Des pistes pour renforcer l’épargne salariale

Publié le 12 mai 2022 à 10h38

Jean-François Bosquet    Temps de lecture 4 minutes

L’épargne salariale entre dans le champ de la politique RSE des entreprises. Elle est un engagement social fort : les dispositifs qui la nourrissent (participation, intéressement, actionnariat salarié) ont pour but d’associer les collaborateurs à la réussite de l’entreprise, de donner du sens à leur engagement, de créer collectivement de la valeur et de la partager. Les attentes sont fortes en ce domaine. Bien utilisés, ces outils constituent un puissant levier de performance et renforcent la cohésion sociale. En particulier, l’intéressement est un véritable outil de management. Son avantage sur la participation est précisément le lien direct que l’on peut établir entre l’objectif de performance défini propre à l’entreprise et la contribution de chaque équipe mobilisée sur cet objectif. Son produit n’est pas fiscalisé, mais il faut être inattaquable sur le caractère nécessairement aléatoire de la surperformance requise. Et donner toute garantie de non-substitution aux salaires, a fortiori au moment où il est question de leur revalorisation.

Des améliorations sensibles peuvent toutefois être apportées aux dispositifs d’épargne salariale dans le droit fil des avancées de la loi Pacte et de la législation récente. En premier lieu, il convient de les rendre plus simples et plus lisibles.

La formule de la réserve spéciale de participation (RSP), créée il y a cinquante-cinq ans dans le contexte d’une économie industrielle qui a beaucoup évolué, n’a pas changé. Pourquoi ne pas l’abandonner et retenir simplement un pourcentage du bénéfice net comptable ou net fiscal ? En attendant, il existe des formules dérogatoires simples, encadrées par des plafonds, pratiquées par plus d’un tiers des sociétés du SBF 120. Elles sont moins rébarbatives mais trop méconnues.

Plus radicalement, pourquoi ne pas unifier participation et intéressement en permettant aux entreprises d’opter pour une formule globale d’intéressement, souple et sur mesure par définition, plus motivante ? On maintiendrait le calcul de la RSP pour garantir au minimum les sommes versées au titre de la participation plus un pourcentage à définir.

La fiscalité a été abaissée pour encourager la multiplication des accords, notamment par la suppression du forfait social pour les entreprises de moins de 250 salariés. Toutefois, celle-ci génère un effet de seuil qui devrait être lissé par progressivité-dégressivité du taux. Des dispositions particulières favorisent les TPE et PME. Le moment est venu de les étendre plus largement à la fonction publique. La loi LOLF a ouvert la voie à la gestion par la performance. Il est bien naturel que les personnels de l’hôpital public bénéficient d’un système d’intéressement au même titre que ceux d’une clinique privée.

Les salariés sont incités à épargner les versements issus du partage des résultats. Mais, périodiquement, des déblocages de l’épargne salariale sont autorisés pour soutenir la consommation alors qu’elle a vocation à financer l’économie, ce qui est contre-productif. De même, la prime PEPA (prime exceptionnelle de pouvoir d’achat), défiscalisée, fait concurrence déloyale à l’épargne salariale et perturbe l’esprit qui l’anime. De façon générale, les chefs d’entreprise sont demandeurs de stabilité dans la réglementation.

En matière d’actionnariat salarié, la loi Pacte fixe un objectif de 10 % du capital des entreprises françaises détenu par leurs salariés d’ici 2030. Elle favorise l’actionnariat salarié par des mesures ciblées (décote, forfait social réduit, versement unilatéral de l’employeur sur le PEE). L’actionnariat salarié est le stade ultime du partenariat qui développe le sentiment d’appartenance à l’entreprise. Mais les entreprises, notamment patrimoniales, doivent conserver l’initiative et la maîtrise de leur stratégie.

Il existe un cercle vertueux de l’épargne salariale. Le partage de la valeur, qui est le volet social de la RSE, génère une épargne qui s’investit dans des fonds labellisés ISR (investissements socialement responsables) qui, à leur tour, sélectionnent les titres des entreprises les plus engagées en matière de RSE. La RSE va à la RSE.

Sur le partage de la richesse créée, se pose la question d’établir une règle de répartition des résultats entre actionnaires et salariés. Ainsi est née l’idée d’un dividende salarié et son corollaire, la conditionnalité : conditionner la distribution de dividendes à la distribution de participation et d’intéressement. Le débat est ouvert. 

Mots clés Entreprises
Jean-François Bosquet Membre du comité éditorial de Vox-Fi ,  DFCG

Jean-François Bosquet est membre du comité éditorial de Vox-Fi (DFCG)

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