La lettre de l'immobilier

Juin 2014

Copropriété : les nouvelles dispositions

Publié le 10 juin 2014 à 12h16

Jean-Luc Tixier

La loi ALUR, publiée au Journal officiel le 24 mars 2014, consacre la majeure partie de son Titre II à la copropriété. Les très nombreuses nouvelles dispositions la concernant ne sont pas pour autant toutes insérées dans la loi du 10 juillet 1965. Plusieurs constituent un nouveau Livre VII du Code de la construction et de l’habitation (CCH) ; le statut de la copropriété se trouve désormais régi par la loi du 10 juillet 1965 modifiée et par ledit Code.

Par Jean-Luc Tixier, avocat associé, spécialisé en droit immobilier et droit public.

La lutte contre la dégradation des copropriétés s’articule autour de deux chapitres ayant pour rôle de «repérer et prévenir l’endettement et la dégradation des copropriétés» et de «redresser efficacement les copropriétés dégradées». L’objectif affiché est l’action en amont afin de prévenir les difficultés, mais aussi la mise à disposition de meilleurs moyens d’action pour remédier aux situations de dégradations.

La prévention des difficultés dans la copropriété

La loi ALUR met en place divers mécanismes dont la finalité est d’empêcher la survenance de difficultés. Parmi eux figurent une procédure d’immatriculation des copropriétés, une meilleure information des acquéreurs de lots, des dispositions relatives à la gouvernance et à la gestion de la copropriété, mais aussi des dispositions qui visent à prévenir les dégradations et à faciliter la réalisation des travaux de conservation de l’immeuble.

  • Immatriculation des copropriétés

Les nouveaux articles L. 711 et suivants du Code de la construction et de l’habitation sont relatifs à l’immatriculation tant des immeubles relevant du statut de la copropriété que des syndicats de copropriétaires. Ils prévoient la création d’un registre d’immatriculation pour les immeubles à destination totale ou partielle d’habitation, tenu par un établissement public de l’Etat ; dans ce registre figureront les nom, adresse et date de création du syndicat, les nombre et nature des lots, ainsi que le nom du syndic ; les procédures d’alerte en cours, les données essentielles relatives à la gestion et aux comptes du syndicat pour chaque exercice comptable ainsi que les données relatives au bâti y seront aussi mentionnées.

  • L’information des acquéreurs des lots de copropriété

Pour tout immeuble à destination totale ou partielle d’habitation, le syndic devra établir une fiche synthétique de la copropriété, regroupant les données financières et techniques essentielles. Son contenu sera défini par décret et devra être mis à jour annuellement. Les annonces relatives à la vente d’un lot ou d’une fraction de lot d’un immeuble soumis au statut de la copropriété doivent désormais mentionner le montant moyen annuel de la quote-part du vendeur dans le budget prévisionnel correspondant aux dépenses courantes.

Les procédures d’alertes devront le cas échéant être mentionnées. L’article L. 721-2 du CCH dresse une liste des documents qui doivent être annexés aux promesses de vente ou vente de droits réels immobiliers à usage partiel ou total d’habitation au rang desquels figurent notamment le carnet d’entretien, le diagnostic technique global et le plan pluriannuel de travaux. Le délai de rétractation dont bénéficie l’acquéreur non professionnel d’un immeuble d’habitation (CCH art L. 271-1 et L. 271-2) ne commencera à courir qu’au lendemain de la communication de ces documents. Les actes constatant la promesse de la vente ou la vente d’un lot de copropriété devront désormais mentionner, outre la superficie de la partie privative, la surface habitable de cette dernière.

  • Gouvernance et gestion de la copropriété

La loi nouvelle prévoit diverses dispositions relatives au syndic, à la dématérialisation ou encore aux assemblées générales. Un compte bancaire séparé doit être ouvert au nom du syndicat, seules les copropriétés de moins de 15 lots en étant dispensées. Il est fait interdiction au syndic d’avancer des frais au syndicat des copropriétaires. Concernant la rémunération du syndic, celle-ci est déterminée de manière forfaitaire, sauf possibilité prévue par décret de prévoir une rémunération spécifique complémentaire à l’occasion de prestations particulières.

