Table ronde

Un outil de motivation pour toutes les entreprises

Publié le 24 avril 2015 à 16h37    Mis à jour le 27 juillet 2021 à 11h39

Propos recueillis par Eric Leroux

Dans l’univers de l’épargne salariale, l’actionnariat salarié occupe une place de choix, car il permet aux entreprises d’associer leur personnel à leur devenir et crée un intérêt commun entre toutes les parties prenantes. Longtemps réservés aux grandes entreprises, ces mécanismes se développent de plus en plus dans des grosses PME et des établissements de taille intermédiaire. Les participants à notre table ronde, issus pour la plupart de ces entreprises moyennes, livrent ici leur retour d’expérience et détaillent les avantages qu’ils en ont retirés. Ils livrent aussi leur analyse sur les évolutions apportées par la loi Macron et sur l’accueil que leurs salariés réservent à ces plans. Un accueil souvent très favorable !

L’actionnariat salarié se développe rapidement, mais il est surtout présent dans les très grands groupes. Cette formule est-elle adaptée aux entreprises de taille intermédiaire, voire aux grosses PME ?

Xavier Collot, directeur adjoint de la ligne métier épargne salariale & retraite, Amundi : L’actionnariat salarié se développe majoritairement dans les grandes entreprises, pour des raisons historiques, car lors de la privatisation des grands groupes hexagonaux, une part du capital a été réservée aux salariés. Le mécanisme s’est ensuite répandu dans d’autres grands groupes.

Ce mouvement ne doit pas cacher le développement très fort de l’actionnariat salarié dans des entreprises de taille plus modeste. Ces opérations sont plus discrètes, car les sociétés non cotées n’ont pas à faire de publicité sur leurs opérations. Mais il existe un véritable intérêt des entreprises de taille intermédiaire (ETI) pour ces mécanismes, car elles souhaitent elles aussi associer davantage leurs salariés au capital, partager la valeur ajoutée et le profit autour de l’action de l’entreprise. Elles désirent, grâce à l’actionnariat salarié, aligner l’intérêt entre les actionnaires, les dirigeants et les salariés. C’est le fil d’Ariane entre ces populations.

Tous les dispositifs peuvent y être mis en œuvre : création d’un fonds d’actionnariat dédié, attribution gratuite d’actions, stock-options, bons de souscription, etc. Je peux vous affirmer que l’actionnariat salarié est un outil de compréhension et de pédagogie de la vie économique de l’entreprise tout en favorisant la responsabilisation des salariés.

Philippe Lepinay, président de la FAS, administrateur actionnaire salarié de Thales : Sur 25 associations que nous fédérons, plus de 20 sont issues de grands groupes privatisés.

Si l’on parle plus souvent des sociétés importantes, nous constatons une augmentation des demandes venant de petites sociétés, voire d’artisans qui seraient désireux de partager leur capital.

Un élément milite en faveur du développement de l’actionnariat salarié dans ces entreprises : la pédagogie. Il permet à quiconque d’être informé précisément sur la vie de l’entreprise, quel que soit son statut, et d’associer les salariés aux prises de décision, notamment stratégiques. En ce sens, les associations que nous fédérons à la FAS sont toutes complémentaires des syndicats.

Marie-Line Pesquidoux, secrétaire générale, Stef : Effectivement, ces dispositifs ne sont pas exclusivement réservés aux grands groupes qui ont de fortes capitalisations. Chez Stef, 17 % du capital est détenu par les salariés au travers du FCPE, et la majorité du capital est dans les mains des cadres du groupe, au travers de structures spécifiques. Au total, 70 % du capital est possédé par le management et le fonds d’actionnariat salarié.

L’actionnariat des salariés au travers du fonds est donc l’une des composantes de la maîtrise de notre capital, même si nous sommes cotés en bourse et que la part de flottant est assez marquée.

