La lettre gestion des groupes internationaux

La Lettre Gestion des Groupes internationaux - Juillet 2023

Siège de direction effective d’une société et crédit d’impôt : quel traitement fiscal en cas de requalification d’un flux transfrontalier en flux domestique ?

Publié le 30 juin 2023 à 11h20

PwC Société d'Avocats    Temps de lecture 18 minutes

Récemment amené à se prononcer sur l’éligibilité de dividendes perçus par un personne physique domiciliée en France au crédit d’impôt prévu par la convention fiscale franco-luxembourgeoise1, le Conseil d’Etat a apporté à cette occasion d’intéressantes précisions sur la possibilité, pour les contribuables personnes physiques, de déduire l’impôt prélevé à la source lorsque ce dernier ne donne pas lieu à l’imputation d’un crédit d’impôt. La décision vient aussi compléter utilement la jurisprudence en ce qui concerne les modalités d’appréciation du lieu du siège de direction effective d’une société (CE 15 mars 2023 n° 449723, M. A d’Espous).

Par Valérie Aelion, avocat, PwC Société d’Avocats, Marie-Hélène Pinard-Fabro, avocat, PwC Société d’Avocats et Coralie Plessis, PwC Société d’Avocats

Rappel des faits

La société française CA Animation, active dans le secteur agroalimentaire, a transféré son siège social au Luxembourg en 2005 et distribué des dividendes au cours des années suivantes.

Un litige est survenu entre l’administration fiscale et le dirigeant et actionnaire de la société, domicilié en France, concernant les modalités d’assujettissement à l’impôt sur le revenu des dividendes versés par la société.

Le Luxembourg ayant prélevé une retenue à la source sur les distributions en cause, la possibilité d’imputer le crédit d’impôt correspondant sur l’impôt français était conditionnée par l’applicabilité de la convention fiscale franco-luxembourgeoise. Cette dernière précisait dans son article 4 que « Le domicile fiscal (…) des personnes morales (…) est au lieu de leur centre effectif de direction, ou si cette direction effective ne se trouve ni dans l’un ni dans l’autre des Etats contractants, au lieu de leur siège ».

L’administration, estimant que le siège de direction effective de la société était demeuré en France, considérait que la société n’était pas domiciliée au Luxembourg au sens de la convention. Elle refusait en conséquence au contribuable l’imputation, sur son impôt français, du crédit d’impôt correspondant à la retenue à la source prélevée au Luxembourg. Ainsi, la solution du litige dépendait de la localisation du siège de direction effective de la société :

– si ce dernier était situé au Luxembourg, le crédit d’impôt luxembourgeois pouvait valablement être imputé sur l’impôt français.

– si en revanche le siège de direction effective de la société était situé en France, il n’existait pas de fondement juridique autorisant l’imputation du crédit d’impôt.

D’intéressantes précisions sur l’appréciation du siège de direction effective

Le lieu du siège de direction effective se déduit d’un faisceau d’indices …

Dans sa décision du 15 mars 2023, le Conseil d’Etat considère que le centre effectif de direction de la société distributrice se situe en France, confirmant la solution retenue par la cour administrative d’appel (CAA Marseille 15 décembre 2020 n° 18MA01293) qui avait analysé des indices de plusieurs ordres :

– En ce qui concerne les moyens matériels et humains disponibles au Luxembourg, la société avait conclu un contrat de bail portant sur un local de 13 m2 situé à l’adresse de la société bailleresse qui exerçait, entre autres, une activité de domiciliation. Elle avait, durant la période en litige, pour unique administrateur, le dirigeant de cette même société de domiciliation, et son unique salarié, occupant des fonctions de comptable à raison de 10 heures par semaine, était également salarié de la société de domiciliation ;

– En ce qui concerne la gestion financière, comptable et fiscale de la société, il ressortait des éléments du dossier que des ordres de mouvement de titres et des ordres de virement bancaires étaient émis depuis l’adresse parisienne de plusieurs autres sociétés du même groupe, que les relevés de comptes bancaires de la société étaient adressés à un cabinet comptable situé également à Paris, par lequel transitaient également les déclarations de TVA de la société, avant leur dépôt au Luxembourg ;

– En ce qui concerne la gestion opérationnelle de la société, la cour avait relevé que les deux co-fondateurs et administrateurs de la société, statutairement habilités à l’engager et par ailleurs mandataires sociaux d’autres sociétés du groupe exerçant leur activité en France, avaient signé pendant la période litigieuse des conventions cadre d’apport d’affaires et des avenants avec différentes sociétés du groupe spécialisées, notamment, dans l’alimentation.

