Allocation

Faut-il investir dans les obligations convertibles ?

Publié le 25 mars 2016 à 15h36    Mis à jour le 21 juillet 2016 à 12h24

Propos recueillis par Catherine Rekik

Les obligations convertibles offrent un couple rendement/risque plus attractif que la plupart des autres classes d’actifs. Elles offrent des perspectives de performance élevées sur le long terme avec une volatilité inférieure à celle des actions. • Que peut-on attendre de la classe d’actifs en 2016, surtout après un début d’année aussi chaotique sur les marchés ? • Les OC permettent de profiter de la hausse des marchés actions, mais peut-on réellement faire ce pari en 2016 ?• Même si le sujet ne semble pas d’actualité dans la zone euro, comment se comportent les OC en période de hausse des taux ? • Comment évolue le gisement en Europe et au niveau mondial ? • Les convertibles attirent-elles de nouveaux émetteurs ? De nouveaux investisseurs ? • Quelles obligations convertibles choisir ? • Quelle place pour des fonds de convertibles dans un portefeuille ?

Le comportement de la classe d'actifs depuis le début de l'année

Renaud Martin, responsable de la gestion obligations convertibles, Mirabaud AM : Les obligations convertibles ont évidemment souffert de la correction sur les marchés actions. A fin février, les indices européens accusaient un repli de 10 %. La classe d’actifs a été pénalisée par la hausse du risque du crédit, qui est également un des moteurs de performance. Enfin, la valorisation de certaines obligations convertibles s’est dégonflée. Les trois moteurs de performance historiques de la classe d’actifs ayant été négatifs, la classe d’actifs a chuté lourdement. Les obligations convertibles ont été moins convexes qu’on pouvait l’espérer. Cependant, sur un an glissant, elles restent très résilientes. Depuis mars 2015, elles n’ont participé qu’à un tiers de la baisse des marchés actions.

Philippe Garnier, gérant, Natixis Asset Management : Sur moyenne et longue période, les obligations convertibles offrent une performance assez proche des actions avec une volatilité deux à trois plus faible. La classe d’actifs reste donc incontournable pour un allocataire d’actifs. Le début d’année fortement baissier a surpris les investisseurs qui anticipaient un mois de janvier plutôt haussier. L’effet conjugué des valorisations élevées (surtout les obligations convertibles investment grade) et du renchérissement du crédit a été pénalisant. Au 10 mars, la performance de la classe d’actifs ressort à - 5,7 % contre - 9,08 % pour les actions : les performances sont donc revenues à la normale, en offrant le parachute que l’investisseur attend sur ce type d’actifs. Par ailleurs, la volatilité, qui était très élevée en fin d’année, est revenue sur des zones très attractives. Aujourd’hui, nous considérons qu’il y a des opportunités d’achats pour les portefeuilles que nous gérons.

Hubert Lemoine, gérant, Schelcher Prince Gestion : L’attente classique qu’ont les investisseurs sur les obligations convertibles – capter deux tiers de la hausse des marchés actions et un tiers de la baisse – n’a pas été respectée en début d’année, la baisse des volatilités et de l’élargissement des crédits y étant pour beaucoup. Dans ces périodes de remise en cause du cycle macroéconomique, la performance des sous-jacents dans cet univers très cyclique est moins bonne que celle de l’Euro Stoxx 50® ou d’indices plus larges. La baisse de la volatilité n’a pas non plus permis d’avoir la convexité attendue initialement.

Emmanuel Martin, responsable de la gestion obligations convertibles, Financière de l’Echiquier : Ces dernières années, les obligations convertibles ont délivré plus qu’attendu : pratiquement 100 % de la hausse et 15 % de la baisse ! Il n’est donc pas non plus étonnant que cette performance exceptionnelle marque une pause ces trois derniers mois.

