L'analyse de Frédéric Ponchon

Entreprises responsables : l’heure de vérité

Publié le 16 juillet 2020 à 10h55

Frédéric Ponchon

L’homme, poussé dans ses derniers retranchements, révèle sa vraie nature. Dans ce contexte de sortie de crise sanitaire, économique et boursière, où l’heure n’est plus à la maximisation des profits et du retour à l’actionnaire, la sincérité des démarches RSE des entreprises est mise à l’épreuve.

Il nous appartient, en tant qu’investisseurs engagés, d’identifier ces entreprises responsables. Lesquelles font preuve d’un comportement civique exemplaire ? Lesquelles se mobilisent pour mettre en place des mesures d’urgence dans une perspective de résilience sur le moyen/long terme ? Lesquelles s’engagent à protéger l’ensemble de leurs parties prenantes ? Agilité et réactivité sont clés : chaque entreprise, à son échelle, est face à ses responsabilités.

Une approche holistique de l’entreprise

Nous sommes convaincus que les entreprises qui limitent les impacts négatifs de la crise sur l’ensemble de leurs parties prenantes – salariés, chaîne de sous-traitance, clients –, quels que soient les réglementations applicables ou le secteur d’activité, sont celles qui ressortiront de cette crise avec des gains de parts de marché, une image de marque renforcée ou encore une amélioration de leurs rapports avec les autorités publiques.

Une approche holistique de l’entreprise, qui consiste, au-delà de l’analyse du modèle économique, à scruter les relations entre l’entreprise et ses parties prenantes, est essentielle pour évaluer la sincérité de sa démarche, de même que la pertinence et la viabilité des solutions mises en œuvre depuis le début de la crise. A cela s’ajoute la prise en compte de paramètres extérieurs – géographie, taille de capitalisation, secteur –, qui peuvent affecter certaines entreprises ou industries, indépendamment de leur volonté. Bien sûr, l’allocation des ressources doit tenir compte de la situation financière de l’entreprise et de sa capacité à soutenir ses parties prenantes sans remettre en cause la survie de son modèle économique.

Les «vraies» entreprises responsables

En combinant une revue à 360° de l’entreprise et en s’intéressant de plus près au secteur dans lequel elle évolue et au pays dans lequel elle opère, il est plus facile de distinguer la «vraie» entreprise responsable de la «fausse». Et c’est d’autant plus vrai dans un contexte de crise subit et inédit qui appelle des prises de décisions importantes à très court terme touchant de près la gouvernance et soulevant des problématiques sociales et sociétales majeures, mais qui doivent s’inscrire dans une démarche de long terme.

Déterminer si une entreprise adopte un comportement citoyen revient à savoir si elle a la capacité de mettre ses produits et son expertise au service du bien commun. Des initiatives observées au plus fort de la crise sanitaire démontrent la capacité de certaines entreprises à adopter une conduite responsable en adaptant leurs outils de production en un temps record et en fédérant les collaborateurs autour d’une nouvelle mission. 

Une entreprise responsable se doit également d’être irréprochable en matière de gouvernance. Il existe différentes façons de mesurer la résilience d’un modèle économique, et la crise que nous traversons est un bon test pour évaluer la solidité des entreprises et identifier celles qui ont élaboré des stratégies de long terme dans un objectif de croissance durable. Il est également important de s’attarder sur la bonne utilisation des aides versées par l’Etat, sur les mesures prises à très court terme pour assurer le maintien de l’activité ou encore affronter la récession qui se profile. 

Si nul ne peut prédire l’impact réel du Covid-19, d’aucuns sont d’accord pour affirmer que la société dans son ensemble va devoir opérer une profonde transformation pour assurer une sortie de crise durable et être mieux armée pour affronter un nouveau cataclysme. Les entreprises seront en première ligne. Dans un objectif de résilience, s’orienteront-elles vers des modes de production plus soutenables ? Exploiteront-elles leurs ressources différemment ? Relocaliseront-elles certaines productions stratégiques essentielles ?  Celles, plus sceptiques sur le télétravail, reverront-elles leur structure organisationnelle pour garantir l’activité en cas de grève, par exemple, ou dans un souci de bien-être du collaborateur ? D’autres deviendront-elles plus agiles, flexibles, pour adapter leur activité quand des circonstances exceptionnelles l’exigeront ? Repenseront-elles leurs relations avec leurs fournisseurs ?

Et en tant que citoyens, nous pouvons nous interroger sur nos habitudes, notre rapport à l’autre, à l’environnement… Autant de questions qui alimenteront les réflexions dans les mois à venir et dont les réponses sont clés pour l’avenir de notre planète.

Frédéric Ponchon

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