Formation

Mentorat : comment s’entraider entre pairs

Publié le 21 avril 2023 à 10h00

Anne del Pozo    Temps de lecture 7 minutes

En marge des programmes de formation et des prestations de coaching qui font florès dans les métiers de la finance, le mentorat séduit de plus en plus, notamment pour l’échange de bonnes pratiques entre pairs qu’il permet. De plus en plus de programmes de mentorat apparaissent dans les associations professionnelles. 

Souvent sursollicités depuis la crise sanitaire, de nombreux financiers entendent aujourd’hui prendre le temps de se retrouver entre pairs, dans un cadre bienveillant et respectueux des règles de confidentialité, pour échanger en toute transparence sur une nouvelle mission qui leur est confiée, des pratiques de management ou tout simplement leur propre parcours professionnel. « La succession de crises que nous traversons depuis la Covid a souvent propulsé les financiers sur le devant de la scène, et nombre d’entre eux sont devenus de véritables business partners, un rôle qu’ils n’étaient pas forcément prêts à endosser », souligne Sandrine Ngo Hagbe, trésorière groupe, groupe Ingerop et membre du comité de pilotage du programme mentoring au sein de l’AFTE.

Un projet « femmes dans la finance » 

Gage de cette appétence pour le sujet au sein des métiers de la finance, de plus en plus de programmes de mentorat apparaissent dans les associations professionnelles. C’est notamment le cas au sein de l’Association française des trésoriers d’entreprise (AFTE) ou de l’Association française des crédits managers et conseils (AFDCC) qui ont mis en place des dispositifs en la matière à l’automne 2022. « Ce projet a été initié lors d’une réunion en 2021 portant sur “les femmes dans la finance”, pendant laquelle le sujet du plafond de verre dans la profession a été évoqué, raconte Sandrine Ngo Hagbe. Le mentorat était alors une des pistes évoquées pour aider à le briser. Très rapidement, nous nous sommes rendu compte que le besoin était général et que le programme pouvait servir à accompagner tous les trésoriers (juniors ou seniors) dans leur développement professionnel, face à différentes situations liées à un changement de poste, de nouvelles responsabilités comme la prise en charge de la relation investisseurs, jusqu’au management d’un service plus étendu ou à l’international, etc. Le programme mentorat de l’AFTE a vu le jour un an plus tard. » C’est également à l’initiative du club Management au Féminin de l’AFDCC que le projet mentorat est né au sein de cette association. « Au départ, nous souhaitions créer un système de “marrainage” pour accompagner les credit managers femmes dans leur rôle de managers plutôt que sur des sujets “métiers”, précise pour sa part Fabienne Guiliana, chef de projet credit management chez Urios et responsable du projet mentorat de l’AFDCC. Un dispositif que nous avons finalement ouvert à tous nos adhérents dans le cadre d’un programme plus large de mentorat, qui reste néanmoins surtout articulé autour de problématiques de management ou de problématiques humaines. Par exemple, nous avons mis en place un dispositif de mentorat pour une femme credit manager qui ne savait plus comment avancer dans son parcours professionnel. Actuellement, nous avons également plusieurs demandes de mentorat sur des sujets liés à l’export. »

«Le mentorat peut accompagner tous les trésoriers, juniors ou seniors, dans leur développement professionnel, face à différentes situations. »

Sandrine Ngo Hagbe Trésorière groupe, groupe Ingerop ,  Membre du comité de pilotage du programme mentoring AFTE

Des mentors engagés

Si les programmes de mentorat de l’AFTE et de l’AFDCC ont vu le jour récemment, d’autres existent depuis plusieurs années, à l’instar de DAF for Good mis en place au sein de la DFCG il y a huit ans. « A l’époque, il n’y avait pas de programme de mentoring au sein de la profession, souligne Arnaud Meyer Poujol, dirigeant d’AMP Solutions, administrateur de la DFCG et co-fondateur du programme DAF for Good. L’objectif de DAF for Good consistait et consiste toujours à accompagner pendant un an des jeunes entrepreneurs dans leurs choix stratégiques en les traduisant en chiffres, permettant ainsi à l’entreprise de se développer, d’assurer sa pérennité en prévoyant ses besoins en financement et en veillant au respect des contraintes légales. » Aujourd’hui, ce programme rencontre un véritable succès. L’an dernier, les mentors de la DFCG ont ainsi accompagné 13 start-up en Ile-de-France, 19 dans la région lyonnaise, 8 dans la région Nouvelle-Aquitaine, 7 dans la région Bretagne-Pays de Loire et 5 dans les Hauts de France.

