Table ronde

Optimiser les coûts en limitant les risques

Publié le 6 juin 2014 à 14h27    Mis à jour le 27 juillet 2021 à 11h44

Propos recueillis par Anne del Pozo

Après s’être penchées sur la réduction de leurs postes de dépenses, nombreuses sont aujourd’hui les entreprises qui cherchent de nouveaux leviers d’optimisation de leurs coûts. Une démarche qui passe désormais par l’anticipation et la gestion des différents risques auxquelles elles sont exposées.

De nouveaux leviers d'optimisation

Marie-Hélène Marot, vice-présidente du bureau Ile-de-France et administrateur de la DFCG, directeur administratif et financier de façon indépendante au sein du réseau Groupe Finaxim DFCG : Les entreprises arrivent au bout de leurs démarches d’optimisation des coûts, et sont déjà bien structurées en la matière. Elles ont déjà mutualisé les fonctions supports. Les axes d’amélioration aujourd’hui se trouvent désormais dans la voie des investissements : croissance externe, amélioration de la productivité par l’optimisation des process et des systèmes. Elles ont également recours à la variabilisation des coûts dans différents domaines dont les ressources humaines. Cette dernière démarche permet d’augmenter ou de diminuer les charges en fonction du rythme de l’activité de l’entreprise. De plus, dans le contexte de complexification toujours croissante du système social en France, les entreprises cherchent des solutions souples.

Antoine Bayon de Noyer, chargé de projet optimisation de la fonction finance au niveau mondial chez Carlson Wagonlit Travel : Nous sommes entrés dans une nouvelle phase du rôle du directeur financier. Traditionnellement, il avait pour vocation d’assurer la production des chiffres et de faire en sorte que l’entreprise soit en conformité avec le système réglementaire et fiscal en place. Plus récemment et notamment avec la crise, le rôle du directeur financier a évolué vers celui de business partner plus proche des opérationnels, pour mieux piloter la marge des activités et le niveau de cash. Aujourd’hui que les réflexes de crise sont entrés dans une phase d’habitude, il a aussi pour mission de superviser et de gérer les risques, et ce notamment suite aux conséquences de la crise. La gestion des risques devient une des priorités du directeur financier afin d’assurer des prévisions plus fiables sur les résultats financiers et d’éviter toute mauvaise nouvelle.

Appréhender les risques financiers

Vital Saint Marc, associé et membre du comité de direction du groupe RSM Paris : Nous sommes dans une société de risques. A l’heure actuelle, nous avons peur de tout, que ce soit sur le plan humain ou sur le plan professionnel. L’entreprise a notamment peur du risque sociétal, du risque financier, du risque social, du risque informatique. Cette peur fait partie de la société en général. La nouvelle mission du directeur financier consiste donc à s’intéresser à l’ensemble des risques.

Laurent Leprévost, directeur général de Galtier Expertises Immobilières et Financières, Groupe Expertises Galtier : Nous pouvons parfaire le propos sur l’immobilier. Nous parlons systématiquement de l’aversion au risque de l’investisseur. Or, le propre de l’investisseur, c’est certes d’évaluer le risque mais aussi de le prendre, petit ou grand.

