L'analyse Jean-Paul Betbèze

Quelles bonnes nouvelles en 2019 ?

Publié le 4 janvier 2019 à 14h57    Mis à jour le 4 janvier 2019 à 17h55

Jean-Paul Betbèze

Aucune hausse de taux en 2019 ? Pas tout à fait, mais moins que prévu aux Etats-Unis. Jerome Powell, le patron de la Banque centrale américaine, annonce le 19 décembre 2018 qu’il y aura deux hausses (au plus), pas trois, en 2019, cela étant fonction de la situation. Il est devenu «data dependent», la «forward guidance» est oubliée dans ce monde plein de contre-courants ! Ensuite, en 2020, une seule hausse, puis plus rien en 2021. Le point bas du taux d’équilibre («taux neutre») serait «touché» à 2,3 %, montant graduellement à 2,9 % en 2019 puis 3,1 % en 2020 et 2021. Jerome Powell a ainsi raboté son rythme de hausses (2, 1, 0) et, surtout, avoué avoir atteint la limite basse de son objectif, à 2,3 % !

Aucune hausse en 2019 pour la BCE : moins d’inflation, car moins de croissance. Mario Draghi cite les prévisions d’inflation de l’Eurosystème : 1,8 % en 2018, 1,6 % en 2019, 1,7 % en 2020, 1,8 % en 2021, et note, avec humour sans doute, que l’on s’approche ainsi de l’objectif tant rêvé, «inférieur mais proche de 2 % à moyen terme». Pour commencer sans doute à monter les taux. En 2021 ?

Un baril à 40 dollars ? La bonne histoire continue, avec la baisse du prix du pétrole au-dessous de 50 dollars le baril de WTI à fin décembre. La remontée des prix, tant attendue par l’Opep avec la reprise économique mondiale, s’est en effet arrêtée à 75 dollars le baril, en septembre 2018. Le retournement est venu des inquiétudes nées de la croissance mondiale, à la suite des tensions commerciales et géopolitiques largement initiées par Donald Trump, et tout autant de la production américaine («pétrole classique» plus «pétrole de schiste») qui en fait la première du monde. L’Opep essaie de réduire la production du cartel pour que son prix remonte, en dépit des remarques opposées de Donald Trump. Il souhaite, lui, plus de pétrole, donc moins cher, pour avoir plus de croissance et moins d’inflation (chez lui ?). Qu’importent les autres exportateurs, pour qui ce prix est essentiel ! La baisse de 1,2 million de barils/jour, promise par l’Opep, est jugée inférieure à «ce qu’il fallait» pour retourner les marchés (1,4 million). Donc le prix baisse. L’Arabie saoudite produira moins, pour dire qu’elle fait son travail de chef de cartel, mais pas suffisamment pour irriter Donald Trump (avec qui les relations sont devenues plus complexes).

Un accord signé avec la Chine sur les droits de douane et plus encore sur les droits de propriété ? Pourquoi pas ? Les responsables chinois vont évidemment poursuivre leur stratégie de long terme, «les routes de la soie», pour avoir une croissance moins tributaire de leurs exportations vers les Etats-Unis, moins tributaire aussi des crédits à long terme qu’ils accordent à des pays africains pour y construire des ports, des autoroutes et des voies ferrées. Mais, d’un autre côté, la Chine ne peut pas prendre le risque de trop ralentir et de voir ses avancées technologiques freinées par des embargos des Américains et de ses proches alliés.

La Turquie et l’Iran, plus «compréhensifs» après les effondrements de leurs taux de change par rapport au dollar (- 50 % pour l’Iran, - 40 % pour la Turquie) ? Les guerres douanières et financières américaines commenceraient-elles à porter leurs fruits ? La Suisse va lancer un système de paiements approuvé par les Etats-Unis (et l’Europe) pour acheter des médicaments, des produits médicaux et alimentaires. La Turquie va acheter des missiles Patriot. Dégels ?

L’Italie est en train de signer un accord sur son budget avec la Commission européenne. Le rendement du bon du Trésor à 10 ans, qui était à 3,7 % fin octobre, va vers 2,7 % fin décembre !

Tout ira donc mieux en 2019 ? Pourquoi pas, en songeant aux discours catastrophiques qui nous entourent. Bien sûr, dans ce monde assez fou, tout peut brutalement chuter. Mais on peut penser aussi que la peur du précipice, le «no deal» dans le cas du Brexit, pourrait pousser à un deuxième référendum.

Et en France ? Difficile en fonction des «gilets jaunes», entre projet macronien de grand débat national et tentatives de déstabilisation qui peuvent passer par les élections européennes, avec des penchants extrêmes ! Tout se jouera dans les têtes : des salariés qui peuvent être plus consommateurs ou plus épargnants, des patrons qui se plaignent de ne pas trouver de candidats compétents, et qui décideraient d’attendre. La bonne nouvelle de 2019 dépendra de nous : dépensons les hausses de salaires en produits français !

Jean-Paul Betbèze Professeur émérite de l’université Panthéon Assas ,  Panthéon Assas

Jean-Paul Betbèze, économiste, diplômé d’HEC, docteur d’Etat agrégé de sciences économiques. Il a commencé sa carrière dans l’enseignement en tant que professeur d’université, notamment à Paris II-Panthéon Assas à partir de 1987. Entré en 1986 comme directeur d’études au Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Credoc), il rejoint trois ans plus tard le Crédit Lyonnais comme directeur des études économiques et financières, puis en 1995, comme directeur de la stratégie. En 2003, il est promu conseiller du président et du directeur général de Crédit Agricole, puis directeur des études économiques et chef économiste. Il a crée sa propre structure de conseil en 2013. Membre du Cercle des économistes.

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