Recrutement

Le secteur bancaire mise sur l’alternance

Publié le 24 février 2023 à 12h00

Chloé Consigny    Temps de lecture 7 minutes

Confrontés à une population salariée vieillissante et à une pénurie de talents, les établissements bancaires misent sur l’alternance. Largement portées par le contexte législatif, les stratégies pour capter et fidéliser ces jeunes recrues se multiplient.

Au cours de l’année 2021, 6 900 nouveaux contrats d’apprentissage ont été engagés par les établissements bancaires membres de l’AFB (Association française des banques). Un chiffre qui renoue avec les ordres de grandeur d’avant la crise sanitaire. A la fin de l’année 2021, 16 400 alternants étaient ainsi présents dans les banques françaises (périmètre de la Fédération bancaire française), soit l’équivalent d’un salarié sur vingt. Le recours à cette typologie de contrats progresse et s’accompagne d’un effort sensible sur l’emploi des jeunes. Ainsi, en 2021, sur les 40 300 nouvelles embauches réalisées, plus de la moitié concernaient des personnes de moins de 30 ans. Celles-ci ne représentaient que 46 % des nouvelles embauches deux ans auparavant. Chez BNP Paribas, plus de 2 500 alternants ont rejoint le groupe en 2022 dans toute la France. BPCE en dénombre 3 700, tandis que Société Générale totalise 1 700 alternants.

Des effectifs vieillissants

Il faut dire que le secteur bancaire doit aujourd’hui faire face à des effectifs vieillissants. Si l’âge moyen des collaborateurs du secteur s’établit à 42,8 ans – soit un niveau équivalent au secteur de l’assurance – certaines entités sont plus touchées que d’autres par des effectifs vieillissants. C’est le cas par exemple de BNP Paribas Cardif, organisation au sein de laquelle la moyenne d’âge se situe désormais autour de 50 ans, et s’accompagne de problématiques spécifiques aux aidants familiaux qui sont désormais très nombreux. L'analyse est la même du côté de Société Générale. « Depuis quelques années, notre stratégie en faveur de l’emploi des jeunes participe au rééquilibrage de notre pyramide des âges », souligne Emmanuelle Dal-Molin, Talent Acquisition au sein du groupe Société Générale.

«Depuis quelques années, notre stratégie en faveur de l’emploi des jeunes participe au rééquilibrage de notre pyramide des âges. »

Emmanuelle Dal-Molin Talent Acquisition ,  Société Générale

Une forte proportion de contrats d’alternance débouchant sur un CDI

Pour sa part, le groupe Société Générale comptait en son sein en 2020, 5 200 jeunes de moins de 26 ans, dont 1 500 alternants, les autres étant des salariés mais également des stagiaires et des VIE. En 2023, le groupe espère porter son nombre d’alternants à 2 000. En termes de niveau de formation, les alternances à bac + 2 restent largement minoritaires au sein des banques (6 % des nouveaux contrats signés en 2021, selon les chiffres de l’AFB). Les bac + 4 et bac + 5 représentent quant à eux respectivement 27 et 68 % des nouveaux contrats signés. Cette première incursion dans le monde professionnel débouche très généralement sur une embauche. Selon les données de la FBF, en 2021, le taux de transformation des contrats d’apprentissage s’élevait à 42 %. Par ailleurs, huit jeunes sur dix trouvent un emploi à l’issue de leur alternance. Au sein de Société Générale, un autre chiffre est avancé : sur 100 juniors embauchés, 60 proviennent du « vivier » du groupe, c’est-à-dire d’anciens alternants, stagiaires et VIE. Ainsi, à l’occasion de leur alternance, les jeunes recrues sont sollicitées par e-mail. « Nous leur rappelons qu’ils ont accès à la Bourse de l’emploi et leur donnons à voir le champ des possibles en capitalisant sur leur expérience », indique Emmanuelle Dal-Molin. « Nous leur exposons les opportunités au sein d’autres business unit mais également dans toute la France. »

«Nous proposons de nombreux postes en alternance sur l’ensemble des métiers du groupe, notamment au sein de notre réseau d’agences, notre banque d’affaires ou encore dans nos équipes IT et cybersécurité, marketing. »