Vital Saint Marc : Si tous les risques de l’entreprise ont nécessairement une conséquence financière, ils ne sont pas tous pour autant des risques financiers. La notion de risque s’articule autour de trois grandes familles d’actifs : les actifs physiques, tels que l’immobilier ou les stocks, les actifs incorporels liés aux savoir-faire, aux hommes, ou encore aux marques et enfin, les actifs financiers tels que la liquidité, les valeurs mobilières et l’ensemble des créances. Ces risques sont liés à différents acteurs qui interagissent avec l’entreprise. Les clients, les fournisseurs, les prêteurs, les actionnaires, mais également l’Etat, le gouvernement, les collectivités locales, etc. sont autant d’acteurs qui font potentiellement peser des risques financiers sur l’entreprise. Le changement à venir de la loi de finances votée en 2013 est en la matière un cas d’école. Certes, les changements prévus vont essentiellement avoir des répercussions favorables sur l’impôt sur les revenus des Français mais ces changements législatifs trop fréquents, avant même que la loi ne soit appliquée, dénotent une insécurité juridique qui fait peser des risques financiers sur l’entreprise, dont elle aura du mal à se prémunir. Pour maîtriser ces risques, il faut donc d’abord en faire la cartographie. Les risques sont en effet différents selon les entreprises, les secteurs d’activité, les pays et le rôle des responsables consiste à les hiérarchiser et à identifier ceux qui pourraient le plus impacter l’entreprise. Par exemple, la crise a mis en exergue le risque client et ses conséquences, ou le risque lié à l’incapacité d’un fournisseur de livrer la marchandise ou de prester. Au regard de la conjoncture actuelle, l’insolvabilité des clients et des fournisseurs est un risque que les entreprises doivent identifier et absolument maîtriser. De nombreuses entreprises ont encore un long chemin à parcourir en la matière. Pour se couvrir contre le risque client, il faut d’abord anticiper, en analysant sa solvabilité apparente à partir des données financières des greffes ou de prestataires spécialisés en la matière. Ensuite, l’entreprise doit mettre en œuvre des processus de suivi de la créance client. Nous nous apercevons que dans nombre d’entreprises, quelle que soit leur taille, les processus de relance client manquent d’organisation. Or un client qui n’est pas relancé est potentiellement un client qui ne paiera jamais sa facture. Enfin, il ne faut pas hésiter à recouvrer la créance par contrainte et parfois, dans la mesure du possible, à transférer ce risque auprès d’un assureur crédit. Concernant la maîtrise des risques de taux en revanche, les entreprises ont bien avancé sur le sujet. Ces risques et les moyens de couvertures associés sont aujourd’hui connus, du moins au sein des grandes entreprises.

Antoine Bayon de Noyer : C’est là que le nouveau rôle du directeur financier prend toute sa signification. Un bon recouvrement ou une bonne gestion du poste client ne relève pas uniquement du département financier du credit management/comptabilité clients ou du commercial, mais d’une gestion collaborative au sein de l’entreprise. Par exemple, chez CWT nous faisons appel à des bases de données telles que celle d’Altares-D&B pour avoir des informations sur la santé financière de nos clients et prospects. Nous regardons également l’historique de paiement de nos clients existants pour affiner un rating interne. Ensuite, nous produisons du reporting envoyé toutes les semaines aux équipes financières ainsi qu’aux commerciaux. Le recouvrement pour sa part est sous la responsabilité des équipes de comptabilité client mais tous les mois, nous avons aussi un comité de crédit qui réunit conjointement la finance, le commerce et les opérationnels. En fonction des problèmes de paiement rencontrés, il définit des plans d’action dans lesquels nous pouvons faire intervenir par exemple nos équipes commerciales ou les opérationnels. Il s’agit donc bien d’une démarche collaborative.

Marie-Hélène Marot : Aujourd’hui, nous observons de plus en plus de solutions de gestion légère, type SaaS, qui combinent gestion du recouvrement et information/assurance crédit. Auparavant, les entreprises prenaient ou non des informations financières sur les clients et ce, pas forcément de façon systématique. Aujourd’hui, ces informations sont disponibles dans des outils en ligne. L’entreprise dispose ainsi d’informations sur ses clients alimentées en permanence par des prestataires tels qu’Ijicof/Ellisphere ou Altares ainsi que d’outils de gestion, de relance et de pilotage du poste client. Le risque client est un sujet important à mesurer et à évaluer en permanence.

Laurent Leprévost : La gestion des acomptes est importante dans les entreprises prestataires de services. Commercialement parlant, il est parfois difficile de le demander. Une fois sur deux, lorsqu’un acompte n’est pas versé, le recouvrement des honoraires se révèle compliqué. Ce point demeure en conséquence fondamental pour la trésorerie de la société mais également en raison des coûts finaux en cas de contentieux. S’assurer de la bonne santé du client en début de mission n’est pas inutile !

