La lettre des fusions-acquisition et du private equity

Décembre 2019

Le caractère exécutoire du contrat étalé dans le temps

Publié le 6 décembre 2019 à 16h25

Géraldine Machinet

Si le contrat est conclu dès la rencontre des volontés des parties, ces dernières peuvent choisir d’aménager la prise d’effet de leurs obligations contractuelles. Cette prise d’effet différée fait pleinement partie de l’acquisition du caractère exécutoire du contrat qui s’étale, dans ces conditions, dans le temps.

Par Géraldine Machinet, avocat counsel en droit immobilier. Elle intervient tant en conseil qu’en contentieux, notamment en matière de baux commerciaux. geraldine.machinet@cms-fl.com 

Lors de la formation du contrat, les parties ont la faculté de choisir d’anticiper la prise d’effet de leurs obligations contractuelles, cet accord aboutissant à une prise d’effet rétroactive du contrat. A titre d’exemple, lors de la conclusion d’un renouvellement de bail commercial au 30 juin, les parties peuvent librement convenir d’une prise d’effet du renouvellement au 1er janvier précédent la date de conclusion du bail. Cette prise d’effet rétroactive constitue l’équilibre économique du bail renouvelé puisque c’est à compter de cette prise d’effet anticipée que le preneur va s’acquitter du nouveau loyer majoré par rapport au loyer précédemment acquitté.

Cet aménagement du temps contractuel par les parties peut néanmoins être bousculé par l’intervention du législateur. En effet, cette dichotomie entre prise d’effet rétroactive et date de conclusion du contrat devra être prise en compte en cas d’entrée en vigueur d’une nouvelle loi. Dans la plupart des cas, la nouvelle loi prévoit des dispositions spécifiques relatives à sa date d’entrée en vigueur ; ces dispositions transitoires visant expressément la date de conclusion du contrat (et non sa date de prise d’effet) ; un des récents exemples en date étant l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats et des obligations, cette nouvelle loi s’appliquant, dans la plupart des cas, aux contrats conclus à compter du 1er octobre 2016.

Les parties peuvent également convenir de conditionner leur accord et de différer l’entrée en vigueur de leurs obligations contractuelles jusqu’à la réalisation d’un évènement futur et incertain en prévoyant que le contrat est affecté d’une condition suspensive. La défaillance de cette condition suspensive va anéantir le contrat conformément aux dispositions de l’article 1304-6 du Code civil prévoyant qu’«en cas de défaillance de la condition suspensive, l’obligation est réputée n’avoir jamais existée». Dans cette hypothèse, le contrat sera effacé et les parties déliées de tout engagement. En pratique, il conviendra de prévoir que l’ensemble des sommes versées et des garanties octroyées disparaîtront et devront être restituées par le cocontractant. En cas de réalisation de la condition suspensive, le contrat prendra effet au jour de la réalisation de la condition à moins que les parties n’aient convenu que la réalisation du contrat rétroagirait au jour de la conclusion du contrat (art. 1304 -6 du Code civil).

Les cocontractants peuvent aussi décider de différer dans le temps la prise d’effet de leurs obligations contractuelles sans pour autant entendre conditionner la formation du contrat qui est valablement formé et pleinement applicable. Les parties vont donc devoir négocier les obligations afférentes à deux types de périodes, la période dite «intermédiaire» jusqu’à la prise d’effet différée du contrat et la période postérieure à cette prise d’effet. Par exemple, en matière de vente de fonds de commerce ou immobilière, les parties concluent dans un premier temps une promesse de vente prévoyant les obligations spécifiques du vendeur pendant la période intermédiaire durant laquelle le vendeur ne devra pas altérer le fonds de commerce ou l’immeuble ; sa gestion et ses actes étant particulièrement encadrés jusqu’à la prise d’effet du contrat. De même, en matière de bail commercial en l’état futur d’achèvement, si le bail ne prend effet qu’à l’achèvement de l’immeuble, il n’en reste pas moins que le bailleur est tenu, dans la période préalable à l’achèvement, à une obligation de construire les locaux loués conformément aux prévisions des parties ; ses obligations étant pleines et entières avant la prise d’effet du bail.


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