La faiblesse des moyens matériels et humains au Luxembourg, le fait que les représentants légaux de la société soient domiciliés en France, y aient exercé leurs fonctions en signant des contrats pour le compte de cette dernière et que la gestion financière, comptable et fiscale de la société ait également été réalisée depuis la France, ont ainsi convaincu les juges de la localisation en France du siège de direction effective de la société, alors même que cette dernière tenait ses assemblées générales et ses conseils d’administration au Luxembourg.

Cette décision, tout en confirmant au travers d’un exemple très illustratif que la localisation du siège de direction effective d’une société est apprécié par les juges au travers d’un faisceau d’indices, précise aussi qu’à l’instar du lieu de tenu des conseils d’administration, le lieu de tenue des assemblées générales d’une société n’est pas déterminant à lui seul pour fixer ce lieu du siège de direction effective, aucune dérogation n’étant prévue en ce qui concerne les sociétés exerçant une activité de holding pure. Une discrète ouverture, dans les conclusions du rapporteur public Laurent Domingo, quant à la situation de ces dernières, mérite toutefois d’être soulignée.

…  en résonnance avec la définition de ce concept par les commentaires OCDE …

Dans le cadre de l’ancienne convention franco-luxembourgeoise de 1958, la notion de siège de direction effective était le critère essentiel d’identification du domicile fiscal (ce terme étant généralement remplacé par celui de résidence fiscale dans la plupart des conventions fiscales signées par la France, notamment dans la nouvelle convention franco-luxembourgeoise du 20 mars 2018). Cette notion conditionnait donc le champ d’application de la convention au regard des personnes concernées.

Dans le cadre de la convention actuelle, le critère principal de la résidence est devenu, conformément au modèle de convention OCDE, celui de l’assujettissement à l’impôt d’une personne « en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction, de son lieu d’exploitation ou de tout autre critère de nature analogie ». La notion de siège de direction effective conserve cependant son intérêt dans le cadre de cette convention plus récente, où elle reste utilisée en vue de départager la France et le Luxembourg lorsqu’une personne morale se trouve en situation de double résidence. Elle présente en outre un intérêt bien plus large, dès lors qu’elle figure dans bon nombre de conventions fiscales autres que la convention franco-luxembourgeoise, et qu’elle se confond presque parfaitement avec celle de siège réel, laquelle régit les questions de territorialité de l’impôt français (V. notamment en ce sens les conclusions d’Aurélie Bretonneau sous CE 16 avril 2012 n° 323592, Paupardin), l’administration ayant précisé à ce sujet que « Le siège réel correspond au siège de direction effective visé dans la plupart des conventions internationales conclues avec la France (BOI-IS-CHAMP-60-10-20 n° 1).

Les commentaires relatifs à l’article 4 du modèle de convention OCDE dans sa version de 2003 (§24) ont défini le siège de direction effectif comme « le lieu où sont prises, quant au fond, les décisions clés sur le plan de la gestion et sur le plan commercial qui sont nécessaires pour la conduite des activités de l›entité. Le siège de directive effective sera d›ordinaire le lieu où la personne ou le groupe de personnes exerçant les fonctions les plus élevées (par exemple un conseil d›administration) prend officiellement ses décisions, le lieu où sont arrêtées les mesures qui doivent être prises par l’entité dans son ensemble. Toutefois, il n›est pas possible d›établir une règle précise, et tous les faits et circonstances pertinents doivent être pris en compte pour déterminer le siège de direction effective. Une entité peut avoir plus d›un siège de direction, mais elle ne peut avoir qu›un seul siège de direction effective ».

Cette définition a été prise en compte par les juges, lorsqu’ils ont eu à se prononcer sur cette notion. Ainsi, à l’occasion d’une décision de 2006, le commissaire du gouvernement Laurent Vallée faisait référence dans ses conclusions, pour définir la direction effective, au « lieu où se trouve le centre stratégique de la société, d›où partent, en règle générale, les impulsions directrices de ses affaires et où se localisent, en fait, principalement ses organes de direction, d›administration et de contrôle » (conclusions sous CE 5 avril 2006, n° 281098).