Vincent Debels, CFO, Promod : Nous employons 5 000 collaborateurs dont un peu plus de la moitié en France. Seule la France est concernée par notre dispositif d’actionnariat salarié. Nous avons lancé en 2003 avec succès un FCPE dédié, «Promod Plus», et nous avons entre 1 500 et 2 000 actionnaires salariés. L’encours de ce fonds est monté jusqu’à environ 40 millions d’euros. Les salariés y effectuent des versements volontaires ou y investissent leurs primes.

C’est donc un dispositif très bien adapté aux entreprises de taille intermédiaire.

Jean-Charles Robin, vice-président du directoire, directeur général, Spie Batignolles : L’épargne salariale, au-delà d’un instrument financier permettant de constituer un patrimoine futur, est un véritable instrument d’appartenance au groupe et fait partie de notre histoire. En 1996, lorsque l’actionnaire a voulu se séparer de Spie Batignolles, notre groupe a pu continuer sa route grâce à l’épargne salariale : les salariés ont investi dans l’entreprise pour lui donner un avenir. En 2003, lorsque le management a voulu prendre son indépendance via un LBO, une forte demande des salariés s’est manifestée pour rester actionnaires et acteurs de la vie de l’entreprise.

L’an dernier encore, alors que nous sommes en pleine crise du BTP, plus de 50 % des salariés ont investi dans le fonds qui leur était proposé. Très peu refusent d’être actionnaires.

Plus de dix ans après notre première opération, l’épargne salariale continue à se développer et connaît toujours un grand succès. Je vais régulièrement sur le terrain pour présenter les programmes d’actionnariat que nous lançons, et ils sont toujours suivis par de nombreux salariés.

Evidemment, les salariés restent sensibles à la performance financière et à la sauvegarde de leur épargne.

La mise en place d’un tel dispositif n’est-elle pas trop lourde pour une entreprise de taille intermédiaire ? Ou trop onéreuse ?

Pascal Imbert, président du directoire, Solucom : Effectivement, ce sont des dispositifs relativement complexes à mettre en place, mais pas extrêmement coûteux. Cela nous revient par exemple à 70 000 euros par an, et notre politique d’épargne salariale, avec l’abondement, mobilise 2 millions par an. Le coût de fonctionnement est donc marginal.

En revanche, la complexité est un vrai frein pour les PME et ETI. Le cadre juridique est difficile à appréhender et à décrypter. Les textes sont affreusement mouvants au plan juridique et fiscal.

Ces difficultés sont relativement faciles à gérer dans un grand groupe qui dispose de moyens humains puissants. Elles le sont beaucoup moins dans des petites structures. Il faut un véritable effort pour la mise en place et le fonctionnement. C’est dommage, car cette complexité ne rapporte pas un euro de plus à l’Etat, et elle se traduit par un manque d’efficacité.

Jean-Charles Robin :  Bien sûr que cela coûte un peu d’argent, mais les coûts ne sont pas significatifs par rapport aux avantages que l’on en tire. Nous avons lancé notre première opération d’actionnariat salarié en 2004. Il nous a fallu un petit apprentissage qui prend du temps au départ, mais une fois qu’il est fait, les choses évoluent très bien.

Marie-Line Pesquidoux : C’est une démarche relativement lourde et demandant un fort engagement de la société et de ses dirigeants. Elle nécessite un investissement humain fort et un accompagnement de tous les instants. Il faut aussi, pour développer l’actionnariat salarié, mettre en place un système d’abondement pour le salarié, c’est-à-dire une incitation financière complémentaire, avec une grille assez favorable, ce qui permet de sécuriser les opérations. En effet, le fonds étant majoritairement investi en actions du groupe, l’abondement permet de compenser les fluctuations du cours de bourse qui pourraient intervenir à la baisse.

La mise en place doit aussi répondre à des exigences réglementaires assez contraignantes. C’est un investissement en termes de gestion et d’ordre financier non négligeable. Le coût pour l’entreprise doit être totalement assumé.

Vincent Debels : Ce n’est ni lourd, ni onéreux. Nous pouvons nous appuyer sur une équipe de gestion qui nous aide énormément, pour la gestion du FCPE aussi bien que pour les aspects juridiques.