Des mentors engagés

Quels qu’ils soient, ces programmes font l’objet d’une charte dans le cadre de laquelle les mentors comme les mentorés s’engagent à respecter notamment la confidentialité des échanges. Ils sont mis en place pour une durée variant entre six et douze mois et font généralement l’objet d’un suivi de la part d’un comité de pilotage comme c’est notamment le cas au sein de l’AFTE ou de la DFCG.

Les mentors sont recrutés sur la base du volontariat et du bénévolat. « Cette démarche de mentorat demande du temps, précise Fabienne Guiliana. Il est à ce titre important que le mentor soit véritablement prêt à s’engager dans la durée et à se mettre à la disposition du mentoré et non l’inverse. » Au-delà de cet engagement en termes de temps, le mentor doit également être animé par une réelle volonté de s’investir auprès d’un pair, être à son écoute et force de conseils. « Si je suis entré dans le programme de mentorat de la DFCG c’est surtout pour aider des entrepreneurs et co-construire avec eux l’avenir de leur entreprise, témoigne Emmanuel Dupeux, partner au sein de Saint-Honoré, partenaire également en charge du programme DAF for Good de la DFCG. En avançant ainsi main dans la main avec le mentoré, nous dépassons d’ailleurs parfois son seul besoin initial. »

Des mentorés volontaires

Si les mentors sont recrutés sur la base du volontariat, les mentorés peuvent pour leur part faire l’objet d’une sélection. « Les start-up que nous allons mentorer sont sélectionnées par nos partenaires en région, tels que Raise Sherpa, Finance Innovation en Ile-de-France ou bien auprès d’incubateurs en région : Le Village by CA Nord de France ; Euratechnologies, Atlanpole, Darwin le campement, 1kubator ou encore l’incubateur INSEEC Bordeaux, précise Emmanuel Dupeux. Nous privilégions désormais des start-up qui ont validé leur business model, qui sont en cours de levée de fonds ou qui en ont déjà réalisé une. Cela permet notamment aux mentors d’avoir un véritable relais financier au sein de la start-up. »

Le mentoré doit par ailleurs exprimer clairement la raison pour laquelle il souhaite être accompagné par un pair ainsi que le sujet. « Cette démarche de renseignement est importante pour mettre face à lui la bonne compétence », précise Fabienne Guiliana. Tout l’enjeu consiste ensuite à créer des duos mentor/mentoré (ou trinômes mentors/mentoré dans le cas du programme DAF for Good) en fonction des compétences des uns et des besoins des autres. « Nous veillons alors notamment à ne pas créer de conflits d’intérêts entre les mentors et le mentoré et essayons de respecter la parité de genre et la complémentarité en termes de compétences du binôme de mentors », précise Emmanuel Dupeux. C’est généralement à l’issue d’un premier échange entre les deux parties que les binômes sont validés.

Un partenariat gagnant-gagnant

La plupart des financiers qui se sont investis dans le mentorat reconnaissent que la démarche a été particulièrement enrichissante. « Partager des sujets que nous maîtrisons peut être à la fois source d’émulation et d’enrichissement, conclut Fabienne Guiliana. Le mentorat permet à la fois de partager des expériences et de grandir. » Au travers de ces programmes, le mentor vit également de nouvelles expériences et teste ses propres compétences. « Il s’agit véritablement d’une aventure humaine, conclut pour sa part Arnaud Meyer Poujol. Le mentorat, c’est une occasion pour le mentor de transmettre son savoir mais également de l’évaluer. Parfois, c’est également satisfaisant de constater que les conseils donnés portent leurs fruits ! » Articulé essentiellement autour de la relation humaine, le mentorat séduit de plus en plus les financiers, parfois même au détriment du coaching ou de la formation.

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