Classes d'actifs

Actions versus Obligations

Publié le 18 octobre 2013 à 11h27    Mis à jour le 3 décembre 2013 à 11h56

Catherine Rekik

Annoncée depuis plusieurs mois, la rotation des obligations vers les actions pourrait s’accélérer. L’été a été favorable aux marchés actions, notamment en Europe, laquelle, pour la première fois depuis longtemps, attire de nouveau les investisseurs internationaux. Dans ce contexte, et en dépit des tensions géopolitiques et de leur impact sur les marchés financiers, Funds s’interroge sur les arbitrages à réaliser en fin d’année. Peut-on croire à une embellie de l’économie mondiale en dépit de la situation dans les émergents ? Le timing est-il opportun pour arbitrer en faveur des actions ? Et sur quels marchés investir ? Les obligations resteront-elles prépondérantes dans les portefeuilles ? Dans un contexte de remontée des taux, comment investir dans cette classe d’actifs ?

Contexte et perspective

Funds  : Que s’est-il passé sur les marchés depuis le début de l’année ? Que faut-il retenir et sur quels éléments fondez-vous vos stratégies d’investissement pour les prochains mois ? 

Sandra Craignou : Sur la première partie de l’année, les marchés actions des pays développés ont enregistré de bonnes performances, que ce soit au Japon, aux Etats-Unis, en Allemagne ou même en France. Les pays émergents ont connu une période difficile avec des flux sortants importants à partir du mois de mai, qui ont accentué les mauvaises performances. Ils sont les grands perdants sur les marchés actions depuis le début de l’année. Durant la première moitié de l’année, les banques centrales ont encore joué un rôle essentiel, notamment la Fed avec des déclarations qui ont eu des impacts très forts sur les marchés.

Par ailleurs, pour la première fois depuis très longtemps, certains investisseurs ont perdu de l’argent en étant exposés sur les marchés obligataires, en particulier ceux qui étaient positionnés sur des durations longues. Il y a donc aujourd’hui de grandes questions relatives à l’allocation d’actifs, notamment sur des produits diversifi és 70 % obligations/30 % actions. Selon la duration du portefeuille obligataire, les performances globales peuvent être négatives. 

Eric Pictet : Nous continuons à voir des flux sur les corporates. Aux Etats- Unis, on a constaté 12 milliards de dollars de sorties sur les fonds high yield. En revanche, il y a eu 45 milliards d’euros de flux positifs dans les loans. Il y a donc un vrai problème de duration. Les investisseurs s’orientent vers les taux variables, avec des spreads, en dessous de la moyenne historique, qui restent corrects. En Europe, le marché des loans est moins développé mais a tout de même attiré 3 milliards d’euros de collecte, tandis que le high yield a rassemblé 11 milliards d’euros de souscriptions, surtout sur des produits de short duration.

Il y a, dans le marché, une recherche de rendement et de duration courte. Comme nous sommes dans un monde totalement artifi ciel, avec désormais une pentifi cation importante des taux, il est évident qu’il y a aujourd’hui une volonté de trouver des taux réels alors qu’il n’y en a pas beaucoup sur les marchés. Nous voyons aujourd’hui sur les marchés une volonté de trouver d’autres sources de rendement que l’obligation d’Etat, le crédit et même le high yield, qui reste cependant une classe d’actifs attractive. Les Etats sont surendettés et, dans le contexte actuel, seules les entreprises ont assaini leur bilan et l’ont même amélioré.

Funds : Il y avait pourtant, en début d’année, des craintes d’augmentation des taux de défaut…  

Eric Pictet : Les taux de défaut restent faibles, entre 1 et 2 % aux Etats- Unis. En Europe, le marché est plus faible. Il suffit de quelques défauts pour augmenter le pourcentage, mais ce taux se situe entre 2 et 4 %. Les spreads sont un peu au-dessus de ces taux de défaut. Nous sommes maintenant dans un régime de flux. Il n’y a pas de gain de capital à attendre, et peut-être même une petite perte avec l’effet duration, mais il peut y avoir un resserrement des spreads. Le high yield est une des rares classes d’actifs qui peut encore permettre un rendement réel tant qu’il n’y a pas de dégradation des comptes des sociétés.

