La lettre de l'immobilier

Dossier - Vers un immobilier industriel attractif ? 

La notion d’établissement industriel selon Dutronc

Publié le 9 février 2024 à 16h51

CMS Francis Lefebvre    Temps de lecture 4 minutes

Par Alexis Bussac, avocat associé en fiscalité. Il intervient tant en conseil qu’en contentieux particulièrement en matière de fiscalité locale.

La réindustrialisation française prend parfois des formes bien subtiles.

Initialement réservée aux locaux impliqués dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers impliquant l’utilisation de moyens techniques importants, la qualification en établissement industriel a subi des évolutions.

Etablissement industriel, définition

Le Conseil d’État a étendu la définition des établissements industriels aux locaux où s’exerce toute activité qui exige d’importants moyens techniques et pour lesquelles le rôle de ces installations techniques est prépondérant1. La Loi de finances pour 2019 a officialisé cette définition et en ajoutant un seuil de 500 000 euros de prix de revient des matériels et outillages, en dessous duquel les immeubles restent évalués en méthode tarifaire.

La subjectivité de ce critère de prépondérance a donné lieu à une conception de plus en plus extensive. Sa caractérisation par la jurisprudence passant de l’exigence de la démonstration d’une automation à la simple mécanisation du process pour enfin retenir le recours à des logiciels de gestion de stocks dès lors qu’il permet d’augmenter les flux logistiques. Force est de constater que la jurisprudence validait quasi systématiquement les requalifications.

Or, cette requalification a une incidence directe sur les bases imposables à la taxe foncière et de la cotisation foncière des entreprises (CFE). Celles-ci sont évaluées différemment selon que le local est qualifié d’établissement commercial ou industriel. Dans le premier cas, la valeur locative foncière est calculée selon la méthode tarifaire (2) en appliquant aux surfaces du local un tarif au m². En cas de qualification industrielle, elle sera déterminée selon la méthode comptable (3) c’est-à-dire en appliquant un pourcentage au prix de revient actualisé des immobilisations foncières.

La problématique des requalifications, une dynamique bouleversée

Cette problématique des requalifications a été prégnante dans le domaine de la logistique, où le changement de méthode conduisait à des bases systématiquement plus élevées. Cependant, deux événements ont bouleversé cette dynamique.

Jusqu’en 2017, le tarif applicable aux locaux commerciaux correspondait au loyer en 1970 d’un local type dont les caractéristiques devaient se rapprocher de celles du local à évaluer. L’actualisation annuelle de ce tarif était déconnectée de l’évolution réelle du marché. Depuis 2017, le tarif correspond au loyer moyen pratiqué l’année d’imposition pour une catégorie d’activité et un secteur géographique donnés, offrant ainsi une plus grande cohérence avec le marché locatif.

Quatre ans plus tard, la loi de finance pour 2021 a réduit de 50 % les bases imposables des locaux industriels évalués selon la méthode comptable.

Cet effet de ciseau lié à l’augmentation des bases calculées selon la méthode tarifaire et la réduction simultanée de celles calculées selon la méthode comptable, peut inciter les opérateurs à demander la requalification en locaux industriels en se basant sur les critères jurisprudentiels extensifs. Or, l’Administration rechigne désormais à y consentir quand cela est favorable au contribuable

Si la qualification commerciale des entrepôts retrouve de sa vigueur dans des décisions considérant que l’automatisation de la préparation des commandes redevient déterminante et que la gestion informatique à 95 % des marchandises (4) ou la présence de chambres froides (5) n’emportent plus nécessairement la requalification du site industriel, l’uniformisation de la notion n’est pas acquise.

Ainsi, dans un sens inverse, il a été considéré qu’un nombre très réduit d’engins de manutention et la faiblesse du flux logistique ne permet pas de contester cette requalification (6).

Opportunisme comme le chantait Jacques Dutronc ? Peu importe le sens de la veste pourvu qu'elle soit bien garnie.

1. CE, 22/07/2005 n°261899, Miroline.

2. CGI art. 1498.

3. CGI art. 1499.

4. CAA de PARIS, 7ème chambre, 22 février 2023, 21PA05055 et CAA Nancy, 11 mai 2023, n°21NC00954 ; Phoenix Pharma.

5. CE, 1 juin 2023, n°448931.

6. CAA de BORDEAUX, 4ème chambre, 28 septembre 2023, 21BX03956, Rip Curl.


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