Le Conseil d’Etat ne s’est véritablement prononcé qu’en 2012, en jugeant, s’agissant du siège de la direction effective d’une entreprise exploitant des navires en trafic international, dans le cadre de la convention conclue entre la France et la Nouvelle-Zélande, qu’il s’agissait du « lieu où les personnes exerçant les fonctions les plus élevées prennent les décisions stratégiques qui déterminent la conduite des affaires de cette entreprise dans son ensemble » (CE 16 avril 2012 n° 323592, précité).

Cette définition a par la suite été reprise dans l’arrêt CE 7 mars 2016 n° 371435, Société Compagnie Internationale des Wagons-Lits, où était en cause un simple siège de direction (et non un siège de direction effective), ainsi que par la cour administrative d’appel de Marseille dans la présente affaire. Pour statuer, le juge confronte à la définition ainsi formulée l’ensemble des indices matériels permettant justifier du lieu d’exercice de l’activité, comme l’ont fait la cour administrative d’appel et le Conseil d’Etat dans la présente affaire.

Les indices formels tels que les conseils d’administration ou les assemblées générales ne sont pas déterminants …

La décision du Conseil d’Etat du 15 mars 2023 s’inscrit pleinement dans le cadre posé par la jurisprudence antérieure, en confirmant une nouvelle fois la prise en compte par les juges d’un faisceau d’indices pour statuer sur le lieu d’un siège de direction effective, et en réaffirmant que si le lieu de tenue des conseils d’administration et des assemblées générales a nécessairement valeur d’indice, il ne saurait s’avérer déterminant à lui seul.

La Cour administrative d’appel de Marseille, s’appuyant sur l’arrêt Société Compagnie Internationale des Wagons-Lits précité, avait déjà jugé dans la présente affaire que « si les conseils d’administration et les assemblées générales des actionnaires concernant la société avaient lieu au Luxembourg, le lieu où se tiennent les conseils d’administration d’une société peut constituer un indice pour l’identification d’un siège de direction, ce seul élément ne saurait, confronté aux autres éléments du dossier, suffire à le déterminer », . Comme l’avait à l’époque relevé Aurélie Bretonneau dans ses conclusions, la jurisprudence entend en effet, en matière de siège de direction effective, faire preuve de réalisme en s’attachant aux circonstances de fait pour déjouer les apparences.

Poursuivant ce cap, le Conseil d’Etat confirme que le lieu formel de tenue des réunions des organes sociaux ne peut suffire à démontrer l’existence d’un siège de direction effective en ce lieu, sauf à être accompagné d’autres indices. Cette solution, qui préexistait dans l’arrêt précité Société Compagnie Internationale des Wagons-Lits pour les conseils d’administration, est étendu par la présente décision aux assemblées générales.

… même pour une holding pure

Soulignons que la société en cause exerçait une activité de holding pure, ce qui n’est pas sans rappeler un autre aspect de l’arrêt Société Compagnie Internationale des Wagons-Lits, qui concernait une activité de holding.  Dans cette affaire, la société redressée défendait que, dans l’hypothèse d’une activité de holding pure n’impliquant que des structures administratives légères, le lieu de direction se trouve au lieu où se situe le centre nerveux et où s’organise donc l’essentiel de la vie de l’entreprise, à savoir le lieu où se tiennent les conseils d’administration.

Dans ses conclusions, Aurélie Bretonneau avait énergiquement écarté cet argument en indiquant que « s’il suffisait à une holding (…) de délocaliser la tenue de ses conseils d’administration dans le pays de son choix pour y délocaliser aussi ses bénéfices imposables, c’est l’optimisation fiscale, plus que la sécurité juridique, qui en sortirait grandie ».  Elle avait toutefois tempéré cette réflexion en reconnaissant que, dans l’hypothèse où les conseils d’administration se dérouleraient de façon récurrente dans le même lieu, ce lieu étant également celui d’autres activités de direction, cette circonstance lui semblerait un indice pertinent de la fixité en ce lieu de l’installation d’affaires.

Bien que non expressément abordée dans la présente décision, l’importante question de la spécificité des sociétés holding au regard de la substance avait également été évoquée par le contribuable. Ce dernier soutenait dans son pourvoi que la cour administrative d’appel avait commis une erreur de droit en ne tenant pas compte, dans son appréciation des faits, de la circonstance que la société était une holding pure, ce qui lui permettait de fonctionner avec des moyens humains et matériels limités.