Loïc Cadiou : Chez H20, nous avons une vision globale des marchés et de leurs corrélations. Selon nos observations, ce qui caractérise l’année 2013, ce sont les changements de corrélation entre les grandes classes d’actifs et notamment entre les obligations et les actifs risqués. Ce changement de corrélation va avoir des conséquences pour les années à venir. La corrélation entre les obligations, les actions et le crédit avait atteint des niveaux très importants. Elle était très négative, de l’ordre de - 0,8, ce qui signifi e qu’un portefeuille diversifié actions/obligations avait peu de volatilité, les obligations ayant une grande capacité à absorber les chocs. Sur le long terme, la corrélation historique était de 0. Dans les années 1900, elle était positive. Elle est devenue négative après les années 2000.

Depuis le printemps, cette corrélation est revenue assez rapidement de - 0,8 à 0. C’est un événement majeur, comme si la volatilité du marché avait été triplée. C’est un choc important pour la gestion diversifi ée qui s’appuie sur une certaine stabilité des corrélations pour construire un portefeuille avec une volatilité et un objectif de performance défi nis. Beaucoup de questions se posent selon la vision que l’on a de la normalisation monétaire des banques centrales à un horizon de deux ou trois ans et sur la capacité des pays émergents à retrouver leur statut dominant dans l’économie mondiale. Les réponses à ces questions sont déterminantes pour la dynamique de ces corrélations et pour les fonds diversifi és, qui ont eu beaucoup de succès ces dernières années. 

David Ganozzi : Le premier semestre s’est caractérisé par une bonne résistance des marchés actions et surtout par un début de remontée des taux. C’est un événement majeur, attendu depuis longtemps, qui marque sans doute la fin d’un bull market qui a duré plusieurs décennies. Cet événement est plutôt une bonne nouvelle pour les économies développées qui sortent d’une crise très grave. Cela signifie que le monde occidental semble échapper à une forme de japonisation avec une croissance faible et un problème de dettes. Il y a une question aujourd’hui sur la capacité de résistance des marchés actions. Malgré la remontée des taux, grâce essentiellement à un environnement macroéconomique plutôt bon et des valorisations raisonnables, les marchés actions continuent de monter.

Les performances sont honorables, + 10 % de hausse sur les marchés mondiaux en euro au premier semestre. Tout le monde s’attend à une poursuite de la remontée des taux, l’interrogation portant plutôt sur le rythme. Reste à savoir dans quelle mesure les marchés actions pourront continuer à résister à cette remontée des taux. Avec un point positif toutefois pour les actions : cette remontée des taux se fait parce que l’environnement macroéconomique s’améliore, ce qui constitue un facteur de soutien pour les profits. 

Marlène Hassine : Depuis le début de l’année, nous avons observé des mouvements de collecte très épars selon les classes d’actifs. Au global, le marché des ETF a eu une évolution relativement faible depuis le début de l’année, soit une hausse de 2 %. Il y a eu d’importants mouvements de sorties sur les matières premières et sur les marchés émergents globaux et régionaux. Les flux sur les marchés actions ont compensé les mouvements de sortie, principalement sur les Etats-Unis et le Japon. Nous avons constaté, depuis le début de cet été, un retour plus significatif des flux vers les actions indexées sur l’Europe. Pour le marché obligataire, les flux sont restés soutenus sur la dette gouvernementale des pays développés et les obligations d’entreprise. On note également toujours un vif intérêt pour les produits de rendement avec de fortes collectes sur les produits de dividende et de high yield.

Eric Pictet : Il y a eu 250 milliards de dollars d’émissions aux Etats-Unis depuis le début de l’année, soit un rythme un peu supérieur à celui de 2012. En euro, les flux sont de l’ordre de 57 milliards et concernent encore à 70 % des opérations de refi nance-ment. Nous ne sommes donc pas sur un trend dangereux.

