La lettre des fusions-acquisition et du private equity

Janvier 2014

De l’usage du compte courant d’associé en cas de cession de titres

Publié le 12 mai 2014 à 15h17    Mis à jour le 13 mai 2014 à 10h37

Christophe Lefaillet

Le compte courant d’associé se définit comme une avance consentie par l’associé à une société en sus de son apport. Selon la jurisprudence de la cour d’appel de Paris, le compte courant trouve son origine, non dans la possession des droits sociaux, mais dans le prêt fait à la société qui confère à l’associé la qualité de créancier social(1), de sorte que les versements effectués en compte courant d’associé sont juridiquement qualifiés de prêts et non d’apports(2).

Par Christophe Lefaillet, avocat associé, spécialisé en droit des sociétés et en fiscalité (droits d’enregistrement et ISF). Il couvre l’ensemble des questions relatives aux opérations transactionnelles.

Cette qualification pose la question du respect des règles du monopole bancaire tel qu’établi par l’article L. 511-5 du code monétaire et financier qui interdit «à toute personne autre qu’un établissement de crédit d’effectuer des opérations de banque à titre habituel», mais surtout du sort du compte courant en cas de transfert des titres de l’associé.Dans une telle situation, plusieurs possibilités s’offrent à l’associé ayant consenti une avance. Celui-ci peut prévoir le transfert de sa créance à l’acquéreur, en exiger le remboursement, l’incorporer au capital de la société, la transformer en obligations ou encore l’abandonner totalement ou partiellement. Le transfert de créances à l’acquéreur peut être prévu dans l’acte de cession de titres ou dans les statuts de la société, cependant il doit faire l’objet d’une mention expresse. En effet, dans un arrêt du 30 novembre 2004(3), la Cour de cassation a affirmé qu’à défaut de mention expresse, la clause prévoyant la subrogation du cessionnaire dans tous les droits et obligations du cédant à l’égard de la société n’entraîne pas transfert du compte courant.

Dans la pratique, le remboursement de la créance de l’associé prêteur est fréquent. En l’absence de disposition contraire et sous réserve que les fonds soient disponibles, le cédant est fondé à demander le remboursement des fonds détenus à son nom à tout moment(4). L’acquittement de cette dette par la société peut d’ailleurs être prévu par un accord préalable qui le fixe souvent au jour de la cession des droits sociaux. En outre, il peut arriver que dans l’accord de cession de droits sociaux l’acquéreur acquière le compte courant du cédant. Il importera de respecter alors les dispositions de l’article 1690 du Code civil.Une autre option s’offre à l’associé titulaire d’un compte courant, celle de l’incorporation de sa créance au capital de la société. Dans cette optique, une augmentation du capital social de la société devra être effectuée précédemment au transfert des droits sociaux. Le prix de souscription des titres émis lors de l’augmentation sera compensé par le solde créditeur du compte courant.

Les nouveaux titres ne seront toutefois pas émis si la créance de l’associé n’est pas certaine, liquide et exigible. Il sera généralement tenu compte de cette incorporation dans la valorisation des titres cédés. De surcroît, il peut être envisageable de prévoir une émission d’obligations en compensation de la créance de prêt. Suivant les mêmes conditions que pour la libération d’actions, une émission obligataire viendrait se substituer à la convention de compte courant d’associé corrélativement à la cession des titres de ce dernier. Bien que le cédant reste créancier de la société dont les titres sont cédés en tant qu’obligataire, l’obligation a le mérite d’être plus facilement négociable.

(1). CA Paris 02/06/1992.

(2). Cass Com. 24/06/1997, n° 95-20.056.

(3). Cass. Com. 30/11/2004, n° 01-12.063.

(4). Cass. Com. 08/12/2009, n° 08-16.418.


La lettre des fusions-acquisition et du private equity

Le cédant avait une double qualité : il était associé et créancier en compte courant...

Alain Couret

Aparcourir les recueils de jurisprudence, on constate que bon nombre de contentieux naissent de négligences qui ne trouvent pas leur origine dans le contrat de cession lui-même. Simplement, les parties ont oublié de régler un certain nombre de questions qui font partie de l’environnement de la cession. Le cédant avait une double qualité : il était associé et créancier en compte courant. Le cédant avait consenti des garanties, s’était porté caution. Peut-être était-il signataire d’un pacte d’actionnaires. Dans quelles conditions le passage de relais doit-il être réalisé ? Doit-on s’en remettre à une certaine automaticité ou, au contraire, stipuler avec précision les conditions du changement à venir ? De manière générale, la cession des droits sociaux n’a pas d’incidence sur ces situations juridiques qui perdurent autour de la personne du cédant. Si l’on veut aller au-delà, il conviendra de le dire et de l’organiser dans des conventions.

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