l’ancienne société mère dans ce dossier, il est à craindre que, si la liquidation intervient plus rapidement après la cession et s’il existe des fautes de gestion, la responsabilité du cédant soit engagée.

D’ailleurs, la cour d’appel de Paris a approuvé la demande de salariés de solliciter en référé une expertise visant à déterminer la responsabilité du cédant dans leur licenciement survenu un an après la cession dans le cadre d’une procédure de redressement judiciaire dès lors qu’il «ne pouvait ignorer le caractère incertain du projet de cession et les faiblesses du business plan» (CA Paris, 4 septembre 2012, n° 11-12359). Bien qu’il ne s’agisse pas d’un arrêt condamnant l’employeur pour insuffisance de vérification, il illustre la tendance à essayer d’engager la responsabilité du cédant. Il apparaît ainsi nécessaire de sécuriser les opérations de cession au regard des risques qui existent pour le cédant. La responsabilité du cédant étant engagée lorsque l’emploi des salariés cédés ou transférés est menacé, la première solution envisageable consiste à imposer à l’acquéreur une période dite de garantie d’emploi durant laquelle il s’interdit de licencier le personnel de la société transférée.

Cette garantie peut être accompagnée d’une garantie financière en cas de non-respect, mais elle trouverait sa limite en cas de procédure de redressement ou de liquidation de la société cédée. La seconde option envisageable consiste à fournir à l’entreprise cédée, via un contrat de prestation de services, la garantie d’une charge de travail suffisante pour une période donnée, lui permettant d’assurer la poursuite de son activité. Toutefois, le maintien de relations étroites avec l’activité cédée pourrait, à l’inverse de l’effet recherché, être avancé par le personnel transféré pour obtenir la mise en application de la responsabilité du cédant sur la base de la théorie du coemploi.

Il ressort de ce qui précède que les seules stipulations contractuelles sont malheureusement insuffisantes pour protéger efficacement le cédant, qui devra préalablement à la cession mettre en œuvre en particulier les actions suivantes :

– s’assurer que l’activité cédée est viable,

– s’assurer de la solvabilité du repreneur,

– vérifier si la stratégie du repreneur postérieure à la cession est réaliste,

– objectiver l’analyse de la situation et des projets du repreneur par recours à des analyses extérieures.


La lettre des fusions-acquisition et du private equity

De l’importance des conventions de sortie d’intégration fiscale

Laurent Hepp et Jean-Charles Benois

Au-delà des habituelles questions fiscales soulevées par une opération d’acquisition (structuration, déclarations et garantie, droits d’enregistrement, etc.), la sortie d’une filiale d’un groupe fiscalement intégré ou la cessation d’un groupe fiscal par le seul effet de la cession des titres soulève des problématiques délicates, et qui peuvent s’avérer coûteuses lorsqu’elles ne sont pas anticipées. Il est alors recommandé de conclure une convention de sortie d’intégration fiscale (la «Convention») entre la société mère intégrante, la filiale sortante, voire l’acquéreur en tant que garant.

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