Impression soleil couchant
Le marché du travail américain ressemble à un tableau impressionniste : des jeux d’ombres et de lumières, on perçoit bien quelque chose mais, de près, les détails sont flous. Premièrement, la précision des statistiques économiques s’est détériorée. Le BLS (Bureau des statistiques de l’emploi) vient de fortement revoir à la baisse les créations d’emplois non agricoles aux Etats-Unis pour la période d’avril 2024 à mars 2025 : de 1,8 million à seulement 0,9 million. Il en avait été de même avec une révision de -818 000 pour l’année précédente. Si le BLS a toujours affiné ses chiffres, les révisions étaient beaucoup moins importantes dans le passé : en moyenne de 230 000 durant les années 2015 à 2023. En outre, les différentes données du marché de l’emploi n’offrent pas le même panorama : le taux de chômage est resté plutôt stable et bas, aux alentours de 4,2 % durant les douze derniers mois, quand les créations d’emploi s’effondraient, pour passer de plus de 200 000 en moyenne mensuelle sur le dernier trimestre 2024 à seulement 22 000 récemment.
Peut-on trouver une explication à cette apparente incohérence ? La démographie peut brosser une partie de l’explication : la population étrangère résidente aux Etats-Unis a baissé de 1,4 million de personnes durant les six premiers mois de l’année, réduisant naturellement la demande de travail et donc le taux de chômage. Alors quelles conclusions tirer de tous ces indicateurs ? Les nouvelles demandes d’allocation chômage – 263 000 début septembre, un record depuis fin 2021 (même si des questions se posent sur la qualité de la donnée) – et le taux de chômage élargi aux catégories en sous-emploi (temps partiel subi, etc.) à 8,1 % fin août, contre 7,5 % en fin d’année dernière, sont malheureusement les dernières touches du tableau qui confirment cette impression de soleil couchant sur le marché de l’emploi.
Arnaud-Guilhem Lamy est responsable des stratégies obligataires euro aggregate au sein de BNP Paribas Asset Management.
Arnaud-Guilhem Lamy