Cette baisse plus marquée sur une courte période n’est pas inquiétante. Nous avons déjà vécu cela en 2009 et en 2011, et le retard a très vite été rattrapé. Un autre élément a sans doute pesé sur la classe d’actifs : depuis quelques semaines, des émissions à répétition impactent le gisement. Beaucoup d’investisseurs, qui émettent l’hypothèse d’un flux massif d’émissions, restent assez prudents. Nous n’avons cependant pas constaté de rachats sur la classe d’actifs qui conserve une belle convexité, ce qui nous rend plutôt sereins.

Jean Fauconnier, gérant, Groupama AM : Le marché des obligations convertibles a perdu environ 5 % en début d’année, dont 3 % de baisse liée aux marchés actions, 0,5 % au crédit et 1,5 % du fait du dés-enchérissement de la classe d’actifs. Cette baisse des valorisations s’est faite de façon ordonnée et parallèle à un flux primaire finalement plus important qu’escompté. Rien à voir avec le mouvement de dislocation que la classe d’actifs avait connu en 2009. Le marché est aujourd’hui attractif pour les investisseurs avec des actions moins chères, des spreads de crédit plus rémunérateurs et une classe d’actifs techniquement moins chère. Le fait de retrouver du potentiel sur plusieurs moteurs de performance est une bonne chose dans des marchés qui restent très incertains. L’atout maître des convertibles reste sa convexité, qui permet sur longue période aux convertibles de surperformer les actions avec une volatilité plus faible.

Gildas Hita de Nercy, directeur général, Ellipsis AM : Comme l’ensemble du marché, les convertibles ont été impactées par les mouvements de baisse, néanmoins leur valorisation reste encore en moyenne très décotée. Elles sont aujourd’hui plus convexes et offrent selon nous un meilleur momentum que les actions. Les émetteurs de convertibles sont souvent des entreprises qui financent des projets de croissance. Ainsi, nous avons constaté que les anticipations de hausses de résultats par le consensus des analystes sont plus élevées au sein du gisement convertibles qu’au sein des valeurs de l’Euro Stoxx 600®.

Renaud Martin : Il y a deux raisons à cela. La classe d’actifs est perçue comme trop technique, difficile à comprendre, car il y a une partie optionnelle et une partie obligataire. Par ailleurs, en Europe, le marché pèse moins de 100 milliards d’euros. Si tous les investisseurs institutionnels y consacraient 10 à 15 % de leur allocation, le marché ne suffirait pas.

Du côté des investisseurs institutionnels, la classe d’actifs n’est pas suffisamment importante en termes de volumes et, du côté de la clientèle patrimoniale, elle reste compliquée à vendre pour les CGP.

Philippe Garnier : L’optionalité de l’obligation convertible peut être complexe à appréhender. De ce fait, les avantages liés à sa convexité ne sont pas toujours pris en compte. L’erreur est de considérer qu’il s’agit d’un actif mixte obligataire et actions. Si on observe les performances de la classe d’actifs sur la durée, on voit bien qu’ajouter 10 % d’obligations convertibles dans une allocation globale apporte plus de performance et moins de volatilité.

Gildas Hita de Nercy : La classe d’actifs ayant un comportement convexe, il est compliqué de l’introduire dans les modèles d’optimisation classiques. C’est le rôle des consultants mais ils ne sont pas toujours très à l’aise avec l’allocation quantitative en obligations convertibles. Les modèles Markovitch classiques ne permettent pas de valoriser un actif asymétrique. Cela dessert un peu la classe d’actifs, même si cela est de moins en moins vrai.

La Financière de l’Echiquier travaille beaucoup avec les CGP : constatez-vous plus d’intérêt de leur part pour la classe d’actifs ?

Emmanuel Martin : Les CGP commencent à s’y intéresser : comme tout le monde, ils ont constaté que la classe d’actifs remplissait bien son rôle de parachute à la baisse et pouvait être un complément de toutes leurs allocations. Cet intérêt s’est manifesté à partir de septembre 2014, lors du changement de régime de volatilité. Toutefois, un important travail de pédagogie reste à accomplir pour simplifier l’approche.

