Les raisons de la myopie des investisseurs
Depuis le début de l’année, les nuages s’accumulent (risque de hard Brexit, tensions sino-américaines, crise à Hong Kong, tensions entre les Etats-Unis et l’Iran, etc.).
L’incertitude induite s’est traduite par un fort repli des enquêtes de confiance, notamment dans le secteur manufacturier, dont l’activité se contracte à l’échelle mondiale. Et les courbes de taux se sont inversées, au point de relancer le débat sur leur caractère annonciateur de la prochaine récession. Même si, récemment, une détente est perceptible sur plusieurs fronts à la fois (coalition pro-européenne en Italie, recul probable de la date butoir pour le Brexit, volonté de la Chine et des Etats-Unis d’apaiser la situation, etc.), les risques baissiers subsistent, notamment en Europe.
En dépit de ces éléments anxiogènes, les Bourses continuent de grimper. La correction qu’elles ont connue durant l’été n’aura été que de courte durée. Pourquoi cette myopie de la part des investisseurs ? On peut avancer deux éléments de réponse de nature différente. D’une part, si la conjoncture se dégrade fortement, les politiques budgétaires prendraient sans doute le relais des politiques monétaires, avec la bénédiction des banques centrales, ce qui peut rassurer. D’autre part, et surtout, les actions européennes offrent intrinsèquement un rendement supérieur à celui des obligations (ainsi qu’une meilleure liquidité). Dans un univers de taux négatifs, l’attractivité des actions se juge de moins en moins à l’aune des profits des entreprises et de plus en plus à celle de leur rendement intrinsèque. Dit autrement, les investisseurs seraient prêts à payer leurs actions plus cher (c’est-à-dire avec des multiples structurellement plus élevés), faute de rendement du côté des emprunts d’Etat.
Didier Borowski est responsable de la recherche sur les politiques macroéconomiques au sein de l’Amundi Investment Institute. Auparavant, il a exercé plusieurs fonctions : responsable de la stratégie Taux et Changes, co responsable de l’équipe de Stratégie et Recherche économique, responsable de la macroéconomie puis plus récemment responsable global views. Avant de rejoindre Amundi, il était économiste et stratégiste senior de Société Générale Asset Management (2000-2009). Didier Borowski a commencé sa carrière au sein de la Direction de la Prévision du Ministère de l’économie et des finances. Il a également exercé les fonctions d’expert auprès de la Commission européenne. Didier Borowski est Docteur ès sciences économiques. Il a été Professeur associé à l’Université Paris Nord (2007-2011) puis a enseigné plusieurs années à l’université Paris-Dauphine.
Didier Borowski