Flotte automobile

Vers la fin de la suprématie du diesel ?

Publié le 21 novembre 2014 à 11h01    Mis à jour le 27 juillet 2021 à 11h25

Anne del Pozo

Fiscalité de plus en plus pénalisante, véhicules essence plus vertueux, transition énergétique des parcs automobiles ... A l’heure où les professionnels de la gestion de flotte ont toujours pour priorité de réduire les coûts d’utilisation des véhicules, va-t-on vers la fin du monopole du diesel dans les entreprises ?

Si beaucoup d’entreprises et d’acteurs publics construisent encore leur politique voiture en fonction du prix d’achat des véhicules, le TCO (total cost of ownership) s’impose de plus en plus comme un modèle de référence pour mesurer le coût d’une flotte. Il évalue l’ensemble des coûts présumés d’un véhicule et intègre à ce titre son prix d’achat, ses frais financiers, son prix de revente, son entretien, sa consommation ainsi que les charges sociales et fiscales y afférent. Pour mieux maîtriser voire réduire ce TCO, les entreprises sont aujourd’hui particulièrement vigilantes sur le choix des motorisations et les émissions de CO2 des véhicules, qui ont notamment des impacts en termes de fiscalité, mais également sur le comportement de conduite de leurs conducteurs qui peut lourdement influer sur les coûts liés à la consommation de carburant et à la sinistralité.

 

Une fiscalité plus pénalisante pour les diesels

Avec une fiscalité toujours plus sévère et un budget carburant soumis à des évolutions en dents de scie, les gestionnaires de parcs automobiles les plus avancés vont même jusqu’à calculer les émissions moyennes de CO2 de leurs flottes et surveillent à la loupe l’actualité automobile pour sélectionner les véhicules les plus sobres écologiquement et les plus économiques en termes de consommation de carburant. L’instauration en 2014 d’une TVS additionnelle assise sur la pollution atmosphérique (oxydes d’azote et particules fines) pourrait d’ailleurs entamer le monopole du diesel dans les entreprises. En effet, non seulement les prix à la pompe des deux énergies tendent à se rejoindre, mais les exigences de la nouvelle norme Euro 6 renchérissent le prix des modèles diesel. Certes, du côté des constructeurs, la plupart des modèles sont déjà en phase avec cette nouvelle réglementation. Par exemple, la nouvelle Twingo récemment mise sur le marché, la Golf 7 ou encore la Peugeot 508, équipée du moteur Blue HDI, répondent à la norme Euro 6. Néanmoins, pour satisfaire à cette norme, les constructeurs ont dû équiper leurs moteurs diesel de pièges à NOx, renchérissant le coût des véhicules concernés de 700 à 1 000 euros. En 2015, le tarif des citadines diesel devrait donc augmenter d’au moins 300 euros, une somme qui viendra s’ajouter aux 2 000 euros qui les séparent déjà des versions essence. Ce surcoût sera d’autant plus difficile à amortir que le gouvernement continue de parler d’aligner la fiscalité du gazole sur celle de l’essence.

 

Des véhicules essence plus vertueux

Ces nouvelles exigences normatives poussent également peu à peu les constructeurs à abandonner le diesel pour les petites citadines, dont certaines (Nissan Micra, Mitsubishi Space Star, Toyota Aygo, Citroën C1 ou encore Peugeot 107), ne sont déjà plus disponibles qu’en version essence. Parallèlement, ils s’attachent aussi à réduire la consommation en carburant de certains de leurs modèles essences, à l’instar de Renault sur ses nouvelles Clio et Mégane. Depuis 2007, force est ainsi de constater, sur le marché européen, une diminution d’environ 5 % des cylindrées moyennes lorsque, durant la même période, la puissance moteur a pour sa part augmenté de 14 %. L’efficacité moteur a ainsi été améliorée de 21 % depuis 2007. Cette réduction des cylindrées a permis de baisser l’empreinte environnementale des véhicules sans toutefois affecter le conducteur en matière de plaisir de conduite. «Aujourd’hui, certains véhicules essence sont proposés à des prix compétitifs par rapport aux diesels, précise Philippe Brendel. Si les conducteurs roulent moins, ce qui est actuellement le cas, ces véhicules deviennent une véritable alternative au diesel pour les entreprises. D’ailleurs l’écart de consommation entre un diesel et une essence n’est plus que de 0,8 litre, ce qui est désormais peu.»

 

Les parcs automobiles entament leur transition énergétique

Résultat, de nombreux responsables de flotte envisagent de référencer des véhicules essence jusqu’à présent quasi inexistants dans leurs flottes. «Sur le marché des véhicules particuliers en entreprise, le décrochement du diesel est intervenu en 2013 avec une baisse 3,4 % des immatriculations de VP diesel et sans doute davantage encore, sachant que les deux tiers des véhicules hybrides ont des moteurs essence, explique Monique Buntic, responsable du développement au sein de l’Observatoire des véhicules d’entreprise (OVE). Cependant, Les diesels représentent encore 87 % des véhicules d’entreprise, notamment en raison d’une fiscalité qui, malgré tout, leur est toujours plus favorable que pour les moteurs essence.» A terme, la tendance pourrait évoluer vers un rééquilibrage progressif entre les motorisations diesel et essence, notamment parce que les offres sont de plus en plus compétitives dans les segments inférieurs et moyens inférieurs.