Sont désormais admises les notifications et mises en demeure par voie électronique.

Les articles 24 et 25 de la loi de 1965 voient leurs domaines élargis. Les résolutions portant sur des travaux de conservation, les travaux rendus obligatoires par les lois et règlements, les travaux d’accessibilité et les décisions d’engager un diagnostic de performance globale sont prises à la majorité de l’article 24 (majorité des voix exprimées des copropriétaires présents ou représentés). Les résolutions portant sur des travaux de transformation, d’addition ou d’amélioration, ainsi que les demandes d’individualisation des contrats de fourniture d’eau relèvent désormais de la majorité de l’article 25 (majorité des voix de tous les copropriétaires).

  • Prévention des dégradations et réalisation des travaux de conservation des immeubles

Une obligation d’assurance responsabilité civile s’impose désormais tant aux copropriétaires qu’au syndicat. Un fonds de travaux doit être créé pour faire face aux travaux, prescrits par les lois et règlements, non compris dans le budget prévisionnel ; son montant ne peut être inférieur à 5 % du budget prévisionnel. Le syndicat peut être dispensé de cette obligation dans le cas où le diagnostic global ne fait apparaître aucun besoin de travaux dans les dix prochaines années.

Si l’immeuble ne comporte pas d’emplacement de stationnement sécurisé pour les vélos, le syndic doit inscrire à l’ordre du jour l’exécution de travaux pour les réaliser. Le syndicat peut décider, à la majorité de l’article 24, d’adhérer à une association foncière urbaine libre (AFUL) ou de participer à sa création. La construction d’un bâtiment ou la surélévation aux fins de créer de nouveaux lots à usage privatif relève désormais de la majorité de l’article 26 (majorité des membres du syndicat représentant au moins 2/3 des voix).

Les copropriétés en difficulté

  • Le mandataire ad hoc

Concernant la procédure du mandataire ad hoc, le pourcentage d’impayés déclenchant sa saisine est abaissé à 15 % pour les copropriétés de plus de 200 lots. Le juge peut désormais être saisi par le maire de la commune du lieu de situation de l’immeuble, le président de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) ou le préfet. Le syndic est tenu de fournir au mandataire tous les documents nécessaires à l’accomplissement de sa mission dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l’ordonnance du juge au syndic.

  • L’administrateur provisoire

A l’instar de la saisine du mandataire ad hoc, de nouvelles personnes peuvent saisir le juge aux fins de désignation d’un administrateur provisoire : le maire, le président de l’EPCI, le préfet, le procureur de la République ou le mandataire ad hoc. Comme le mandataire ad hoc, l’administrateur provisoire doit aussi répondre à des conditions d’indépendance.

  • Les copropriétés très dégradées et la procédure de carence

Des procédures de requalification des copropriétés dégradées peuvent être mises en place par l’Etat, les collectivités territoriales ou leur groupement pour lutter contre l’indignité et la dégradation des immeubles. Ces opérations sont menées dans le cadre d’un projet urbain et social pour le territoire concerné ou d’une politique locale de l’habitat. La procédure de carence se trouve quant à elle ponctuellement réformée.

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Au sommaire de la lettre


La lettre de l'immobilier

La gestion du passif environnemental : un enjeu significatif

Céline Cloché-Dubois et Solveig Le Pichon

Dans les opérations de fusion-acquisition comportant la cession (ou le transfert) d’un actif immobilier soumis à la réglementation relative aux ICPE1, ou la cession des titres de la société détenant un tel actif immobilier, la rédaction et la négociation des clauses de garantie environnementale sont devenues souvent complexes. L’enjeu est significatif, dès lors qu’il s’agit tant pour le vendeur que pour l’acquéreur de répartir le passif environnemental.

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