Marie-Hélène Marot : Dans le secteur du service, nous avons cette logique d’acompte mais aussi de matérialisation de la satisfaction du client par la signature d’un PV de réception. Il faut, à un moment donné, que l’entreprise soit capable de recueillir la réception par le client de son dû bien qu’il s’agisse d’une prestation immatérielle pour qu’ensuite le règlement se déroule conformément aux conditions contractuelles. Il s’agit d’un facteur de risque à bien appréhender.

Vital Saint Marc : Tout le risque consiste, pour l’entreprise, à être capable de financer son activité, c’est-à-dire son besoin en fonds de roulement. L’encaissement d’acomptes dans les entreprises de services est de ce point de vue une très bonne pratique. Le financement du BFR est donc fondamental, de même que le financement des investissements.

Marie-Hélène Marot : Au-delà de ça, il s’agit aussi de gérer une perte potentielle. La gestion du BFR est importante quand l’activité se porte bien. Cependant, malgré les efforts mis en œuvre, le risque porte sur le non-paiement des clients. En matière de risque, un sujet est important : quels sont les outils de valorisation ? En qualité de DAF nous devons repérer les risques qui pèsent sur l’entreprise mais aussi évaluer et provisionner la valeur d’un risque.

Ne pas sous-estimer les assurances

Antoine Bayon de Noyer : Parallèlement, pour mieux maîtriser les risques sur nos biens quels qu’ils soient, il faut que les entreprises travaillent sur leurs assurances pour couvrir les personnes ou les biens. Il s’agit d’un sujet pas toujours bien maîtrisé par les différents acteurs de l’entreprise et sur lequel il faut revenir au moins tous les trois ans. Dans le cadre de la révision des contrats d’assurance, l’entreprise doit notamment veiller à ce que la couverture proposée par son ou ses assureurs soit adaptée à la taille et à l’activité de l’entreprise. Il faut également regarder les coûts de ces assurances. Les grandes entreprises qui n’ont pas de gros risques peuvent par exemple monter des captives d’assurance, ce qui permet de réduire leurs coûts en la matière.

Laurent Leprévost : L’assurance est un sujet encore trop largement sous-estimé dans les entreprises. Il s’agit d’un vrai problème. Il faut chaque année surveiller la bonne valeur des capitaux assurés : matériel, actifs corporels, etc. Il faut également évaluer tous les risques liés à la perte d’exploitation (personnel, activité, etc.). Le rôle des risk managers est naturellement fondamental dans cette appréhension. En cas de sinistre, le contrat d’assurance peut également intégrer le remboursement du travail d’un expert d’assuré qui assistera son client. 30 % à 40 % des contrats intègrent aujourd’hui cette donnée, contrats se référant parfois à la notion de valeur vénale. Un certain nombre d’entreprises n’ont pas toujours conscience de la nécessité de réactualiser leurs contrats et le montant des capitaux qu’elles couvrent, les sinistres sont alors autant de réveils douloureux.

Ludovic Delaisse, directeur du département bureaux et pôle développement, Cushman & Wakefield France : Il ne faut pas oublier que dans l’immobilier, le locataire titulaire d’un bail est toujours redevable du loyer, même en cas de sinistre partiel du bâtiment.

Vital Saint Marc : Est-ce que tout cela ne relève pas finalement du risque juridique ? Le risque juridique va d’ailleurs au-delà de l’immobilier et concerne tous les contrats de l’entreprise, dont les contrats sociaux.

