Parole d'expert

Sur la route du commerce international : comment devenir un véritable pilote de l’export ?

Publié le 10 juin 2016 à 9h38    Mis à jour le 8 juillet 2021 à 19h38

Anne del Pozo

En 2016, l’atonie de la croissance mondiale (+ 2,5 %) et les effets de second tour de certains chocs spécifiques (prix des matières premières, transition économique chinoise) handicaperont le commerce mondial, pesant ainsi sur le chiffre d’affaires des entreprises. Néanmoins, de réelles opportunités existent à l’international, et plusieurs pays restent attractifs pour les exportateurs. Panorama complet du commerce international pour 2016.

Quel est l’itinéraire à suivre en 2016 ?

Comme en 2015 (– 10 %), le commerce mondial devrait à nouveau se contracter en valeur en 2016 (– 2 %). Une situation en partie due à la faiblesse de la croissance mondiale, qui n’atteindra pas le seuil des + 3 % pour la sixième année consécutive. «Les économies avancées afficheront une croissance modérée (+ 1,8 % en 2016) tandis que la reprise dans les pays émergents prendra plus de temps (+ 3,6 %, un nouveau point bas depuis 2009), explique Hubert Leman, directeur des engagements d’Euler Hermes France. En conséquence, 70 % de l’économie mondiale sera en ralentissement ou en récession.»

Pour autant, certains pays sauront tirer leur épingle du jeu, offrant de potentiels débouchés aux exportateurs. C’est le cas de l’Inde, seul pays des BRIC dont les perspectives économiques s’améliorent nettement. «L’adoption il y a deux ans de politiques économiques responsables et pragmatiques commence à porter ses fruits. Les pressions inflationnistes ont été corrigées, et le risque de change est modéré par rapport à 2013», détaille Daniela Ordoñez, économiste chez Euler Hermes.

Par ailleurs, le Vietnam, l’Indonésie et les Philippines (ou VIP de l’ASEAN) sont aussi des destinations intéressantes pour les entreprises exportatrices. L’émergence rapide de la classe moyenne dans ces pays a en effet favorisé le développement de la demande domestique. De plus, les VIP sont aujourd’hui bien plus compétitifs que la Chine en termes de coût de main-d’œuvre, attirant ainsi beaucoup d’investissements étrangers.

Un chemin sinueux : volatilité financière, risque politique et risque d’impayé

Cette année, les exportateurs devront faire face à quatre principaux risques à l’échelle internationale, dont la volatilité financière. «Certains émergents sont confrontés à la dépréciation massive de leur devise. Cette situation concerne par exemple les pays exportateurs de matières premières», développe Daniela Ordoñez. Ainsi, la dépréciation depuis mi-2014 dépasse 80 % pour l’Ukraine, 70 % pour la Russie, 50 % pour la Colombie, le Brésil ou l’Angola, et 40 % pour l’Afrique du Sud.

Autre difficulté pour les exportateurs : le risque politique, qui n’épargne aucun continent. «On pense tout de suite aux risques de conflits au Moyen-Orient, à la crise des réfugiés en Europe, aux tensions toujours latentes avec la Russie, mais n’oublions pas le risque de troubles sociaux en Amérique latine et dans certains pays d’Afrique et du Golfe, où, jusqu’à maintenant, la paix sociale était achetée grâce à des entrées massives de revenus pétroliers», analyse Daniela Ordoñez. Par ailleurs, le commerce mondial est aujourd’hui touché par une vague protectionniste. Depuis 2014, près de 1 300 nouvelles mesures protectionnistes ont été mises en place dans le monde, dont 700 en 2015. Un phénomène notamment visible au Brésil, en Russie et en Inde (environ 50 mesures chacun).

Enfin, 2016 sera marquée par l’accroissement du risque d’impayé. Pour la première fois depuis 2009, le nombre de défaillances d’entreprises à l’échelle mondiale augmentera cette année (+ 2 %). Un rebond en partie alimenté par les émergents, dont le Brésil (+ 22 %) et la Chine (+ 20 %). En Europe de l’Ouest, la tendance est à la baisse, mais la situation reste fragile : malgré l’amélioration actuelle, plus de la moitié des pays enregistrent encore un nombre de défaillances supérieur au niveau d’avant-crise.