Xavier Collot : La vraie difficulté est effectivement réglementaire. C’est elle qui pèse sur les coûts en apportant de la complexité. Ceci peut conduire les entreprises à reporter le lancement d’un plan d’actionnariat, surtout si leurs ressources humaines sont mobilisées sur d’autres enjeux plus stratégiques.

Pour les coûts, les entreprises savent généralement bien négocier à leur avantage et plus l’opération est récurrente, moins elle est onéreuse. Nous conseillons donc aux entreprises de ne s’y lancer que dans un cadre durable et systématique.

Combien de temps faut-il pour mettre en place un plan d’actionnariat salarié ?

Marie-Line Pesquidoux : Il faut compter environ un an au départ. Ensuite, une fois que la démarche est lancée, elle s’inscrit naturellement dans la vie de l’entreprise.

Vincent Debels : Cela a été assez rapide à mettre en place dans notre entreprise : il nous a suffi d’environ six mois, dans la mesure où le dispositif n’est proposé qu’en France. Une ouverture sur d’autres pays aurait été plus exigeante. Il faut aussi, ensuite, communiquer en interne pour faire vivre le dispositif. Les membres du conseil de surveillance sont également de vrais ambassadeurs, car ils représentent à la fois le siège, les différentes directions et le réseau. Ils sont des relais précieux.

Pascal Imbert : Il nous a fallu deux ans pour bâtir le mécanisme, car nous voulions mettre en place un système durable, ce qui nécessitait une réflexion longue. Ce délai nous a permis de faire mûrir notre projet.

Le plus long reste le travail de pédagogie envers les salariés. Il faut y passer beaucoup de temps pour leur proposer un projet simple, leur en faire comprendre les intérêts, et rendre l’ensemble lisible par tous nos collaborateurs.

Quels bénéfices peut en attendre l’entreprise?

Marie-Line Pesquidoux : C’est un levier d’excellence et un élément fédérateur très important puisque les salariés ont en commun la participation au capital. Cela entraîne un engagement de chacun dans son travail au quotidien.

C’est aussi un signe distinctif par rapport à nos métiers et à nos clients. Nous sommes dans des métiers physiques, avec des exigences très fortes de la part de nos clients et des taux de qualité de service contractualisés. L’actionnariat salarié conduit à renforcer l’implication de chacun et indirectement à améliorer la qualité du service rendu.

C’est aussi un outil d’intégration des salariés lors des opérations de croissance externe. Lorsque nous achetons des entreprises, leurs salariés viennent rapidement nous demander à bénéficier du plan d’épargne, que ce soit en France ou à l’étranger. Ils comprennent bien que c’est une manière d’entrer dans la «famille professionnelle» de l’entreprise.

C’est donc un moyen efficace de renforcer l’adhésion aux valeurs du groupe.

Pascal Imbert : En tant que cabinet de conseil en systèmes d’information, nous devons attirer et fidéliser des talents sur le long terme. C’est un sujet stratégique, car les candidats de talent sont aussi séduits par de grands groupes où ils obtiennent ce type d’avantages. Notre secteur connaît d’ailleurs un taux de turnover élevé, autour de 20 % ; celui de notre entreprise est inférieur, autour de 10 %, grâce notamment à ces mécanismes.

Pour être un acteur de référence dans notre domaine, nous ne pouvons pas nous passer d’un tel dispositif dans notre politique de ressources humaines.

Nous en retirons plusieurs bénéfices : un très bon alignement des angles de vue des différentes parties prenantes de l’entreprise. Les intérêts de nos salariés ne doivent pas diverger de ceux des actionnaires, car nous sommes cotés en bourse.

L’actionnariat salarié permet donc de valoriser la performance économique aux yeux des salariés. Ils sont intéressés à la performance financière de l’entreprise, qui devient pour eux un motif de satisfaction et de motivation. Cela crée aussi un lien affectif fort entre les salariés et leur entreprise et, d’ailleurs, nombre d’entre eux conservent leurs actions même lorsqu’ils quittent l’entreprise.