L’immobilier pose de nombreux risques

Ludovic Delaisse : Le risque immobilier, lorsque l’entreprise est locataire d’un immeuble, porte d’abord sur l’évolution du loyer. Aujourd’hui, les utilisateurs se sont ligués contre ce sujet en créant un nouvel indice, l’ILAT. Auparavant, l’index basé sur l’ICC avait conduit à des évolutions de loyer allant jusqu’à 8 % par trimestre. Un bail calé sur l’indice de l’ILAT permet de mieux contrôler ces augmentations. Par exemple, sur ces cinq dernières années, l’augmentation moyenne annuelle de l’ILAT n’est que de 1,5 %. Le risque immobilier porte également sur le bail. Il doit stipuler l’ensemble des engagements du locataire à travers ce bail, comme par exemple en cas de destruction de l’immeuble par un incendie. Les coûts d’entretien et d’exploitation de l’immeuble sont également à regarder de près. Je parle notamment des articles 606 et 605. Le 606 est relatif à tout ce qui concerne le clos et couvert et est souvent à la charge du bailleur. L’article 605 porte pour sa part sur les réparations des gros équipements, tels que les ascenseurs ou la climatisation, généralement à la charge du locataire. Si l’entreprise s’installe dans un immeuble neuf, en général tout fonctionne correctement. Cependant, sur un immeuble vieillissant, il peut y avoir des coûts importants d’exploitation, quand par exemple l’ascenseur tombe en panne. L’ensemble de ces risques peut s’anticiper dans la négociation juridique du bail. L’entreprise peut passer un accord avec son propriétaire pour que certains coûts de réparations soient à la charge du bailleur car elle considère qu’elle loue un immeuble en bon état de fonctionnement. Le dernier point sur lequel il faut être vigilant porte sur la réglementation, notamment sur tout ce qui est lié à l’environnement et aux économies d’énergie. Aujourd’hui, comme nous ne savons pas ce qui sera imposé et ce qui sera rétroactif, le propriétaire veut que tous les risques au cours du bail qui arrivent soient à la charge du locataire. Si demain la réglementation exige de réduire la consommation énergétique des bâtiments, comme cela avait été prévu dans le cadre du Grenelle de l’Environnement, qui prendra en charge le coût des travaux nécessaires et sera-t-il rétroactif ? Il s’agit d’un risque que le locataire doit aussi prendre en compte dans la négociation de son bail.

Laurent Leprévost : En matière d’immobilier, il faut aussi que l’entreprise ait un benchmark sur les charges d’exploitation et évite de s’engager sur des baux trop longs. Une entreprise vit des phénomènes de croissance et de contraction, pendant lesquels ses besoins en termes de surface de bâtiments ou bureaux ne seront pas les mêmes. Il y a actuellement des réflexions à mener pour accompagner au mieux les entreprises en la matière. Il faut donner de la souplesse là où le bail impose une certaine rigidité.

Ludovic Delaisse : Nous mettons actuellement en place dans les baux des clauses qui permettent de nuancer la problématique de croissance de l’entreprise. Il faut en effet arriver à concilier un prix du loyer et un accompagnement important qui diminuera en fonction de la durée d’engagement, tout en apportant une réponse à ce besoin de flexibilité en termes de surface.

Laurent Leprévost : Le vrai sujet aujourd’hui porte sur ce qui est quittancé à savoir le loyer plus les charges. Nous pouvons avoir un loyer de marché et des charges qui ne sont pas de marché. C’est la raison pour laquelle il faut avoir une approche globale. L’entreprise peut très bien négocier un loyer et se retrouver avec un bâtiment dont les charges sont très importantes. Nous estimons qu’une entreprise sur trois ayant plus de 500 salariés va déménager soit en quittant le lieu qu’elle occupe, soit dans le lieu qu’elle occupe en effectuant des réaménagements. Il est important, lorsqu’un locataire prend à bail, qu’il sache s’il peut moduler son espace (cloisons, présence de monte-charge, fluides, etc.). Optimiser les espaces est souvent moins coûteux que de déménager.