Dans ses conclusions, Laurent Domingo estime avec une rigueur certaine que l’arrêt d’appel n’a pas lieu d’être censuré pour erreur de droit à cet égard. Il relève cependant, de manière presque surabondante, que la cour n’a pas exigé que le centre de direction effective, même pour une holding, soit nécessairement de grande taille et occupé par plusieurs administrateurs et de nombreux salariés. Le rapporteur public souligne ainsi que la cour a simplement recherché si l’installation matérielle et l’implication humaine au Luxembourg avaient une consistance minimum, c’est-à-dire que s’y trouvaient « les services nécessaires à l’activité de holding », reprenant l’expression employée par Aurélie Bretonneau dans ses conclusions sous l’arrêt Société Compagnie Internationale des Wagons-Lits.

On peut espérer identifier au travers de ces conclusions la reconnaissance, au moins implicite, de la nécessité de proportionner les exigences de substance, lorsqu’est en cause une société holding. Une telle question devient à l’évidence cruciale alors que la proposition de directive Atad 3, établissant des règles destinées à empêcher l’utilisation abusive d’entités écrans à des fins fiscales subit une gestation difficile, en raison notamment, mais pas seulement, des difficultés qu’elle pose au regard des sociétés holdings qui peuvent, sans disposer de beaucoup de substance, exister pour des motifs commerciaux valables et non pour obtenir des avantages fiscaux.

Le sort de la retenue à la source subie à l’étranger par le contribuable

Pour le contribuable, la conséquence de l’existence d’un siège de direction effectif en France était imparable. Si l’on considère que la société qui a opéré la distribution est domiciliée non pas au Luxembourg mais en France, nous sommes alors en présence d’une distribution franco-française à laquelle sont attachées les effets suivants : premièrement, la retenue à la source à la source a été prélevée à tort et deuxièmement, il n’y a pas lieu de faire jouer la clause d’élimination de la double imposition de la convention franco-luxembourgeoise puisque la retenue à la source ne relève pas de ladite convention.

Anticipant la décision des juges, le contribuable avait, à titre subsidiaire, demandé que la retenue à la source prélevée à l’étranger puisse, à défaut d’ouvrir droit à un crédit d’impôt de même montant, être déduite de son revenu imposable en France. Cette demande s’appuyait sur les dispositions des articles 120 et 122 du CGI qui concernent les modalités d’imposition en France des valeurs mobilières émises hors de France.

L’article 120 précise à cet égard que sont notamment imposables à ce titre « 1° Les dividendes, […] des sociétés, compagnies ou entreprises financières, industrielles, commerciales, civiles et généralement quelconques dont le siège social est situé à l’étranger… ». Ainsi, le critère d’appréciation de l’origine des dividendes est constitué par le lieu du siège social de la société distributrice.

Par ailleurs, selon l’article 122, « le revenu est déterminé par la valeur brute en euros des produits encaissés d’après le cours du change au jour des paiements, sans autre déduction que celle des impôts établis dans le pays d’origine et dont le paiement incombe au bénéficiaire ». Le revenu imposable est donc, selon ces dispositions, un revenu net de l’impôt étranger.

Dans la mesure où le critère d’appréciation de l’origine des dividendes est constitué par le lieu du siège social de la société distributrice, il était possible de considérer que les dividendes versés par la société luxembourgeoise, dont le siège est effectivement situé au Luxembourg, étaient bien d’origine luxembourgeoise et ce alors même qu’au regard de la convention fiscale les dividendes étaient considérés comme distribués dans un cadre franco-français.

La Cour administrative d’appel de Marseille avait écarté l’application de ces dispositions sans aucune motivation. Le Conseil d’Etat a pour sa part examiné la situation du contribuable au regard du droit interne. Il a ainsi analysé les dispositions de l’article 122 et relevé à ce titre que le contribuable avait effectivement supporté la charge fiscale qui pesait sur la distribution des dividendes et qu’ainsi les dispositions de l’article 122 lui étaient applicables Il en a conclu que le contribuable pouvait déduire des dividendes reçus les retenues à la source prélevées à l’étranger, après avoir en outre noté que la convention fiscale franco-luxembourgeoise ne contenait aucune disposition faisant obstacle à la déduction de la retenue à la source. Il a en conséquence censuré pour erreur de droit l’arrêt de la Cour administrative d’appel sur cette question.

