Organisation

Les responsables de la transformation finance se spécialisent dans le digital

Publié le 9 mars 2022 à 16h00

Anne Del Pozo    Temps de lecture 7 minutes

Alors qu’aucun secteur n’aura échappé aux effets de la crise sur l’organisation du travail, les projets de transformation digitale se multiplient dans les entreprises, générant de nouvelles opportunités pour les « responsables transformation digitale de la finance ». Pourtant, les candidats restent rares, notamment en raison de la diversité des expertises nécessaires pour occuper cette fonction

Les responsables de transformation finance ont le vent en poupe, notamment au regard du développement des projets digitaux dans les entreprises. Preuve de cette tendance, leur salaire figure parmi les rémunérations en plus forte croissance pour 2022, selon l’étude 2022 de PageGroup consacrée aux rémunérations. Un tel profil expert peut en effet obtenir entre 70 000 euros et 90 000 euros l’an, après cinq années d’exercice dans la fonction. Un salaire qui peut grimper de 100 000 à 250 000 euros pour les plus expérimentés (plus de 15 ans au sein de la fonction finance). « Les responsables de la transformation finance, de plus en plus centraux au sein des organisations, voient leurs missions s’inscrire dans la durée et le champ de leur intervention s’élargir vers une dimension plus “digitale” et surtout pluridisciplinaire, explique Mikael Deiller, directeur senior chez Michael Page Finance. En effet, ils interviennent dans une démarche plus globale d’entreprise visant à améliorer les outils, les flux et les organisations afin d’atteindre une performance opérationnelle optimale ». Les cabinets de recrutement commencent ainsi à constater une évolution dans l’intitulé de certaines fiches de poste, qui passent de « responsable de la transformation finance » à « responsable de la transformation » pour englober un champ plus large d’intervention. Un poste qui peut également être confié au plus traditionnel « responsable de la transformation digitale » dans les entreprises, si tant est qu’il possède des compétences en finance. « Si la demande des entreprises pour ces profils commence à émerger, la mobilité interne semble pour le moment privilégiée, notamment parce que les candidats pour ces postes sont encore très rares sur le marché », ajoute pour sa part Emilie Duforest, manager Fed Finance à Lille. En effet, les missions à remplir dans le cadre de cette fonction sont assez larges et nécessitent des compétences aussi bien en finance qu’en pilotage de projet et une appétence pour les outils informatiques. La conjugaison de toutes ces compétences passe souvent par une expertise professionnelle dans différents métiers de la finance, en plus d’une traditionnelle formation métier. Cette expertise est d’autant plus importante que le digital occupe de plus en plus de place dans les missions qui leur sont confiées.

«Dans le secteur de la distribution, de nombreuses entreprises spécialisées accélèrent sur l’e-commerce. Cette évolution du modèle économique nécessite de repenser certains processus de gestion financière, d’achats, de transport et de vente.»

 Emilie Duforest Manager ,  Fed Finance

A nouveau périmètre opérationnel, nouvelles missions

En effet, la dimension digitale de leur mission peut s’articuler autour de la mise en place de nouvelles technologies, notamment de dématérialisation, d’intelligence artificielle ou encore de big data, en lien avec leur métier. Ils peuvent par exemple être chargés de piloter le déploiement de solutions de business intelligence, de reporting ou d’analyses qui embarquent ces technologies innovantes. « Le déploiement de SAP BI a été l’un des projets qui m’a été confié par la Semiso (société anonyme d’économie mixte de Saint-Ouen-sur-Seine qui a pour mission de répondre aux besoins d’aménagement et de logement du territoire audonien), précise ainsi Nima Zarrabi, aujourd’hui manager en transformation digitale de la fonction finance et ancien directeur de la transformation chez Semiso. Un rôle qui m’était dévolu au regard de mon expertise métier notamment en matière de contrôle de gestion et de comptabilité mais aussi de mes compétences informatiques. Au travers de cette solution, l’entreprise souhaitait ainsi renforcer ses capacités d’analyses financières. Elle entendait également que chacune des divisions concernées reçoive de manière automatique et régulière ces reportings. »

La nouvelle dimension « digitale » des responsables de la transformation finance peut également être en lien avec l’évolution du business model de l’entreprise et son adaptation au besoin du marché ou de son secteur d’activité. C’est par exemple le cas dans la distribution. « Nous assistons actuellement à la transformation du modèle économique de ce secteur, explique Emilie Duforest. Une tendance qui s’est d’ailleurs renforcée avec la pandémie et qui a poussé de nombreuses entreprises spécialisées dans la distribution à accélérer sur l’e-commerce. Cette évolution du modèle économique nécessite de repenser certains processus de gestion financière, d’achats, de transport et de vente. Il reviendra par exemple au responsable de la transformation digitale finance de mettre en place un nouveau compte d’exploitation permettant une analyse des coûts et des charges propres à une stratégie de distribution multicanale. A ce titre, une approche digitale de la finance est indispensable. »

Au regard de la dimension digitale des projets, l’expertise des candidats en matière de nouvelles technologies est indispensable. « Au-delà de leur savoir-faire sur les métiers de la finance et en particulier en comptabilité et en contrôle de gestion pour bien en comprendre les besoins, ces responsables de la transformation digitale doivent également et a minima avoir une appétence ou mieux, une expérience sur les systèmes d’information et les nouvelles technologies », poursuit Mickael Deiller.

Un financier devenant chef de projet

Pour mener à bien ces projets qui souvent mobilisent différentes équipes au sein de son organisation, le responsable de la transformation digitale de la finance doit également être en capacité de gérer un projet et de coordonner les différents corps de métiers concernés, aussi bien au niveau de ses propres équipes (comptabilité, trésorerie, credit management) que de l’IT ou des autres équipes en interne ou en externe de l’entreprise. « Son aptitude au management et à la gestion de projet est indispensable, insiste Emilie Duforest. En effet, il lui revient de faire le lien entre des financiers pas toujours experts de l’IT et des services informatiques qui, pour leur part, ne sont pas composés de financiers. D’autre part, il a également pour vocation de piloter le projet de bout en bout, depuis la définition du cahier des charges jusqu’à l’élaboration du planning et du budget en passant par l’analyse de l’existant ou encore la constitution et le pilotage de l’équipe qui s’en occupera. »

Les indispensables soft skills

Enfin, quelle que soit la nature des projets de transformation, ils sont souvent qualifiés de « transformants » pour les organisations car ils impactent directement les métiers et les processus. « Dans la plupart des cas, le responsable de la transformation digitale de la finance aura donc aussi pour mission d’assurer la conduite opérationnelle du changement, poursuit Emilie Duforest A ce titre, ses capacités d’écoute, de communication et de compréhension des préoccupations de chaque collaborateur concerné sont nécessaires, notamment pour lever les freins au changement. »

La finance de nouvelle génération sera digitale

Selon une étude Blackline/Censuswide publiée en février 2022, les financiers et cadres dirigeants attestent de l’importance d’une transformation de la fonction basée sur la data. Lorsqu’il s’agit de recruter de nouveaux talents, ils estiment par ailleurs que leur entreprise a besoin, en plus des compétences et qualifications traditionnellement requises, de connaissances technologiques en intégration des systèmes financiers (34 %), en automatisation robotisée des processus (RPA, 33 %), en solutions d’automatisation des finances (30 %) et d’intelligence artificielle (27 %).

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