La lettre gestion des groupes internationaux

Septembre 2017

BEPS/OCDE et prix de transfert : le temps de la mise en œuvre

Publié le 22 septembre 2017 à 16h03

Eric Bonneaud, PwC Société Société d’Avocats

Si le mois de juillet est traditionnellement le point de départ de la période estivale, pour tout praticien des prix de transfert, il est souvent attendu comme une période de rentrée «littéraire». En effet, l’OCDE met à jour de manière régulière à cette période son «petit» livre bleu qui consacre les Principes directeurs applicables aux prix de transfert à l’intention des entreprises multinationales et des administrations fiscales. La dernière refonte de ces Principes datait de juillet 2010.

Par Eric Bonneaud, avocat, associé, spécialisé en prix de transfert, PwC Société d’Avocats

Cette édition de juillet 2017 vient s’inscrire dans un contexte bien particulier puisqu’elle marque le début de l’intégration d’un ensemble de travaux entrepris depuis plus de trois ans par les Etats et l’OCDE, consacrés dans les 15 actions BEPS dont la majorité des rapports sont devenus définitifs.

Ainsi, la «norme» prix de transfert vient digérer les travaux effectués et soutenus par les Etats, et les ériger en «soft law», incitant ainsi les multinationales et les administrations fiscales à les inscrire largement dans leur conduite.

Que contient donc de nouveau cet opus des Principes mis à jour ?

Différents aspects viennent à être modifiés suite à leur approbation par le Comité des affaires fiscales de l’OCDE.

Rappelons que ces Principes de l’OCDE applicables en matière de prix de transfert contiennent des lignes directrices sur l’application du principe de pleine concurrence, représentant «le consensus international pour la valorisation, aux fins de l’impôt sur les bénéfices des sociétés, des transactions internationales entre entreprises associées».

Compte tenu de la place des entreprises multinationales dans l’économie mondiale, les prix de transfert sont un sujet majeur pour les administrations fiscales et les entreprises. Les Etats doivent s’assurer que les bénéfices imposables ne sont pas transférés de manière non fondée hors de leur juridiction ; en d’autres termes que leurs bases d’imposition et leurs recettes fiscales sont conformes à la réalité de l’activité économique qui y est exercée. Du côté des opérateurs, il y a une nécessité d’avoir des normes explicatives sur l’application du principe de pleine concurrence.

Cette édition 2017 des Principes applicables en matière de prix de transfert vient donc intégrer l’ensemble des modifications pertinentes résultant du projet BEPS de l’OCDE amendant la version précédente publiée en 2010.

Ainsi, les révisions induites par les rapports de 2015 du BEPS relatifs aux Actions 8-10 «Aligner les prix de transfert calculés sur la création de valeur» et à l’Action 13 «Documentation des prix de transfert et déclaration pays par pays» viennent consacrer les évolutions de l’OCDE en matière de justification documentaire des prix de transfert. L’accent mis sur la conformité des prix de transfert à la création de valeur est pleinement intégré. Par ailleurs, l’approche documentaire avec les trois niveaux que sont le masterfile du groupe, le local file des filiales et le country by country reporting (CBCR), déjà repris par le droit interne de beaucoup d’Etats, est inscrite dans ces principes directeurs.

En outre, ces modifications se traduisent aussi par un alignement du chapitre IX consacré aux réorganisations d’entreprise afin de prendre en compte les mêmes aspects des réorganisations inclus dans les Actions 8-10 et 13 du BEPS.

Enfin, les principes révisés en matière de régimes de protection sont amendés dans le cadre du chapitre IV du guide. Il est rappelé que ces régimes sont définis comme des dispositions qui s’appliquent à une catégorie bien définie de contribuables ou de transactions et qui les exemptent de certaines obligations normalement imposées par les règles générales d’un pays en matière de prix de transfert.

Ces orientations relatives aux régimes de protection ont également été révisées afin d’indiquer clairement que, s’ils sont bien conçus, ils peuvent contribuer à alléger la charge de conformité et procurer une certitude accrue aux contribuables.

Par ailleurs, un important travail de mise en cohérence nécessaire dans le reste du texte des Principes applicables en matière de prix de transfert est réalisé pour aboutir à une version consolidée du texte.

Au final, les principes intègrent la Recommandation révisée en 2016 du Conseil de l’OCDE sur la détermination des prix de transfert entre entreprises associées (C(95) 126/FINAL) qui reflète l’importance pour les Etats et les administrations de combattre les pratiques de BEPS et qui consacre la création du Cadre Inclusif. Sur ce dernier point, il est rappelé que le Cadre Inclusif est l’approche novatrice de l’OCDE qui lui a permis de proposer à des Etats non-membres de participer aux travaux BEPS sur un pied d’égalité avec les membres de l’OCDE. Cette inclusion vient renforcer la portée des Principes Directeurs hors de l’OCDE en invitant les pays non-membres à se joindre à leur application notamment s’agissant des travaux sur la création de valeur et la documentation des prix de transfert.

Ces modifications ne doivent pas occulter que des travaux vont se poursuivre au sein de l’Organisation afin de développer des principes supplémentaires sur l’application de la méthode transactionnelle du partage de bénéfices, les aspects prix de transfert des transactions financières et les services intragroupes. Par ailleurs, des procédures régulières d’examen des expériences des pays membres ou non de l’OCDE, préalablement sélectionnés, en matière d’application du principe de plaine concurrence, ont vocation à se mettre en place afin de cerner les domaines qui mériteraient des travaux complémentaires.

Si la plupart de ces modifications peuvent apparaître comme extrêmement techniques, leur intégration dans les Principes Directeurs traduit la volonté de l’OCDE et de ses membres de rentrer dans la phase de mise en œuvre effective de ceux-ci en les érigeant en normes dont chacun doit s’inspirer.


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