Economie mondiale et pays émergents

Funds : Peut-on réellement parler d’embellie de l’économie mondiale alors que les pays émergents sont en difficulté ?

Sandra Craignou : Chez Aberdeen, nous sommes plutôt neutres en termes de perspectives de croissance économique. La zone émergente est certes importante pour l’économie mondiale, mais les Etats-Unis restent un moteur primordial pour la croissance mondiale. Dans les économies occidentales, les publications économiques s’améliorent, mais de façon marginale et nous restons sceptiques car les fondamentaux demeurent fragiles, en particulier aux Etats- Unis, avec un taux de chômage encore élevé malgré une reprise progressive de l’emploi et de l’immobilier. En Europe, l’activité s’est améliorée, principalement grâce à l’Allemagne alors que certains pays, dont la France, restent à la traîne.

Les chiffres économiques s’améliorent également dans les pays périphériques, en Italie et en Espagne. Nous sommes de ce fait un peu plus optimistes qu’en début d’année quant à une sortie progressive de récession de la zone euro. Dans les émergents, nous distinguons deux types de pays : ceux qui présentent des balances courantes très déficitaires et ceux qui disposent d’une consommation domestique dynamique et d’une démographie favorable. Enfin en Chine, la banque centrale garde une marge de manoeuvre importante afin d’améliorer les niveaux de croissance si nécessaire, sans crainte d’une menace inflationniste. 

Eric Pictet : La situation économique mondiale n’est pas si mauvaise et les perspectives des pays émergents devraient s’améliorer l’année prochaine. Mais l’élasticité est désormais très faible. Si la croissance atteint 3 % aux Etats-Unis l’an prochain, ce sera plutôt bien et, en Europe, on regarde désormais les deux chiffres après la virgule ! L’Europe produit des richesses mais toujours plus de dettes. Quand on parle de croissance, il faut aussi parler de valeur ajoutée. Or, l’Europe produit peu de brevets, d’innovations, etc., les Etats-Unis un peu plus mais parce qu’il y a beaucoup d’étudiants étrangers. Or c’est vital, car cela permet d’alimenter la croissance, la redistribution des richesses et le remboursement des dettes. Oui, il a une embellie, mais les réformes structurelles ne sont pas faites. Dans le fi xed income, la règle de base est la suivante : tant qu’il y a une petite croissance sans défl ation, avec des bilans sains, il n’y a pas de souci. Nous sommes dans cette confi guration.

David Ganozzi : Nous sommes plutôt optimistes sur la croissance mondiale. La croissance américaine n’est pas aussi vigoureuse que par le passé, mais elle est là depuis deux ans et semble solide. La dynamique est plus positive dans les pays développés et au Japon où la politique économique a connu un tournant important. L’économie japonaise semble redémarrer. Quant à la conjoncture dans la zone euro, qui était jusque très récemment la seule en récession, elle semble s’améliorer. La dynamique plus favorable dans les pays développés a un impact positif sur les pays émergents qui ont par ailleurs souffert du changement politique de la Fed. En Chine, le ralentissement est assez limité. L’environnement macroéconomique devrait donc rester en faveur des actifs risqués sur la deuxième partie de l’année. 

Loïc Cadiou : Notre vision est légèrement différente, notamment sur les pays émergents. La croissance aux Etats-Unis semble effectivement assez solide, avec une reprise de l’immobilier qui se confirme. L’Europe sort de récession. Les pays développés sont sortis cahin-caha de la récession de 2008, mais ils ont un gros potentiel de reprise économique sous-jacent en dépit des réformes à faire. A l’inverse, nous sommes très pessimistes quant aux pays émergents, car ils sont très avancés dans le cycle contrairement aux pays développés. Ils sont en forte croissance depuis 2003. On voit dans les pays émergents tous les signes de fin de cycle : taux de chômage bas, inflation dans certains pays comme le Brésil ou l’Indonésie, et une croissance limitée de 8 % en Chine. Quand on regarde la croissance de la Chine sur longue période, ce taux reflète une récession.