Protéger sa trésorerie pour ne pas se perdre

Selon le dernier Baromètre export d’Euler Hermes, le risque d’impayé reste le frein principal à l’exportation. «Connaître ses partenaires commerciaux et piloter sa politique de crédit, c’est essentiel pour pérenniser son développement, affirme Pierre Pasquier, responsable de l’arbitrage export chez Euler Hermes France. Or, l’accès à l’information diffère d’un pays à l’autre. Un pays comme la Suisse se montre par exemple très frileux dans la mise à disposition d’informations financières sur les entreprises.»

Par ailleurs, les bilans ne sont pas forcément certifiés selon les mêmes règles et avec la même rigueur dans tous les pays. De même, à l’étranger, procéder à l’évaluation du risque client n’est pas toujours évident. «Vérifiez d’abord que votre client... existe, conseille Pierre Pasquier. Un assuré qui n’avait pas été payé par un client chinois est allé voir à l’adresse indiquée, pour ne trouver qu’un terrain vague !» Il est nécessaire de bien identifier les personnes qui ont la capacité juridique de signer les contrats et les bons de commande, et de vérifier auprès du siège l’adresse de livraison. Ce sont des étapes qui ne doivent pas être négligées. L’évaluation prend du temps et demande de la proximité et une connaissance du marché et des pratiques commerciales. Passer par un tiers, assureur crédit ou banque, peut s’avérer rapidement rentable et plus efficace pour se prémunir du risque de non-paiement ou recouvrer ses créances commerciales en cas de défaut de paiement. Une priorité pour préserver sa trésorerie et trouver le chemin du succès à l’export !

Questions à… Véronique Turinaz-Postel, directeur commercial et marketing, Euler Hermes

Depuis février 2016, Véronique Turinaz-Postel fait partie du comité exécutif d’Euler Hermes France en tant que directrice commerciale et marketing. Une fonction qui lui permet d’être en contact permanent avec les exportateurs français, et d’avoir une vision précise des opportunités et des risques à l’international.

Quelles sont les perspectives pour les exportateurs français en 2016 ?

En 2016, les exportateurs français bénéficient d’un contexte favorable qui pourrait leur permettre de capter un potentiel additionnel de demande de 21,2 milliards d’euros. Cette situation est due à un effet prix – baisse de l’euro et stabilisation entre 1,05 et 1,1 dollar – et à un effet demande chez nos principaux partenaires commerciaux – regain des importations en Allemagne et Espagne, avec des secteurs gagnants comme les équipements industriels, la chimie et l’agroalimentaire. De plus, de vraies opportunités persistent dans les émergents, qui restent des marchés à fort potentiel. C’est le cas en Asie avec le Vietnam, l’Indonésie, l’Inde et les Philippines.

Nos exportateurs sont-ils armés pour s’imposer sur la scène internationale ?

Les entreprises françaises ont une réelle appétence pour l’export. Elles nous l’ont démontré dans notre dernier Baromètre : sur plus de 930 entreprises répondantes, près de 80 % comptent augmenter leur chiffre d’affaires à l’export en 2016 ! Mais pour se lancer à l’international, mieux vaut être accompagné, afin de bien connaître et sélectionner ses partenaires commerciaux, et se protéger du risque d’impayé. Euler Hermes prévoit d’ailleurs un rebond des défaillances d’entreprises de + 2 % en 2016. L’assurance crédit joue un rôle majeur pour assurer une gestion saine de son poste clients et renforcer sa compétitivité en optimisant la prospection et les négociations commerciales.

Comment peut-on protéger sa trésorerie sur des opérations à l’export ?

Nous proposons un éventail complet de dispositifs d’assurance crédit court terme pour accompagner au mieux les entreprises à l’export. Nous offrons une couverture élargie du risque politique qui comprend une protection en cas de guerre, de terrorisme, mais aussi les risques qui découlent de décisions prises par les autorités politiques, comme l’annulation de licence ou le risque de non-transfert. Nous avons également mis en place une solution pour les entreprises souhaitant couvrir des opérations ponctuelles à moyen terme contre les risques d’interruption du contrat et d’impayés. Enfin, nos activités de caution, un outil essentiel pour soumissionner des marchés à l’étranger et rassurer les donneurs d’ordre, connaissent un développement croissant. Autant de solutions qui aident le dirigeant à se focaliser sur le développement et la réussite de son activité.

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