Pierre-Henri Havrin Directeur du recrutement et de la mobilité ,  BNP Paribas

Près de 300 métiers concernés

Pour séduire, les responsables ressources humaines des grandes banques mettent en avant la profusion de métiers proposés par les banques, depuis la banque de détail, à la banque de grande clientèle en passant par l’ensemble des fonctions de la direction centrale, ou encore l’IT. « Nous proposons de nombreux postes en alternance sur l’ensemble des métiers du groupe, notamment au sein de notre réseau d’agences, notre banque d’affaires ou encore dans nos équipes IT et cybersécurité, marketing », précise Pierre-Henri Havrin, directeur du recrutement et de la mobilité chez BNP Paribas. « Nous sommes particulièrement pourvoyeurs de contrats d’alternance sur les métiers des réseaux de clientèles, l’IT et la cyberdéfense. » Pour capter ces jeunes recrues, les établissements bancaires se placent très en amont, aux côtés des grandes écoles et des universités. Certains choisissent de créer leur propre centre de formation, à l’instar de BNP Paribas qui, en mars 2022 a lancé B-School by BNP Paribas, un programme de formation d’apprentis délivrant un bachelor « banque omnicanal ». L’organisme a pour ambition de former 600 alternants à fin 2025. De fait désormais, la plupart des acteurs du secteur, à l’instar de Crédit Mutuel, Crédit Agricole ou encore BPCE possèdent leur propre organisme de formation. « Les branches bancaires ont été les premières à créer leur centre de formation telle que l’Ecole supérieure de la banque ou le CFA Difcam », explique André-Guy Turoche, directeur des affaires sociales de l’Association française des banques. « Aujourd’hui toutes les banques sont en réflexion pour créer leur propre centre. »

Ce que dit la loi

  • La loi du 5 septembre 2018 « Pour la liberté de choisir son avenir professionnel » s’est accompagnée d’une réforme de l’apprentissage. Celui-ci est favorisé, via la libéralisation du marché à l’ensemble des organismes de formation qui souhaitent dispenser des actions de formation par apprentissage et pour lesquelles un niveau de financement pour chaque contrat est assuré, et revalorisé : le salaire des apprentis est revu à la hausse, de même que les aides à destination des entreprises. Le public cible est par ailleurs élargi, les contrats étant ouverts jusqu’à l’âge de 29 ans révolus. L’objectif affiché par le gouvernement est clairement d’« ancrer la France comme Nation de l’apprentissage ». 
  • La réforme s’accompagne d’une aide financière d’un montant de 6 000 euros versée à toutes les entreprises pour l’embauche d’un alternant de moins de 30 ans. Début janvier 2023, cette aide a été reconduite, jusqu’à la fin du quinquennat. Des mesures suivies d’effets : alors que 525 600 nouveaux contrats d’alternance ont été signés par les entreprises en 2020,  800 000 l’ont été deux années après. L’objectif fixé à l’horizon 2027 est d’un million d’alternants chaque année dans les entreprises françaises. 
  • Dans le secteur bancaire, cette réforme a eu pour incidence une augmentation importante des contrats d’apprentissage (formation initiale), au détriment des contrats de professionnalisation, (formation continue). Ainsi, en 2021, les contrats d’alternance en apprentissage représentaient 90 % des nouveaux contrats signés, contre 45 % seulement en 2015, selon les chiffres de l’AFB.

Des profils IT particulièrement recherchés

Société Générale s’est placé dès 2018 aux côtés de l’école Simplon en créant une IT School « Nous avons imaginé une formation de développeur full stack, permettant de répondre aux besoins croissants de notre organisation », explique Emmanuelle Dal-Molin, « Les candidats sont sélectionnés en lien avec l’école Simplon puis s’engagent dans une alternance d’une durée de 18 mois. A l’issue de cette alternance, ils sont détenteurs d’un diplôme de développeur full stack. Il est bien évident que s’ils souhaitent poursuivre au sein du groupe, nous sommes tout à fait preneurs. » Des recrues particulièrement bienvenues dans une période de tension sur les métiers de l’IT. 

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