Ludovic Delaisse : La maîtrise des charges est également possible. Le gestionnaire ou le propriétaire est obligé de démontrer que les charges qui sont facturées au locataire sont réelles. En matière de contractualisation, il existe aussi des moyens aujourd’hui d’encadrer l’évolution des charges, comme pour les baux. Par exemple, il est possible de limiter l’augmentation des charges en fonction de l’évolution des coûts de la matière première. En ce qui concerne l’optimisation de l’espace, elle est également liée à l’efficience des immeubles. Enfin, il faut bien insister sur le fait que le coût immobilier repose certes sur le loyer, à hauteur de 40 % environ, mais aussi sur les charges, la fiscalité, l’efficience de l’immeuble et sa consommation énergétique. Aujourd’hui, nous avons certains immeubles qui consomment moins de 50 kWh en énergie finale au m2 alors que la moyenne du parc est plutôt autour de 260 kWh/m2 et que dans Paris certains immeubles dépassent les 450 kWh/m2.

Vital Saint Marc : Faut-il réfléchir à un coût au m2 ou à un coût par poste de travail ?

Ludovic Delaisse : Aujourd’hui, il faut davantage raisonner par coût au poste de travail.

Laurent Leprévost : Il convient également de mettre en perspective ce sujet avec les immeubles verts. Plusieurs éléments s’entremêlent : montrer en termes d’affichage que l’entreprise se soucie des questions environnementales, du bien-être de ses salariés et d’une maîtrise des dépenses énergétiques. A ce stade, il n’est pas inutile de rappeler les séquences que nous avons vécues. 2007-2008 : Grenelle de l’environnement et les hésitations du marché avec d’un côté un surcoût de construction afin d’obtenir les précieux labels, un loyer plus élevé supporté par le locataire et pour ce dernier une contrepartie, l’économie des charges. La réalité a été différente entre 2008 et 2011 environ : les locataires n’ont pas tous, loin s’en faut, enregistré des baisses de leurs charges, d’où au final un loyer plus haut et des charges ne compensant pas ce «surloyer». Aujourd’hui, les coûts de construction de bâtiments «verts» sont mieux maîtrisés et les acteurs ont compris qu’il fallait garantir aux locataires un niveau de performance énergétique. C’est dans ce dialogue entre bailleurs, locataires, concepteurs, architectes que l’utilisateur final pourra réellement espérer une économie de ses charges grâce à cet immeuble vertueux, mais aussi grâce à une véritable œuvre de pédagogie vis-à-vis du personnel. On l’oublie souvent mais environ un tiers des dépenses énergétiques dépendent de la bonne utilisation des locaux.

Ludovic Delaisse : La question de la surface occupée et de son efficience est vraiment le sujet le plus important en matière de risque immobilier.

Laurent Leprévost : Certains éléments immatériels jouent également sur la valeur du bâtiment. Par exemple, un chef d’entreprise qui veut des valeurs locatives très basses et prend des bureaux en dehors de Paris s’expose à des risques d’absentéisme. De même, la qualité de la climatisation peut influer sur les arrêts maladie, etc. Le bâtiment est devenu un enjeu salarial et de management.

Optimiser les dépenses liées à la masse salariale

Marie-Hélène Marot : Il existe différents moyens de maîtriser le poste de dépenses liées à la masse salariale. Par exemple, l’externalisation permet de variabiliser les coûts et de ne pas être lié à un contrat de travail. Le contrat de travail et l’augmentation des effectifs engagent en effet l’entreprise dans de nombreux domaines et dans la durée. Les risques liés aux ressources humaines sont de nombreuses natures : IRP, syndicats, ancienneté des salariés dans l’entreprise, pénibilité et accidents du travail, etc. Ce sont aussi autant de sujets pouvant se transformer en levier d’optimisation des coûts dès lors que l’entreprise s’attache à mieux les cerner, les maîtriser et les piloter.

Vital Saint Marc : En matière de masse salariale, il faut distinguer les coûts visibles – salaires, charges sociales, etc. – des coûts cachés dont le poids est souvent significatif mais mal appréhendé. A titre d’exemple, la paix sociale dans l’entreprise peut influer sur le taux d’absentéisme et ainsi sur la rentabilité.