Philippe Lepinay : Je suis administrateur actionnaire salarié d’un grand groupe. Je mesure l’importance que les principaux actionnaires et décisionnaires accordent aux salariés détenteurs d’une partie du capital, car ils se rendent compte que nous avons une meilleure connaissance de tous les rouages du groupe, alors que les autres administrateurs n’ont parfois qu’une vision très partielle.

Le fait d’avoir des salariés actionnaires permet donc au conseil d’administration d’avoir une meilleure connaissance de l’entreprise. D’ailleurs, même les salariés non actionnaires qui sont au conseil peuvent apporter beaucoup aux discussions.

Il y a incontestablement un caractère fédérateur pour l’entreprise, puisque cela peut conduire à associer les actionnaires salariés jusqu’au conseil d’administration, sans considérations hiérarchiques ou géographiques.

Cela permet aussi de jouer un rôle pédagogique important, que notre fédération cherche à développer. Il faut expliquer ce qu’est une action, comment elle évolue, sur quels critères. Cela entraîne un dialogue avec les dirigeants qui aboutit à une meilleure compréhension par les salariés de la stratégie et du fonctionnement de l’entreprise.

C’est aussi un outil pour améliorer le vivre-ensemble, l’entraide entre les salariés. Cela permet de mettre tout le monde dans le même bateau.

L’actionnariat salarié peut aussi être une mesure anti-OPA très efficace.

Xavier Collot : L’actionnariat salarié vise un objectif simple et pragmatique : créer des objectifs collectifs qui seront partagés par l’ensemble des collaborateurs, c’est-à-dire tous ceux qui contribuent à la création de valeur.

Deux objectifs communs et vertueux se trouvent ainsi partagés : la croissance et la valorisation de l’entreprise. La croissance crée une énergie d’emploi et de profits ; la valorisation favorise le retour sur investissement pour l’actionnaire salarié.

C’est aussi un excellent outil participatif et un levier de relations humaines. Le fait que les salariés participent aux décisions de l’entreprise, qu’ils soient contributeurs des décisions à venir, permet de renforcer la cohésion entre les actionnaires, les dirigeants et les salariés et de galvaniser les salariés autour des objectifs de l’entreprise, de la conquête de marchés nouveaux.

Vincent Debels : L’actionnariat salarié crée d’abord un véritable sentiment d’appartenance et renforce quelque peu la culture d’entreprise. Les salariés s’identifient davantage à l’entreprise, cela les rapproche un peu des actionnaires historiques ou familiaux. Ils se sentent plus impliqués, plus motivés pour «défendre le drapeau».

La loi Macron vise à favoriser l’actionnariat salarié dans les PME et ETI. Quelles mesures permettront d’atteindre cet objectif ? L’environnement légal et social est-il aujourd’hui favorable ?

Philippe Lepinay : La principale avancée de la loi concerne les petites entreprises, qui bénéficieront d’une baisse du forfait social lorsqu’elles lanceront un plan pour la première fois. C’est un point très positif, qui peut contribuer à favoriser l’actionnariat salarié.

Mais on peut s’interroger sur la manière dont cela sera vécu par les salariés si, après deux ou trois ans, l’entreprise cesse de promouvoir ce dispositif, par exemple pour des raisons financières. Il faudra un appui pédagogique très fort pour que cela ne se retourne pas contre l’employeur.

Dans la mesure où des actions gratuites pourront être attribuées à chaque salarié, nous espérons qu’elles entreront dans le cadre de l’actionnariat salarié collectif.

Xavier Collot : Les dispositions de la loi Macron sont le fruit des réflexions d’un groupe de travail, le Copiesas, qui réunit entreprises, syndicats, gestionnaires, représentants de l’Etat. Toutes ses propositions n’ont pas été reprises, mais nous nous réjouissons des avancées qu’elles ont entraînées, notamment la baisse de la fiscalité. Le message a donc été entendu, mais dans un pays aux comptes déficitaires, on ne peut pas être très exigeant.

