L'analyse de Thierry Million
La puissance de feu de la BCE s’émousse
Comme attendu, la BCE s’est résolue à sortir l’artillerie lourde pour son nouvel assouplissement monétaire. Toutefois, les dispositifs utilisés ne présentent pas de réelles nouveautés. L’institution a réduit son taux de dépôt de 0,10 point de base à -0,50 %, cette fois associé à un système de paliers (tiering), allégeant pour les banques le coût de leurs réserves excédentaires. S’y ajoute une reprise des acquisitions d’actifs au rythme mensuel de 20 milliards d’euros, dès novembre. Ce montant relativement modeste serait maintenu aussi longtemps que nécessaire. Enfin, la BCE a généreusement assoupli les conditions du TLTRO III, espérant que les banques ouvrent au maximum les vannes du crédit.
Néanmoins, cet ensemble de mesures donne l’impression que les moyens de la BCE ne sont pas aussi illimités qu’elle le proclame et que la question des effets secondaires se pose. En réalité, au-delà de - 0,50 % sur le taux de dépôt, la pénalisation du secteur financier devient si intense que la stimulation de l’économie réelle se grippe. Concernant la reprise des achats, Mario Draghi a préféré jouer sur la durée illimitée du programme que sur son volume, afin d’éviter de lancer le débat politico-juridique d’un relèvement du ratio d’emprise par émission aujourd’hui fixé à 33 %.
Ainsi, en l’absence de crise majeure, les anticipations de baisses de taux devraient s’amenuiser. En revanche, les actifs risqués (titres d’entreprises et d’Etats périphériques) restent attractifs, car les primes de risque vont rester comprimées grâce aux injections de liquidités quasi permanentes.
Thierry Million est directeur de la gestion obligataire d'Allianz Global Investors France. Ingénieur diplômé en Informatique de l’Institut de Recherche polytechnique de Mulhouse, titulaire d’un DESS en finance de l’Institut Supérieur de Gestion et diplômé de la SFAF, Thierry Million débute sa carrière en 1987 en tant que courtier et responsable de la Trésorerie chez Dynabourse. Il est ensuite gérant obligataire à la Banque Vernes. En 1994 il rejoint Dresdner RCM Gestion en tant que directeur de la gestion obligataire. En 2001 il devient Responsable des activités Product Management et Conseil d’AGF Asset Management. A partir de 2003, il prend la responsabilité des portefeuilles diversifiés des institutionnels et entreprises, ainsi que de la recherche quantitative et économique. En 2006, il est nommé directeur de la recherche économique et quantitative et du Conseil, puis directeur de la gestion obligataire d’Allianz Global Investors en 2008. Depuis 2013, il est directeur de la gestion obligataire institutionnelle.
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