La dynamique favorable aux pays développés versus pays émergents n’est pas, selon nous, uniquement conjoncturelle. Après l’éclatement de la bulle Internet, la croissance mondiale est repartie des émergents et, en parallèle, il y a eu très peu d’investissements dans les infrastructures aux Etats-Unis jusqu’en 2007. La logique s’est inversée : il y a eu beaucoup d’investissements dans les pays émergents sur la base d’une croissance très forte. Aujourd’hui, nous sommes dans une situation de surplus de capacités latentes qui renforce la perspective d’une croissance plutôt molle dans ces pays sur les prochains trimestres.

Nous avons eu, en plus, cette année, un choc négatif sur les conditions financières dans les pays émergents avec dépréciation des devises et augmentation des taux réels. Enfin, la croissance a été toujours été plus forte dans les pays développés durant les périodes de moins forte croissance dans les pays émergents. Durant la seconde moitié des années 1990, la croissance était faible dans la zone émergente, avec notamment la crise asiatique, alors que les Etats-Unis et l’Europe se portaient plutôt bien. Inversement, la croissance américaine a été très décevante dans les années 2003-2007.

Marlène Hassine : Les flux sur marché des ETF reflètent la diversité des opinions des investisseurs sur la perspective de l’économie mondiale. Le récent consensus vers un optimisme modéré en Europe commence à se matérialiser dans les flux. Ce qui pourrait marquer une tendance sur le troisième trimestre.

Funds : Il a été précédemment dit que l’environnement devrait rester porteur pour les actifs risqués dans les prochains mois. Partagez- vous ce sentiment ? 

David Ganozzi : Effectivement, l’environnement devrait rester porteur pour les actifs risqués et plus compliqué dans l’obligataire. Mais si la situation se dégrade dans l’obligataire, cela aura un impact sur les marchés actions et sur l’ensemble des actifs financiers. 

Eric Pictet : Dans l’obligataire, la pentification très forte de la courbe des taux constitue également un frein à la hausse. Pour que les taux longs augmentent, les taux aussi doivent augmenter. Par ailleurs, autant les marges des entreprises sont à des niveaux historiquement élevés aux Etats-Unis, ce qui donne des capacités d’investissement importantes, autant elles sont relativement faibles en Europe et limitent les possibilités d’investir et de créer de la valeur.

Loïc Cadiou : Dans un monde où les pays développés offrent plus de visibilité et où la Banque centrale américaine a plutôt un scénario de normalisation, l’environnement est favorable aux actifs risqués. Restent les incertitudes sur la Syrie, les prix des matières premières, etc., qui peuvent peser sur un trimestre de croissance. Mais il reste une bonne perspective de surperformance des marchés actions sur les marchés obligataires. Cela paraît raisonnable d’un point de vue technique, fondamental et de valorisation. 

Sandra Craignou : A court terme, il faut rester tactique car le marché a encore besoin de digérer les nouvelles, notamment celles en provenance de la Banque centrale américaine qui ont un impact sur la volatilité des marchés actions. Je ne serais donc pas surprise de constater une pause dans la hausse des marchés en raison des incertitudes liées à la modération du programme d’assouplissement monétaire aux Etats-Unis. D’un point de vue arbitrage, les marchés actions devraient surperformer les obligations comme c’est le cas depuis quelque temps déjà. Mais je serais plus prudente d’un point de vue tactique, le principal risque à moyen terme résidant dans une soudaine forte remontée des taux.

Marlène Hassine : Nous avons constaté, en début d’année, une recherche de rendement via l’analyse des flux sur le high yield et la dette émergente. Désormais, les investisseurs recherchent également du rendement à l’intérieur de la classe d’actifs actions. La catégorie actions à haut dividende est très recherchée par l’ensemble des fonds mutuels en Europe avec une collecte qui s’élève à près de 9 milliards d’euros depuis le début de l’année, dont 1 milliard par mois sur les trois derniers mois. Ces fonds ainsi que ceux dit de «low vol» ont la faveur des investisseurs. Les investisseurs recherchent en effet des produits moins risqués à l’intérieur de la classe d’actifs actions.