La Loi Macron, en mettant en avant l’actionnariat salarié, permettra de le développer encore, en remettant en scène ces outils de partage de valeur et des profits.

La loi ne règle pas tout – quelle loi pourrait tout régler ? –, mais elle devrait donner envie aux créateurs d’entreprises d’associer leurs salariés au capital.

Vincent Debels : La loi va dans le bon sens. Elle prévoit plus de fluidité entre participation et intéressement, et plus de logique en alignant les délais de versement.

Par ailleurs, l’attribution d’actions gratuite aux salariés devrait bénéficier d’un allégement des charges fiscales et sociales, notamment une diminution de la contribution sociale à 20 %. La période d’attribution d’actions gratuites, pour fidéliser par exemple des jeunes talents (ce que nous avons fait en 2007/2011) pourrait passer à deux ans, c’est un autre bon point.

Les changements de fiscalité lors de l’attribution d’action représentent un autre élément très favorable, puisque le gain d’acquisition pourrait être soumis à la fiscalité des valeurs mobilières, et non plus à l’impôt sur le revenu.

Jean-Charles Robin : Rien n’empêche aujourd’hui de faire de l’actionnariat salarial dans les petites entreprises, car il y a un impact direct sur la relation sociale et le dialogue entre les différentes parties. Il existe toutefois une difficulté à régler, celle de la liquidité, qui n’est pas traitée par la loi. Il faudrait donc créer un mécanisme collectif afin de garantir cette liquidité. Il faut en effet que les salariés puissent sortir à tout moment pour les inciter à entrer.

Pascal Imbert : Beaucoup de dispositions concernent les mécanismes d’actions gratuites. Cela nous intéresse, car nous avons choisi d’attribuer des actions gratuites à nos collaborateurs qui achètent des titres dans le cadre de l’épargne salariale. Pour une action achetée, nous en attribuons une gratuitement.

Le fait de prévoir un raccourcissement des délais pour acheter et revendre les actions devrait rendre ce dispositif plus attractif pour les salariés, puisqu’ils pourront s’engager sur deux ans, contre quatre actuellement. Les mesures fiscales sont également favorables pour les entreprises (qui n’auront pas à payer le forfait social pour les actions qui ne sont finalement pas acquises par les salariés) et pour les salariés qui bénéficieront d’un régime plus avantageux que celui d’aujourd’hui.

La loi devrait donc avoir un effet très positif sur l’épargne salariale.

Marie-Line Pesquidoux : Pour des entreprises comme la nôtre, qui se sont lancées depuis longtemps, la loi n’apporte pas grand-chose. Aucune des dispositions qu’elle présente n’a un effet déterminant dans notre cas de figure.

Même si elle contient quelques dispositions favorables, cette loi reste un saupoudrage de mesures, avec un impact limité. La baisse du forfait social est temporaire, par exemple, alors qu’une politique d’actionnariat salarié s’organise et s’inscrit dans le long terme. Il manque aussi un volet permettant d’harmoniser l’épargne salariale au niveau européen. C’est l’une des limites de la loi.

Comment les salariés appréhendent-ils ces mécanismes ?

Philippe Lepinay : Les salariés sont intéressés par tout ce qui peut leur apporter du gain, qu’il s’agisse du salaire, des primes de participation ou d’intéressement, ou d’un plan d’actionnariat salarié. Si, en plus, on leur propose de participer à la gouvernance de l’entreprise, d’être représentés dans les instances de décision, ils sont très intéressés.

Ils sont également ravis de pouvoir disposer d’un placement dans un cadre fiscal favorable.

Vincent Debels : Ils plébiscitent ce mécanisme : 80 % à 90 % de l’épargne salariale est dirigée, chez nous, vers le fonds d’actionnariat salarié. Nous constatons qu’ils restent longtemps dans les fonds, même lorsque la valeur de l’action diminue. Pour les inciter à y investir, mais aussi limiter leurs risques théoriques de perte, nous octroyons un abondement assez généreux, égal à 50 % des versements volontaires, dans la limite de 2 150 euros. Les salariés mesurent bien l’avantage qu’ils peuvent en tirer.