S’il se concrétise lentement, cet intérêt est bien là. La classe d’actifs a longtemps eu un concurrent structurel, le fonds patrimonial, qui a beaucoup surfé sur la vague de la baisse des taux. Désormais, avec des taux au plus bas, les obligations convertibles se présentent comme des placements alternatifs attractifs.

Renaud Martin : J’ajouterai également que, il y a deux ou trois ans encore, les sous-jacents de la classe d’actifs n’étaient pas très connus, car il y avait beaucoup de mid caps. Mais, depuis un an, beaucoup de «blue chips» sont venues sur ce marché avec des émissions supérieures à 500 millions d’euros. Cela permet de mieux faire connaître la classe d’actifs : des noms comme Total, LVMH ou British Airways sont plus évocateurs pour les clients privés que des noms de small caps italiennes ou espagnoles.

Quelles sont les caractéristiques de la classe d’actifs ?

Hubert Lemoine : La classe d’actifs est surtout représentée par des sociétés de taille moyenne, mais il y a de plus en plus d’émetteurs notés investment grade qui font preuve d’opportunisme.

Philippe Garnier : Le cœur du marché des obligations convertibles reste tout de même non noté et axé sur des mid caps. C’est sur ce segment que l’on trouve le plus de valeur ajoutée, notamment sur les parties crédit et actions. Ce sont des valeurs de croissance qui profitent de taux plus bas sur les convertibles par rapport au marché obligataire. En contrepartie, les investisseurs bénéficient d’un call sur les résultats. Le gisement est particulièrement riche et intéressant. Nous constatons que les sous-jacents des convertibles sur ce segment des mid caps performent souvent beaucoup mieux que les grandes valeurs. Les émissions de grandes capitalisations boursières dans des conditions peu intéressantes nous ouvrent, malgré tout, un gisement de valeurs investment grade d’une bonne visibilité et liquidité. Cela permet de diversifier l’univers d’investissement.

Hubert Lemoine : Une émission d’obligations convertibles est un bon événement pour une société de taille moyenne, car cela signifie une situation soit de refinancement soit d’investissement. Les récentes émissions n’ont pas le même sens. Il s’agit plutôt d’un arbitrage de marché entre obligations classiques et obligations convertibles.

Renaud Martin : Pour une société comme LVMH, les conditions de financement sur le marché des obligations convertibles sont, en effet, plus favorables que sur le marché des obligations investment grade, avec un taux final plus bas. Cela tire les valorisations vers le haut.

Jean Fauconnier : Le gisement européen me paraît aujourd’hui plus équilibré : on a toujours une grosse part de mid caps, mais c’est vrai que la tendance ces derniers mois a été au retour des «jumbo emissions» et des large caps, parfois sur un nouveau format de type non dilutif. Les caractéristiques de ces titres sont techniquement moins attractives, avec un dividende peu protégé et l’absence de clause de ratchet qui protège le porteur en cas de prise de contrôle de la société. Néanmoins, ces émissions assez opportunistes permettent d’enrichir le gisement.

Philippe Garnier : Le marché demeure une niche. Cependant, depuis l’an dernier, des émissions majeures comme l’échangeable America Moviles en KPN pour 3 milliards d’euros ou Telecom Italia (2 milliards d’euros), sursouscrites, ont eu un impact très favorable sur l’ensemble des acteurs. L’image de la classe d’actifs auprès des banquiers et des émetteurs a changé de statut. Ces derniers savent qu’ils peuvent placer des émissions de taille importante.