Funds : Dans un contexte plus favorable aux actions, dans quels marchés investir ? Les actions européennes sont-elles encore décotées ? 

Loïc Cadiou : Nous pensons qu’il faut effectivement investir dans les marchés actions européens. Nous sommes pratiquement dans une situation de reprise économique et les bilans des entreprises sont corrects. De plus, compte tenu du décalage cyclique qui s’est créé avec la crise entre les Etats-Unis et l’Europe, la BCE va continuer à avoir un discours accommodant. Le plus important est la suite des mouvements de réallocation des flux vers les actions des pays développés.

L’an dernier, les investisseurs ont majoritairement investi dans les Etats-Unis, car il y avait plus de confi ance sur la croissance. Les fl ux vont désormais se reporter sur l’Europe, à la fois pour des raisons de timing et de valorisation. Les marchés actions européens devraient logiquement surperformer les marchés mondiaux, à l’exception peut-être du Japon qui a une logique spécifi que mais qui nous semble plus risqué. 

Sandra Craignou : En termes de valorisation, les actions européennes sont à des niveaux plus attractifs comparés aux actions américaines. Les marges des entreprises européennes sont encore faibles mais elles devraient s’améliorer grâce à la baisse du coût du travail. Une forte hausse des taux pourrait cependant impacter significativement ce niveau de valorisation et le rendre moins attractif. Reste aussi une interrogation sur le rythme de la croissance européenne ou sur la sortie de la récession qui se dessine. Lorsque ce sentiment sera partagé davantage par les investisseurs, cela pourrait avoir un impact positif sur les marchés. Nous sommes aussi raisonnablement positifs sur les marchés émergents à long terme. Après la récente correction, les niveaux de valorisation sont attractifs mais il convient d’être sélectif dans le choix des valeurs. 

Marlène Hassine : La tendance positive sur la zone euro demande encore à être confi rmée et concerne pour l’instant certains pays plus spécifi ques comme l’Italie ou le Royaume-Uni. De plus, il y a des prises de positions tactiques sur certains secteurs, sur les financières par exemple. 

Loïc Cadiou : Les secteurs défensifs et les actions à haut dividende ont capté l’essentiel des flux. Cela ressemble à du crédit ou à du high yield. Cela ne correspond pas encore à une rotation des actifs comme on pourrait l’imaginer dans le cadre d’un réel retour de l’appétit pour le risque. Nous n’en sommes pas encore là. Cela pose également un problème de positionnement car l’investissement sur les dividendes et les secteurs défensifs est associé à la sous-performance des pays développés par rapport aux pays émergents. L’idée étant qu’il n’y a pas de perspective de croissance dans les pays développés et qu’il vaut mieux privilégier le rendement à travers des entreprises exposées à la croissance mondiale. Cette logique pourrait être remise en cause si la croissance des pays développés s’avérait meilleure que prévue.

Funds : Dans une perspective de reprise économique, faut-il privilégier un style de gestion ? Revenir sur les cycliques ? 

Loïc Cadiou : Nous apprécions le secteur des télécoms européennes, qui ont été des rendements élevés mais des marges décevantes. Ces valeurs ont été délaissées, ce qui nous permet de nous mettre un peu en dehors du marché. Nous apprécions également les bancaires qui optimisent les nouvelles réglementations et sont dans une logique d’amélioration ou les télécoms américaines qui sont de vraies valeurs de croissance. 

David Ganozzi : Il n’y a pas eu d’euphorie sur les marchés actions, ce qui est plutôt rassurant. Jusqu’à présent, seules les valeurs défensives ont été recherchées. L’investissement dans les marchés actions dépend aussi du risque auquel l’investisseur veut s’exposer. Les marchés actions américains sont plus sécurisants. A l’opposé, le Japon présente des risques plus élevés. Entre les deux, il y a la zone euro, sur laquelle nous sommes à un moment idéal d’investissement. Sur la zone, on devrait logiquement aller sur des thématiques plus offensives, les cycliques ou les financières.

