La lettre des fusions-acquisition et du private equity

La durée des engagements

La dissolution par survenance du terme, un couperet à anticiper

Publié le 14 avril 2023 à 9h00

CMS Francis Lefebvre    Temps de lecture 3 minutes

Malgré la faculté de prorogation ex post ouverte par la loi Soilihi du 19 juillet 2019, il est recommandé d’appréhender l’arrivée du terme d’une société avant qu’elle ne survienne, afin que la collectivité des associés reste maître des horloges.

Par Christophe Lefaillet, avocat associé en corporate/fusions et acquisitions et en fiscalité (droits d’enregistrement et IFI). Il intervient particulièrement dans les opérations de fusionacquisition du secteur immobilier.
christophe.lefaillet@cms-fl.com / David Mantienne, avocat counsel en corporate/ fusions et acquisitions. Il intervient principalement en matière d’opérations de fusion-acquisition, de private equity et de restructuration de groupes de sociétés, pour des clients tant français qu’étrangers.
david.mantienne@cms-fl.com

Conclu pour une durée déterminée de quatre-vingt-dix-neuf ans au plus, le contrat de société est susceptible de prorogation dans les conditions prévues par l’article 1844-6 du Code civil. Soucieux de prévenir la dissolution de plein droit des sociétés dont le terme viendrait à expirer, le législateur a fait en sorte que les associés soient appelés, un an au moins avant la date d’expiration de la société, à délibérer à l’effet de décider si celle-ci doit être prorogée ou pas, cette responsabilité incombant aux dirigeants de la société. A défaut, tout intéressé peut solliciter du président du tribunal judiciaire ou de commerce, selon le cas, la désignation d’un mandataire chargé de provoquer la consultation des associés.

Les enjeux attachés à la dissolution tiennent principalement à la radicalité de ses effets, une société dissoute voyant sa capacité juridique très largement amputée, sa personnalité morale ne survivant que pour les seuls besoins de sa liquidation. Aussi le maintien de son activité et la persistance de son affectio societatis au-delà de son terme caractérisent-ils l’existence d’une société de fait.

Afin d’atténuer l’irréversibilité de la sanction attachée à l’absence de prorogation avant l’expiration de la durée de la société, la loi Soilihi du 19 juillet 2019 a instauré une « session de rattrapage » pour les entreprises négligentes. Désormais, lorsque la consultation des associés n’a pas eu lieu, le président du tribunal statuant à la demande de tout associé dans l’année suivant la date d’expiration de la société peut constater « l’intention des associés de proroger la société » et autoriser leur consultation à titre de régularisation dans un délai de trois mois1. Lorsque la société est prorogée, « les actes conformes à la loi et aux statuts antérieurs à la prorogation sont réputés réguliers et avoir été accomplis par la société ainsi prorogée ».

Une procédure de régularisation encadrée

Le recours à ce « parachute ventral » est donc subordonné à une action judiciaire, mais aussi à ce que l’entité concernée ait poursuivi son activité en fonctionnant normalement et, surtout, que son affectio societatis ait perduré, l’hostilité d’un associé (fût-il minoritaire) à la prorogation étant de nature à la compromettre.

D’autres solutions auraient pu être préférées à cette procédure de régularisation. L’une, pragmatique, aurait pu consister à exiger du greffe l’envoi d’un courrier à chaque société dès lors qu’aucune décision de prorogation n’a été publiée un an avant l’arrivée de son terme, intimant à ses dirigeants d’agir en conséquence. L’autre, plus structurante, consisterait à admettre, à l’instar de nombreux droits étrangers, la durée illimitée du contrat de société auquel les associés seraient libres de mettre fin dans les conditions de l’article 1844-7 du Code civil2, l’horizon d’une société étant sauf exception plus liée à sa prospérité qu’à un nombre d’années par essence abstrait s’agissant d’une personne morale.

Hormis la procédure de régularisation ex post décrite ci-dessus, aucune prorogation rétroactive - pas plus que tacite - n’est admise. Passé le délai susvisé d’un an, le salut de la société dissoute par l’arrivée de son terme ne peut passer que par son absorption par une autre société, non dissoute celle-ci, afin de la faire revivre au travers de la société absorbante qui se verra transmettre l’ensemble des éléments actifs et passifs composant le patrimoine de la société dissoute. Une telle fusion n’est cependant possible pour les sociétés commerciales qu’à la condition que la répartition des actifs de l’absorbée entre ses associés n’ait pas fait l’objet d’un commencement d’exécution3.

 

1. Article 1844-6 al. 4 du Code civil.

2. Cf. C. Coupet, « Loi du 19 juillet 2019 de simplification, de clarification et d’actualisation : miscellanées de droit des sociétés », BJS oct. 2019, p. 37.

3. Article L. 236-1 al. 3 du Code de commerce.


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