Emmanuel Martin : Le marché se répartit pratiquement à parts égales entre des grandes valeurs notées investment grade et des sociétés de taille moyenne. Pour les mid caps, c’est statistiquement un bon point d’entrée, parce que cela correspond à un changement structurel. Sur les grandes capitalisations boursières, les raisons sont variables et le timing est plus compliqué à déterminer. Certaines émissions sorties de façon opportuniste et plutôt chères sont devenues attractives au bout de quelques semaines car il a fallu écouler le papier, ce qui a pesé sur le marché secondaire. Ces émissions de belle qualité sont donc une bonne nouvelle.

Historiquement, il y a toujours eu des hypertrophies sectorielles, dans l’immobilier ou les télécoms, par exemple. Aujourd’hui, le marché offre une belle granularité, tous les secteurs sont représentés. Cette diversification sectorielle est positive pour la classe d’actifs. Autre évolution notable : les Etats-Unis sont peu actifs, les émissions étant essentiellement européennes ou japonaises.

Philippe Garnier : En Europe, l’Allemagne et la France continuent de dominer le marché. Le secteur immobilier est celui qui domine le marché actuellement. Il est intéressant de voir Total et Technip émettre sur ce marché dans un contexte difficile pour le secteur oil & gas.

Renaud Martin : L’année devrait être intéressante en matière d’émissions. Sur les deux premiers mois de l’année, le volume d’émissions s’élève à 6 milliards. En moyenne, depuis trois ans, le montant des émissions est d’environ 20 milliards par an.

Jean Fauconnier : Probablement une bonne année en matière d’émissions : la tendance récente sur les large caps devrait se poursuivre et on devrait voir un certain nombre de mid caps venir se refinancer en convertibles compte tenu d’un environnement plus tendu sur le marché high yield ces dernières semaines.

Gildas Hita de Nercy : Le contexte global est très porteur pour les convertibles européennes. Les emprunts d’Etat offrent peu de perspectives de performance sur trois ans. Les actions sont très volatiles, ce qui rend les investisseurs méfiants. S’il y a aujourd’hui des émetteurs de toute taille sur la classe d’actifs, c’est bien qu’il y a une demande. Que des émetteurs de type «blue chip» interviennent sur ce marché montre bien qu’elle est de mieux en mieux comprise par les émetteurs et les banquiers. Pour les investisseurs, le marché est très diversifié. Il offre à la fois de belles histoires sur les actions «blue chip» et mid caps et des ratings de type investment grade comme high yield. Le contexte, aussi bien du côté de l’offre que de la demande, est assez sain. Nous avons connu, par le passé, un marché d’une taille de 150 milliards : le gisement est en pleine croissance et peut encore grossir !

Renaud Martin : Dans les années 2000, le gisement était effectivement de 150 milliards d’euros, mais il a pâti de la baisse continue des taux et de la concurrence du high yield, qui lui a pris des parts de marché. Si les taux remontent à des niveaux plus acceptables aux Etats-Unis et plus tard en Europe, l’attrait des obligations convertibles sera encore plus grand.

Hubert Lemoine : Une remontée des taux se traduirait par plus d’émissions sur la classe d’actifs.

Renaud Martin : Si les taux remontent, il faut se demander si cela est positif pour la classe d’actifs et pour la performance. Pour la classe d’actifs, avec des taux à 3 ou 4 %, les mid caps préféreront émettre des obligations convertibles, ce qui est positif pour le gisement.

Pour les performances, théoriquement, cela influe négativement sur la partie obligataire, mais il n’y a pas de corrélation historique entre la hausse des taux et la performance de la classe d’actifs. N’oublions pas que les obligations convertibles sont corrélées à 65 % aux actions.

Gildas Hita de Nercy : Si les taux remontent car il y a de la croissance, de la consommation et de l’inflation, c’est plutôt bon signe pour les marchés actions, puisque les résultats seront meilleurs et les dividendes en hausse. Si les taux remontent en raison du risque de taux, les effets ne seraient en effet pas les mêmes. Mais nous ne sommes pas dans ce scénario. Dans ce cas, les convertibles seraient moins affectées, du fait de leur faible duration.