Opportunité de l'obligataire

Funds : Les portefeuilles des institutionnels et des clients privés sont encore majoritairement investis en obligations. Dans un contexte de remontée des taux, comment gérer cette exposi-sement ?

Eric Pictet : les opportunités sont quasi inexistantes et il est de plus en plus diffi cile de défi nir ce qui est risqué et ce qui ne l’est pas ! L’automne n’est en général pas favorable aux actifs risqués, comme le montre la performance du S&P depuis 1928. La question est de savoir ce qui peut aujourd’hui offrir des taux réels. Au moment de la création de Muzinich, l’objectif était d’offrir avec le high yield un rendement de 5 % au-dessus des taux réels. La performance a été de 6,7 % en brut parce que nous avons connu une baisse des taux depuis trente ans. Avec la remontée des taux, nous serons contents d’avoir une performance de 2, 3 ou 4 % sur le high yield. C’est ce qui explique les flux sur les actions à haut dividende qui permettent d’être au-dessus de l’inflation.

Les entreprises avec des bilans sains vont capter les flux d’investissement. En revanche, les écarts de prime sont très faibles dans l’investment grade et le high yield en dessous de sa moyenne historique. Seule alternative : les fonds absolute return qui peuvent être courts en duration lorsque c’est nécessaire ou plutôt long. Ces fonds rencontrent pas mal de succès. Reste une grande question : jusqu’à quand les taux courts vont-ils rester courts ? Si la politique américaine fonctionne, la logique voudrait que ces taux courts remontent, ce qui entraînerait aussi une remontée des taux longs.

David Ganozzi : Pour l’instant, on ne parle que d’une réduction des rachats mais, si la reprise se poursuit aux Etats-Unis, la hausse des taux courts sera effectivement inévitable. Le mouvement de remontée des taux est loin d’être terminé. Mais la normalisation des taux est plutôt une bonne nouvelle car elle refl ète une normalisation de l’environnement économique. 

Loïc Cadiou : Pour l’investisseur, c’est plutôt une nouvelle catastrophique, car il y a énormément d’obligations dans les portefeuilles. Les investisseurs ne savent pas quoi faire. Il n’y a pas d’alternative, ce qui va certainement engendrer une grande inertie. Cette perspective de hausse des taux, qui semble raisonnable, va se traduire par des rendements faibles sur une longue période. A part sortir de l’obligation, il n’y a pas grand-chose à faire. Les fonds absolute return semblent être effectivement la seule alternative possible. 

Sandra Craignou : Les investisseurs ont des expositions obligataires importantes, que ce soit en France, dans les fonds de pension aux Etats-Unis ou au Japon. Les actions ne représentent encore qu’un faible pourcentage dans les allocations des fonds de pension au Royaume- Uni ou aux Etats-Unis, par exemple. Jusqu’à très récemment, la surperformance relative des obligations sur les actions ne les a pas incités à des arbitrages. Il faut qu’il y ait une prise de conscience plus importante du risque que représente une forte exposition aux obligations. Quoi qu’il en soit, cet ajustement, s’il a lieu, devrait prendre beaucoup de temps. 

Eric Pictet : Sans compterla pression politique et réglementaire que subissent certains investisseurs institutionnels. 

Loïc Cadiou : La lecture de la situation actuelle devrait amener un investisseur qui n’est pas contraint à refuser une allocation exposée majoritairement sur l’obligataire. 

Marlène Hassine : Chez Lyxor, un des produits qui a le mieux collecté depuis le début de l’année est un fonds ayant les qualités des fonds obligataires avec les perspectives des fonds actions. Ce produit est le Lyxor ETF SG Global Quality Income. C’est un fonds composé d’actions de qualité, c’est-à-dire des valeurs choisies pour leurs fondamentaux, la solidité de leurs bilans et leurs capacités à générer des dividendes. Et, pour preuve, ce produit a collecté sur un an plus de 500 millions de dollars. 

Loïc Cadiou : Dans un portefeuille global, les obligations ne protègent plus du tout. Mécaniquement, la corrélation plus faible entre les actions et les obligations devrait entretenir un désenchantement continu vis-à-vis des obligations.

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