Marie-Hélène Marot : Si le capital humain est l’un des principaux capitaux de l’entreprise, le risque majeur serait de le perdre. Prenons l’exemple d’un nez dans une entreprise de parfumerie : son départ pourrait remettre en cause la pérennité de son employeur. Il s’agit d’un type de risque qui est désormais couvert par des polices d’assurance spécifiques. Cependant pour préserver son capital social et fidéliser ses salariés, l’entreprise doit avant tout mettre en place une politique sociale, notamment en faisant appel aux bons organismes sociaux, en communiquant régulièrement auprès de ses collaborateurs sur la performance de l’entreprise, en leur proposant des intéressements ou des participations aux bénéfices, des avantages sociaux complémentaires, originaux : adapté aux besoins de ses collaborateurs…

Antoine Bayon de Noyer : Autant les risques financiers de pertes d’exploitations ou immobiliers sont encore difficiles à maîtriser pour de nombreuses entreprises, autant les risques liés aux personnes, dès lors qu’ils sont bien gérés avec des actions proactives, se maîtrisent de mieux en mieux.

Marie-Hélène Marot : La gestion saine du capital humain doit faire partie de l’ADN des entreprises même si ça n’est pas si simple à mettre en place.

Vital Saint Marc : C’est d’autant moins simple que les collaborateurs les plus jeunes ont souvent des attentes importantes vis-à-vis de l’entreprise, qu’ils ont du mal à formaliser ou que l’employeur a du mal à comprendre. L’écoute est donc essentielle.

Ludovic Delaisse : En matière d’immobilier, nous avons observé depuis un peu moins d’un an un changement dans les entreprises. Avant, elles avaient un projet immobilier pour réduire leurs coûts. Ce projet était d’ailleurs souvent piloté quasi exclusivement par la direction financière ou les achats. Aujourd’hui, nous constatons que dans le cadre de ces projets, nous travaillons à nouveau avec la direction immobilière mais aussi et surtout avec la direction des ressources humaines. Les sociétés ayant fait des économies dans tous les sens, elles sont donc arrivées au bout de ce processus. L’enjeu aujourd’hui consiste à repartir à la conquête du marché pour développer à nouveau le chiffre d’affaires. Or, le capital humain est le meilleur moyen pour y arriver car c’est lui qui produit du chiffre d’affaires. L’immobilier est alors devenu un outil de management : selon la localisation, l’entreprise va satisfaire plus ou moins ses salariés et leur faire par exemple gagner du temps dans leurs trajets domicile/travail mais aussi dans leurs trajets bureaux/clients. Du temps que les salariés peuvent passer en plus dans l’entreprise. Par ailleurs la rupture entre les générations X et Y est également un enjeu fort : les X veulent une reconnaissance dans la société alors que les Y attendent du confort entre leur vie privée et leur vie professionnelle. Enfin, nous notons également une tendance au développement du «works space policy» où le m2 par salarié a fortement diminué mais où les services (conciergerie, crèches d’entreprise, restaurants, salles de sports, de confort, etc.) sont en revanche en augmentation.

Laurent Leprévost : Sur les jeunes générations, il n’y a en effet plus du tout le même attachement à l’entreprise.

Ludovic Delaisse : Les entreprises ont également des difficultés aujourd’hui à recruter des talents. L’immobilier, la localisation des bureaux, les services proposés sont autant d’arguments propres à attirer les talents dans une entreprise mais aussi à faire face au turn-over.

Vital Saint Marc : Le risque sociétal, à savoir l’image que l’entreprise renvoie à l’égard des médias ou des leaders d’opinion, prend maintenant une ampleur significative.

Laurent Leprévost : Dans la gestion de son parc immobilier, lorsque l’entreprise est propriétaire de son parc immobilier il est important qu’elle mette en place des plans pluriannuels de travaux et de maintenance. Il s’agit d’une démarche indispensable pour ne pas avoir une dépréciation de son actif. Cela peut d’ailleurs aussi avoir des conséquences sur le social, les charges…

Chargement en cours...

Chargement…