Renaud Martin : Les effets pourraient être négatifs dans un contexte de forte inflation, mais ce n’est pas le cas. Aux Etats-Unis, les taux remontent dans le cadre d’une politique de normalisation. Tout dépend de la raison pour laquelle les taux montent. Quand c’est pour de bonnes raisons, les marchés actions montent, les marchés obligataires baissent, mais, pour les obligations convertibles, l’optionalité sur les actions prend le dessus. La performance reste donc positive.

Emmanuel Martin : La hausse des taux va générer davantage d’émissions, ce qui est positif pour le gisement qui, par ailleurs, ne sera pas beaucoup affecté car la sensibilité aux taux est en moyenne inférieure à trois.

Gildas Hita de Nercy : A ce moment-là, nous aurons enfin le grand mouvement de rotation des obligations vers les actions tant annoncé depuis trois ans ! L’étape intermédiaire par des produits de type obligations convertibles sera alors très recherchée par les allocataires d’actifs.

Hubert Lemoine : Dans le scénario décrit, il y a un phénomène très technique : la baisse du prix d’exercice de l’option et la hausse des marchés actions qui valorise clairement l’obligation convertible, sauf pour les structures de type obligation + warrant émises dernièrement.

En matière d’allocation d’actifs, le ratio rendement/risque reste très bon.

Renaud Martin : Les trois paramètres que sont les actions, le crédit et la valorisation de la classe d’actifs offrent effectivement un bon point d’entrée. Cependant, il y a des risques comme la hausse des taux américains qui, à court terme, peuvent secouer les marchés. Si on investit dans la classe d’actifs dans la perspective d’une hausse des marchés actions, alors oui, le timing est favorable.

Jean Fauconnier : La visibilité est faible avec des risques identifiés comme la faiblesse du prix du pétrole, la moindre croissance en Chine, un possible Brexit… Du coup, la classe d’actifs est assez modérée en matière de risques. Pour un investisseur, il est intéressant d’investir car il participera de façon croissante à la hausse des marchés actions, si tel est le cas, tout en étant protégé à la baisse. Par ailleurs, il y a une grande partie du gisement qui a retrouvé un rendement positif avec un risque actions relativement limité autour de 35 %. Les conditions techniques sont aujourd’hui meilleures qu’il y a six mois.

Philippe Garnier : Sur le plan géographique, l’Europe a sans doute une carte à jouer dans une allocation globale. Nous avons confiance dans une croissance des bénéfices certes lente, mais progressive, fiable, et dans le soutien réaffirmé de la BCE. La baisse de matières premières et des taux devrait jouer favorablement sur les comptes des sociétés européennes. L’effet conjugué d’une zone euro à bonne visibilité et d’une classe d’actifs attractive en matière de valorisation donne un bon timing d’investissement.

Gildas Hita de Nercy : C’est toujours le bon moment pour acheter des obligations convertibles ! Si on regarde de façon rationnelle le comportement des obligations convertibles sur trois, cinq, dix ou vingt ans, le produit offre toujours une bonne rémunération du risque. La question ne porte pas tant sur le timing que sur la place qu’il faut donner à la classe d’actifs. Faut-il mettre les obligations convertibles en substitut des actions et donc accepter un peu moins de sensibilité actions à court terme, mais en réduisant sensiblement le risque ? Ce raisonnement est tout le temps valable.

Autre raisonnement possible : dans la perspective d’une réduction de la poche obligataire, j’investis dans la classe d’actifs et j’augmente le risque car j’ai une vision positive sur les marchés actions. Dans les deux cas, les obligations convertibles vont bonifier le ratio rendement/risque.

Que représente la classe d’actifs dans le portefeuille d’un investisseur institutionnel ?

Philippe Garnier : Certains assureurs allouent jusqu’à 10 % à la classe d’actifs, mais c’est assez rare.

