Pour Pascal Coret, directeur adjoint du département gestion des placements en charge des segments obligataires à la Caisse des dépôts, la hiérarchie traditionnelle des rendements entre émetteurs souverains et corporate est remise en cause. Pour autant, il n’envisage pas de réallocation massive entre les deux classes d’actifs de la part des grands institutionnels.
Certaines grandes entreprises s’endettent désormais à un coût inférieur à celui de l’Etat français. Ce décalage surprend les commentateurs des marchés financiers. Comment l’interprétez-vous ?
Ce phénomène de resserrement significatif entre les taux des dettes souveraines et des dettes d’entreprises fait l’objet de nombreux commentaires depuis quelques semaines, en particulier depuis les deux dernières dégradations de la dette souveraine française, mais il n’est pas nouveau. L’an dernier déjà, on constatait un resserrement des spreads entre ces dettes. Dans ce contexte, des obligations d’émetteurs très bien notés peuvent traiter sur le marché secondaire avec des rendements inférieurs à ceux de la dette de l’Etat (ce qu’on a déjà vu ailleurs, en Italie par exemple). La véritable question est de savoir si cette tendance va perdurer. Du côté du crédit bien noté (« investment grade »), l’année 2025 devrait être une année record en termes d’émissions, et pourtant les spreads continuent de se resserrer, preuve que la demande reste très soutenue. Le crédit demeure attractif, tant en valeur relative qu’en valeur absolue. Les bilans des entreprises sont sains : elles ont réduit leur levier financier au niveau agrégé et leurs résultats restent bien orientés, malgré la hausse des droits de douane aux Etats-Unis. Nous observons ainsi davantage d’améliorations de notation que de dégradations. A l’inverse, la situation est moins favorable pour la dette souveraine : aux Etats-Unis, en Allemagne comme en France, le montant de dettes à émettre continue d’augmenter en absolu comme par rapport au PIB. Ainsi, aux Etats-...