Les entreprises s’intéressent également de plus en plus aux véhicules électriques et hybrides, dont l’offre tend à se diversifier. D’après le Syndicat national des loueurs de voitures en longue durée (SNLVLD), le marché du véhicule électrique a fini le second trimestre 2014 sur un bon mois avec une progression de + 16 % en juin. Cette hausse fait néanmoins suite à cinq mois consécutifs de recul. Sur le premier semestre 2014, le marché des véhicules électriques enregistre un retard de 9,1 % par rapport à la même période en 2013. «Un retard qui devrait néanmoins progressivement se résorber d’ici la fin de l’année, notamment grâce au nouveau décret relatif au bonus écologique entré en vigueur le 1er juillet 2014, souligne Jean-François Chanal, président de la SNLVLD. Ce décret rétablit la totalité du bonus accordé aux véhicules électriques achetés en LLD ou en LOA.» Les véhicules hybrides sont pour leur part en plein essor. D’après l’OVE, leur part de marché est passée de 0,6 % en 2011 à 2,61 % en 2013 (soit 46 800 véhicules immatriculés en 2013). Les hybrides essences sont très majoritaires, avec 32 844 unités. Largement dominé par Toyota avec ses Yaris, Auris et Prius, le marché des hybrides est désormais convoité par tous les constructeurs : Peugeot 3008 et 508, Citroën DS5, Honda Jazz, Lexus IS, Lexus RX et Lexus CT 200H. La montée en puissance des hybrides dans les parcs automobiles pourrait néanmoins être freinée par le développement des véhicules essence de plus en plus performants et qui, par ailleurs, émettent de moins en moins de CO2. D’autre part, sur ce marché naissant, il demeure difficile d’estimer la valeur résiduelle de ces véhicules, justifiant la prudence des entreprises à leur égard.

 

Les comportements de conduite surveillés de près

Le gestionnaire de flotte ne doit cependant pas s’arrêter aux choix d’une motorisation et d’un modèle de véhicules pour optimiser le coût de son parc. En effet, le comportement de conduite des conducteurs est également un paramètre de poids à prendre en considération dans le coût global d’un véhicule. «L’entreprise peut négocier de meilleures remises avec les constructeurs et/ou les loueurs, mais cela ne suffira pas à optimiser le coût de sa flotte si, en parallèle, elle ne se penche pas sur le comportement de conduite de ses collaborateurs, estime Monique Buntic. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il est aujourd’hui unanimement reconnu que le coût d’usage du véhicule est celui qui reflète le mieux le coût total d’une voiture dans la durée.» Avec le coût d’usage, l’objectif consiste à prendre en considération, dans le calcul du prix de revient du véhicule, des éléments liés au comportement de conduite du conducteur, tel les frais de remise en état, l’entretien du véhicule, la sinistralité, la consommation de carburant, la gestion des amendes, etc. «Les entreprises ont la possibilité d’activer des leviers d’optimisation des coûts sur chacun de ces postes de dépenses, précise Monique Buntic. Par exemple, des formations à l’éco‑conduite permettent d’agir sur les coûts de carburant, d’entretien, de pneumatiques mais aussi sur ceux liés à la sinistralité, aux assurances et frais de remise en état.» Selon l’Observatoire du véhicule d’entreprise (OVE),le conducteur est ainsi responsable de 25 % des coûts d’utilisation d’un parc automobile. Pas étonnant que les entreprises multiplient les formations à l’éco‑conduite…

Questions à… Théophane Courau, dirigeant de FATEC

 Alors que la professionnalisation de la gestion de flotte continue de progresser, de plus en plus d’entreprises choisissent de se tourner vers des fleet managers en complément des prestations apportées par les loueurs longue durée.

Quelles sont les missions d’un fleet manager ?

Le fleet manager a pour vocation d’accompagner l’entreprise dans la gestion administrative de ses véhicules et veille également à la bonne application des contrats avec les différents prestataires (assureurs, compagnies pétrolières, pneumaticiens, loueurs, constructeurs, etc.). Il assure également l’entretien et la réparation des véhicules, et apporte un reporting consolidé sur toutes les dépenses liées aux véhicules.

Quelle est la différence entre un fleet manager et un loueur longue durée ?

Le fleet manager est indépendant des constructeurs automobiles, établissements financiers et réseaux d’entretien. Il apporte une prestation homogène, simplifiée et complète avec tous les prestataires choisis. De plus, le fleet manager facture l’entretien au réel, là ou les loueurs proposent une facturation au forfait, sous forme de loyer.

Quels sont les profils d’entreprises se tournant vers les fleet managers ?

Les grandes entreprises, telles que La Poste, SNCF, EDF mais également l’Etat ont été précurseurs en termes de fleet management. Après les entreprises disposant de quelques milliers de véhicules en parc, ce sont aujourd’hui les PME de 100 à 500 véhicules qui s’y intéressent.

La location longue durée toujours plébiscitée

Fin juin 2014, près de 1 196 600 véhicules étaient en location longue durée, estime la SNLVLD. Au deuxième trimestre, ce marché est ainsi en croissance de 3,6 % par rapport à la même période l’an passé. Une tendance qui devrait se confirmer en fin d’année. «L’offre des loueurs longue durée continue de séduire les entreprises, au regard de la complexité grandissante de la fiscalité et de l’évolution permanente des modèles constructeurs, estime Jean-François Chanal, président du SNLVLD. Ainsi, bien que les grandes entreprises stabilisent, voire diminuent un peu leur parc en location, notamment en raison de baisses d’effectifs dans certains secteurs, à l’inverse, PME, TPE et indépendants tendent à y avoir de plus en plus recours.» Au-delà du financement, les entreprises sont en effet séduites par les différentes prestations de conseil proposées par les loueurs longue durée, notamment quant au choix des véhicules. «Le loueur saura conseiller sur le choix du véhicule, en fonction des usages auquel il est destiné et de sa fiscalité, sur les services à mettre en place et sur la durée de location et le kilométrage», ajoute Jean-François Chanal. 

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