Gildas Hita de Nercy : La classe d’actifs devrait représenter 5 à 10 % mais, en réalité, l’allocation est plutôt comprise entre 3 et 5 %.

Jean Fauconnier : C’est assez binaire : soit ils n’aiment pas la classe d’actifs et ils n’en ont donc pas en portefeuille, soit ils l’apprécient et ils peuvent y allouer entre 5 et 10 %. On constate néanmoins que, dans un environnement de taux très bas, de nouveaux investisseurs tendent à investir dans les convertibles ou le high yield pour générer des rendements supplémentaires.

Renaud Martin : En France, les investisseurs institutionnels sont très exposés à l’obligataire, contrairement à d’autres marchés comme l’Angleterre où nous avons constaté ces dernières années plus d’intérêt pour les obligations convertibles alors que, historiquement, les investisseurs locaux arbitrent plutôt entre actions et obligations.

Sur une période de quinze à vingt ans, nous pouvons constater que quel que soit le cycle de trois ans que nous analysons il y a une forte probabilité d’avoir un rendement positif sur un portefeuille d’obligations convertibles. Une mauvaise année comme 2008 ou 2010 est largement compensée l’année suivante. Cette classe d’actifs devrait donc être très prisée des investisseurs institutionnels et des fonds patrimoniaux, car le couple risque/rendement est imbattable. C’est également la seule classe d’actifs qui offre une optionalité sur les actions.

L'approche de gestion à privilégier

Philippe Garnier : Nous cherchons avant tout à avoir un profil mixte, car c’est celui qui offre la meilleure convexité à l’investisseur. Dans la philosophie de gestion, nous avons une approche bottom-up. Notre sélection repose à la fois sur les fondamentaux, les aspects techniques et le timing sur l’action. S’ensuit une étape importante qui consiste à allouer le risque par rapport au potentiel de la valeur et son risque implicite (défaut, crédit…). C’est une étape importante dans un contexte où nous connaissons des défauts et des variations importantes selon les nouvelles. Il est important d’avoir une bonne sélection de titres et de les pondérer de manière adéquate.

Hubert Lemoine : Notre processus repose sur l’étude des trois grands paramètres qui font la performance d’une obligation convertible : le crédit, l’action et la valorisation de l’option. Nous étudions le potentiel de performance sur ces trois thématiques. Plus ce potentiel est élevé, plus le poids en portefeuille peut être important.

Emmanuel Martin : A La Financière de l’Echiquier, nous avons une approche bottom-up avec un biais plutôt mid caps. Nos analystes gérants scrutent les sociétés au quotidien ; nous nous appuyons sur leurs analyses de grande qualité. Nous allons nous concentrer sur la convexité pour essayer d’optimiser ces choix en amont. Nous sélectionnons également de grandes capitalisations boursières mais, lorsqu’il y a des émissions opportunistes assez chères, nous ne nous privons pas de faire des arbitrages entre obligations convertibles et options. Nous avons ainsi un portefeuille équilibré, avec 60 % de mid caps et 40 % de large caps.

Gildas Hita de Nercy : Il est important de s’assurer que nous achetons bien une obligation convertible et non pas une quasi-action ou du high yield. Nous restons concentrés sur les obligations convertibles qui offrent un profil asymétrique favorable au porteur. Notre approche privilégie également l’allocation sectorielle dans un contexte économique un peu spécial. Nous avons des paris sectoriels marqués, avec beaucoup plus d’exigence dans les secteurs sous-performants depuis trois ans. Par ailleurs, il y a un travail d’ajustement des poids de manière à mieux diversifier les risques. Dernièrement, nous avons également beaucoup renforcé l’approche crédit. Dans un contexte de faible croissance, la question de la soutenabilité du business model est cruciale. Indépendamment de la qualité comptable de la société, il est important de savoir si son business model lui permettra de survivre trois ans.