Nous avons aussi choisi d’introduire dans notre fonds d’actionnariat des obligations convertibles à taux fixe (par exemple, en 2003 à 6 %) que nous avons émises exclusivement pour le FCPE. Elles apportent de la stabilité et de la sécurité à la valeur du FCPE et compensent les éventuelles variations à la baisse du prix de l’action. Dans des cycles bas, le rendement des obligations convertibles protège la valorisation, en phase de hausse de l’action l’effet booster joue. Ce mécanisme est en place depuis 2003 et il a bien fonctionné, en limitant les variations du patrimoine de nos salariés. Aujourd’hui, 60 % du fonds est investi sur ces obligations convertibles. Elles ont permis au fonds de ne jamais baisser, la plus faible variation annuelle s’est inscrite à + 1 % il y a deux ans.

Enfin, nos salariés y voient ainsi la possibilité de mieux affronter le futur problème des retraites.

Jean-Charles Robin : Les salariés sont très satisfaits de devenir acteurs de l’entreprise et nous constatons tous les ans une forte participation aux opérations lancées, y compris de la part des ouvriers. Les performances des fonds sont, il est vrai, incitatives : le premier que nous avons ouvert en 2003 a vu sa valeur multipliée par 7 en 12 ans. A cette époque, le risque était cependant très élevé, mais nous avons tout de même levé 4,5 millions d’euros auprès de 4 000 salariés. Ceux qui ont souscrit à l’époque ont donc fait un excellent placement.

Les fonds ouverts par la suite ont connu des parcours moins spectaculaires, mais les résultats restent convaincants : le fonds ouvert il y a quatre ans progresse de 30 %, grâce à la bonne tenue de l’action et au paiement d’un dividende régulier, qui alimente les résultats du fonds.

Pour maintenir durablement cette performance, dans un environnement professionnel peu propice, nous avons choisi d’intégrer dans le fonds une part d’obligations que nous émettons nous-mêmes dans ce but, avec un rendement de l’ordre de 4 %. Cette part vient en réduction du monétaire, dont les rendements sont aujourd’hui négatifs. Cela devrait permettre d’offrir une performance plus régulière aux salariés et éviter de voir stagner la valeur de leur épargne.

Xavier Collot : Les salariés se sentent davantage valorisés lorsqu’ils sont actionnaires, car on les informe mieux sur la vie de l’entreprise, ses résultats et ses objectifs. Ils connaissent mieux l’environnement dans lequel ils travaillent, les produits que l’entreprise fabrique, et les résultats qu’ils génèrent. L’actionnariat salarié oblige l’entreprise à mieux communiquer. Les dirigeants doivent convaincre leurs salariés de devenir actionnaires. Ils doivent aller au-devant d’eux, souvent sur le terrain, pour expliquer les arcanes financiers de l’entreprise, qu’elle soit cotée ou non.

Marie-Line Pesquidoux : 60 % à 65 % de nos salariés sont actionnaires au travers de notre FCPE. Dans certaines filiales, le taux atteint 80 %. C’est donc un accueil très favorable qui lui est réservé.

Les salariés sont motivés par la possibilité de constituer une épargne personnelle dans des conditions avantageuses. Ils ont bien compris qu’en investissant la participation et l’intéressement, qui sont abondés, ils avaient là la possibilité de constituer un patrimoine financier de manière fluide et quasi indolore.

Pascal Imbert : Nous constatons un très grand intérêt des salariés, qui n’ont pas souvent une épargne personnelle importante. Ils voient cela comme un plus, pas comme un élément déterminant de leur rémunération. Ils mesurent aussi qu’il existe un aléa et s’inscrivent généralement dans un horizon de long terme, un moyen de constituer en douceur un patrimoine.

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