C’est la première fois à notre connaissance que le Conseil d’Etat se prononce sur la déduction du revenu imposable à l’impôt sur le revenu d’un impôt étranger acquitté en dehors du cadre conventionnel. Pour mémoire, en matière d’imposition des bénéfices des entreprises, le Conseil d’Etat a d’ores et déjà validé cette solution notamment dans une décision du 20 novembre 2022 (n° 230530, SA Etablissements Soulés et Cie).

Il est intéressant de noter que la présente décision a été rendue sous l’empire de l’ancienne convention luxembourgeoise du 1er avril 1958 qui, comme on l’a vu, ne fait pas obstacle à la déduction de la retenue à la source du revenu imposable. En revanche, la nouvelle convention franco-luxembourgeoise du 20 mars 2018, entrée en vigueur le 19 août 2019, prévoit expressément dans son article 22 relatif à l’élimination des doubles impositions que s’agissant des résidents de France soumis à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés, « L’impôt luxembourgeois n’est pas déductible pour le calcul de l’impôt dû ».

Il nous semble qu’en dépit de de la présence d’une telle clause, le contribuable aurait néanmoins pu obtenir gain de cause sous l’empire de cette nouvelle convention dès lors que le Conseil d’Etat a écarté l’application de la convention.

On relèvera pour finir, comme l’a souligné le rapporteur dans ses conclusions sous cette décision, qu’une autre voie s’offrait au contribuable pour obtenir gain de cause. Ce dernier aurait en effet pu demander auprès des autorités fiscales luxembourgeoises la décharge de la retenue à la source appliquée à tort. Le succès d’une telle démarche n’était toutefois pas garanti dès lors que les autorités luxembourgeoises ne sont pas tenues par la position retenue par les autorités fiscales françaises (ni par le juge français) et pourraient considérer qu’au regard du droit luxembourgeois, la direction effective de la société distributrice se situe bien au Luxembourg, la retenue à la source litigieuse étant, en conséquence, prélevée conformément aux dispositions de la convention fiscale.

Il nous semble en outre qu’en parallèle de cette démarche, il aurait également pu être envisagé pour le contribuable de recourir à la procédure amiable prévue par l’article 24 de la convention franco-luxembourgeoise (dans sa version applicable à l’époque des faits). Cette procédure constitue une voie de recours non juridictionnelle spécifique qui permet à un contribuable de saisir les autorités fiscales de l’’État de sa résidence pour lui demander de se rapprocher des autorités de l’autre Etat afin de rechercher une solution pour mettre fin à la double imposition résultant de l’interprétation divergente de la convention par les deux Etats. Le succès de cette procédure n’est jamais garanti, les autorités compétentes n’ayant pas l’obligation de parvenir à un accord. On notera à cet égard que la nouvelle convention entre la France et le Luxembourg signée en 2018 prévoit dans son article 24 § 5, et conformément à la Convention modèle OCDE de 2008, que les questions non résolues, soulevées dans le cadre de la procédure amiable doivent être soumises à l’arbitrage des autorités si le contribuable en fait la demande. Enfin, on mentionnera pour brosser un tableau complet des recours envisageables, que pour les différends relatifs à des revenus perçus depuis le 1er janvier 2018 les contribuables ont en outre la possibilité de demander la mise en œuvre de la Directive (UE) 2017/1852 du 10 octobre 2017 concernant les mécanismes de règlement des différends fiscaux dans l’Union européenne. 


La lettre gestion des groupes internationaux

L’impact en France des régimes étrangers relatifs aux sociétés étrangères contrôlées

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En 2015, l’OCDE (1) a publié les rapports finaux sur le projet BEPS (2) et a recommandé l’adoption par les Etats de mesures fiscales visant à s’assurer que les entreprises payent leurs impôts dans les juridictions où leurs bénéfices et leur valeur ajoutée sont générés. A la suite de cette publication, l’Union européenne (UE) a adopté une série de mesures permettant de lutter contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert indus de bénéfices. La directive ATAD (3) a ainsi imposé aux Etats membres de l’UE d’introduire dans leur législation un socle minimum de lutte contre certaines pratiques fiscales agressives.

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