Jean Fauconnier : Notre processus de gestion a trois particularités : nous considérons le niveau de cherté de la classe d’actifs comme un vrai moteur de performance. Quand les obligations convertibles sont chères, elles deviennent parfois concaves et il est important de pouvoir alors les arbitrer contre des obligations convertibles répliquées, consistant à acheter du crédit et des options sur actions. Cela permet de retrouver un profil de portefeuille plus convexe, mais également d’élargir l’univers d’investissement tant sur le crédit que sur les actions à des sous-jacents que l’on apprécie. Nos portefeuilles tournent avec environ 80 % d’obligations convertibles et 20 % de convertibles répliquées. Second élément, les portefeuilles sont faiblement exposés à la dette convertible «distressed» afin de diminuer les risques de défaut du type Pescanova ou Banco Espirito Santo. Enfin, nous n’hésitons pas à «forcer» la convexité du portefeuille en achetant des protections afin d’améliorer le comportement des fonds dans les phases de repli.

Renaud Martin : Nous avons pris le pari d’avoir une approche pure sur les obligations convertibles pour diverses raisons, et notamment car elles offrent des clauses spécifiques en cas d’OPA sur les sous-jacents (clause de ratchet). Nous avons bien sûr constaté que la performance des obligations convertibles était avant tout liée aux actions. Nous avons donc une approche très picking et bottom-up. Nous avons des analyses à la fois quantitatives et fondamentales. Sur notre fonds global, nous avons un premier filtre quantitatif sur les sous-jacents pour en sélectionner les meilleurs. La convexité, qui est un des principaux attraits de la classe d’actifs, est un mix entre une obligation bien équilibré entre par la partie option et la partie obligataire et un bon crédit. Nous testons ensuite les portefeuilles pour nous assurer qu’ils résistent mieux que les marchés actions en cas de correction.

Emmanuel Martin : Aucun investissement ne portera exclusivement sur cette thématique. La valorisation ou la convexité sont des éléments primordiaux dans la sélection des obligations convertibles, tandis que l’OPA est la cerise sur le gâteau. Le contexte est porteur pour ces opérations. Et, toutes choses égales par ailleurs, nous privilégierons une obligation convertible qui possède ce type de protection. En effet, cela permet obtenir la quasi-totalité de la performance de l’action avec un risque mixte. Ce biais est particulièrement valable sur les mid caps.

Gildas Hita de Nercy : C’est une clause essentielle et assez structurelle du marché des obligations convertibles. Dans la classe d’actifs, il y a plus souvent des OPA que des défauts ! Ce qu’apporte l’obligation convertible aux émetteurs attire des sociétés de croissance, donc ayant un profil opéable.

Les atouts de la classe d'actifs

Hubert Lemoine : La protection des dividendes est également une spécificité intéressante de la classe d’actifs, mais elle est moins présente sur les titres investment grade.

Emmanuel Martin : Les «blue chips» ont des caractéristiques moins intéressantes que les mid caps car ces dernières offrent des clauses de rachat, des protections de dividendes, etc., pour attirer les investisseurs. Si la vue sur les marchés actions est positive, mieux vaut investir dans des mid caps.

Philippe Garnier : Les mid caps surperforment en général les grandes valeurs et, lorsqu’il y a des épisodes de forte volatilité sur une courte période, elles souffrent moins, car elles sont moins sensibles aux mouvements liés aux couvertures ou aux arbitrages sur les contrats «futures».

Jean Fauconnier : Les obligations convertibles ont souffert à une époque d’un manque de liquidité par rapport au marché du crédit. Or, nous avons constaté récemment que le marché du crédit n’était pas très liquide alors que celui des obligations convertibles n’avait pas de problème.

Renaud Martin : Les émissions des «blue chips» ont assurément contribué à améliorer la liquidité de la classe d’actifs. Il n’y a pas de problèmes pour acheter ou vendre des obligations convertibles.

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