ISR & Capital humain 2023 - Le compte-rendu

Quel est le rôle des fonds emploi dans la construction d’une société plus équitable ?

Publié le 1 février 2024 à 18h32

Séverine Leboucher    Temps de lecture 4 minutes

En contribuant à la création d’emplois, les investisseurs participent à la cohésion sociale des territoires. Les publics les plus fragiles peuvent être plus particulièrement visés.

 Parmi les enjeux sociaux sur lesquels les investisseurs se focalisent, l’emploi a une place particulière. « L’emploi est à la convergence de beaucoup de thématiques différentes : avoir accès à un emploi facilite l’accès aux soins, au logement, à un emprunt… C’est valorisant en termes de cohésion sociale », met en avant Julie Fardoux, responsable stratégie ESG chez BFT IM, qui a créé une stratégie d’investissement en actions cotées autour de cet enjeu. Une conviction que partagent également les investisseurs de l’univers non coté. « Le critère de l’emploi est prépondérant, confirme Cyrille Roustang, responsable du private equity à la direction des investissements et du financement d’AG2R La Mondiale. Cela répond à notre raison d’être : contribuer à consolider l’économie et les emplois, qui sont le socle de la protection sociale. »

Un focus sur les jeunes

L’objectif est tout d’abord de stimuler la création d’emplois en France. « Sur trois ans, les entreprises que nous avons en portefeuille ont créé 6 % d’emplois supplémentaires, là où l’indice de référence en a détruit plus de 4 % », indique Julie Fardoux. Certains acteurs ciblent plus particulièrement les zones les plus fragiles. « 7 % de la population – et 15 % des jeunes – vit dans des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QVP) et 5 % dans des zones de revitalisation rurale : soutenir l’emploi et les entrepreneurs sur ces territoires-là est profondément social », pointe Mathieu Cornieti, CEO d’Impact Partners, dont les fonds de private equity ont par exemple permis la création de plus de 300 commerces dans les QVP, avec 3 000 emplois à la clé. Une approche géographique que partage AG2R La Mondiale : « Depuis 2013, nous investissons 10 % de l’allocation annuelle en non-coté dans des fonds régionaux : au-delà de l’emploi, la thématique de la territorialité est également importante », complète Cyrille Roustang.

Le prisme de la cohésion sociale pousse aussi les investisseurs à s’intéresser aux pratiques RH des entreprises. A travers des actions d’engagement auprès des entreprises de son fonds, BFT IM s’est ainsi focalisé sur la question de l’emploi des jeunes. « Nous leur avons demandé si elles avaient des objectifs de part des jeunes dans leurs effectifs, si elles mesuraient le taux de transformation des contrats d’alternance en CDI ou encore leur taux de rétention des jeunes salariés », signale Julie Fardoux. Chez AG2R La Mondiale, l’accent a récemment été mis sur la question du partage de la valeur. « Sur les 800 entreprises françaises que nous finançons via nos investissements dans des fonds de private equity, environ 70 % ont déjà mis en place des mécanismes comme l’intéressement, la participation ou l’actionnariat salarié », indique Cyrille Roustang, qui souhaite désormais inciter l’ensemble de ses sociétés de gestion partenaires à s’appuyer sur la charte éditée par France Invest sur ce sujet en juin 2023.

Des données difficiles à homogénéiser

Quantifier, de manière homogène, l’ensemble de ces problématiques reste toutefois un défi pour les investisseurs. « Les questions sociales sont encore plus dures à appréhender que le climat, qui n’est pourtant pas simple, reconnaît Julie Fardoux. Chez BFT IM, nous avons décidé de travailler avec l’agence de notation spécialisée sur l’emploi Humpact. Pour les sociétés cotées, cela nous donne accès à 150 sous-critères (données quantitatives sur l’emploi, avec un ciblage sur les jeunes, les seniors et les personnes en situation de handicap, données sur les politiques sociales…). » Des informations qui permettent aux gérants de cibler les meilleurs élèves.

Du moins en France, car les analyses touchant au pilier social s’exportent assez mal. « La Commission européenne avait promis de créer une taxonomie verte et une taxonomie sociale, mais cette dernière est et restera aux oubliettes, regrette ainsi Mathieu Cornieti. La raison est très simple : pour la taxonomie verte, il existe un objectif compris par tous les Européens, à savoir éviter le réchauffement climatique. Sur le sujet social, il n’y a pas cet objectif commun. Qu’est-ce qu’un emploi décent ? Selon que l’on s’adresse à un Roumain ou à un Danois, on n’aura pas la même réponse. Et ce sera toujours le cas dans dix ans. » Un constat qui ne rend que plus légitimes les efforts des investisseurs au plus près du terrain. 

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