Recrutement

Intégration des candidats : ne pas rater le coche

Publié le 14 juin 2022 à 16h40

Anne del Pozo    Temps de lecture 7 minutes

Dans un marché de l’emploi particulièrement tendu pour les fonctions financières, la phase d’intégration des nouveaux candidats est essentielle et doit permettre de limiter le turnover. Une démarche qui fait de nouveau la part belle au présentiel.

Selon une étude réalisée dans le cadre du Guide des salaires Robert Half 2022 et publiée en mars, 51 % des dirigeants constatent aujourd’hui un turnover supérieur à celui constaté avant la crise sanitaire. 71 % des dirigeants français se disent préoccupés par leur capacité à retenir les collaborateurs de valeur. « La rétention des nouveaux candidats est un enjeu d’autant plus important pour les métiers de la finance d’entreprise que, sur ces profils, le marché de l’emploi est particulièrement tendu, affirme Olivier Audibert, consultant senior audit et expertise comptable chez Fed Finance. Le recrutement doit donc se faire de manière à gérer la “volatilité” des candidats. »

Dans ce contexte, la phase d’intégration des nouveaux arrivants est primordiale et il convient de ne pas la négliger, voire de l’anticiper. « Sur le marché de la finance, un salarié sur trois signant une promesse d’embauche ne prend pas son poste, constate Jérôme Blanc, senior manager chez Robert Half Aix-en-Provence. Pendant ses mois de préavis, le candidat peut en effet continuer à entreprendre les démarches de recherche ou rester à l’écoute du marché pour éventuellement trouver encore mieux que la promesse d’embauche qu’il a signée. »

Selon Robert Half, la période d’intégration commence donc de manière imperceptible dès l’entretien de recrutement, et se termine à la fin de la période d’essai. D’après le cabinet de recrutement, il s’agirait d’ailleurs de l’une des principales évolutions des processus d’intégration des candidats ces derniers mois. « Auparavant, l’intégration commençait à l’arrivée des candidats dans l’entreprise, précise Jérôme Blanc. Aujourd’hui et au regard de la tension sur le marché des métiers de la finance, il est indispensable que les entreprises qui recrutent créent chez le candidat un sentiment d’appartenance très rapidement. » Pour Cristina Newton, adhérente de la DFCG et directrice du contrôle de gestion, l’intégration commence donc avant la période d’essai. « A partir du moment où la promesse d’embauche est signée et avant l’arrivée du candidat, il est recommandé de l’appeler régulièrement, précise-t-elle. Ceci pour savoir notamment comment se passe sa période de préavis et surtout pour lui faire sentir qu’il est attendu dans la nouvelle entreprise. »

Des programmes d’intégration adaptés au profil du candidat

Il est également conseillé de préparer l’accueil du candidat en amont de son arrivée et de mettre en place à cet effet un planning d’intégration. « Ce dernier doit notamment comprendre une phase de présentation au candidat des équipes directes et indirectes, de ses managers mais également des autres services de l’entreprise, poursuit Jérôme Blanc. Ce planning permet également de programmer les différentes formations que le candidat devra suivre dès son arrivée, ainsi que les premières réunions. » Le plan d’intégration peut également être défini avec le candidat, dès son arrivée et selon ses besoins comme c’est par exemple le cas chez Saint-Gobain. Les candidats sont ainsi accueillis soit par leur responsable d’équipe soit par un collègue qui a la même fonction qu’eux. « Ils procèdent alors ensemble au monitoring de leur poste afin d’évaluer leurs besoins en termes de formations sur les processus de gestion interne et les outils utilisés puis de bâtir ensemble un plan d’intégration, précise Daniel Biarneix, directeur financier adjoint de Saint-Gobain et président de l’AFTE. La formation ensuite mise en place peut durer entre deux et six mois en fonction du poste. »

Un retour au bureau nécessaire

Dans certaines entreprises, ces programmes d’intégration ont sensiblement évolué suite à la période Covid. C’est notamment le cas chez Danone. « Depuis la pandémie, le télétravail est devenu une norme chez Danone, explique Florence Saliba, directrice financement et trésorerie de Danone. Il s’agit d’un mode de travail que nous prenons en compte dans l’intégration des nouveaux candidats, sachant qu’au sein de notre entreprise, chacun choisit ses jours de télétravail et que nous considérons que l’intégration se fait mieux en présentiel. Nous adaptons donc nos plannings d’intégration et de formation sur la base de ces postulats. » La mise en place de ce programme est d’autant plus importante pour le candidat que chez Danone, son intégration peut durer de trois à quatre mois pour les juniors, jusqu’à un an pour les postes à haute responsabilité. « Leur intégration s’étale alors sur l’ensemble du cycle financier annuel de l’entreprise, ajoute Florence Saliba. Elle doit permettre de s’arrimer à l’entreprise et de donner du sens à ce que chacun fait au quotidien, et ce à quoi contribue l’équipe trésorerie. »

«Depuis la pandémie, le télétravail est devenu une norme chez Danone, mais nous considérons que l’intégration se fait mieux en présentiel.»

Florence Saliba Directrice financement et trésorerie ,  Danone

Cette approche itérative et en présentiel est aussi souvent plébiscitée pour les jeunes qui sortent d’école ou d’université. Il arrive que ces jeunes, par manque d’expérience en entreprise, n’appréhendent pas suffisamment la finance de façon concrète. « Certains contrôleurs de gestion arrivent avec des lacunes en comptabilité générale, en techniques de contrôle de gestion et sur les outils utilisés, précise Cristina Newton. Ils ont à cet effet besoin d’être encadrés dès leur prise de fonction pour renforcer leurs compétences. A leur arrivée, nous leur expliquons également leurs missions, les dates butoirs à respecter, le degré d’exigence attendu. Pour ce qui de la nouvelle organisation du travail, partiellement en distanciel, nous expliquons aux personnes nouvellement arrivées en entreprise que leur présence sur les périodes de clôture comptable, de budget et de forecasts est indispensable. Cette présence nous permet de nous assurer, en qualité de managers, que la compréhension des processus est complète et que la communication avec le reste de l’équipe est fluide. »

En formalisant ainsi ces différents temps de rencontres et de formation, le candidat est mieux à même de se projeter rapidement dans son entreprise, son environnement de travail et son poste.

Une intégration qui passe aussi par la culture d’entreprise

Pour favoriser cette projection et développer le bien-être du candidat au sein de l’entreprise, son intégration ne doit pas être uniquement focalisée sur ses techniques métiers. Elle doit lui permettre également de mieux connaître l’entreprise dans son ensemble, ses métiers et ses valeurs. « Nous dispensons à cet effet à nos nouvelles recrues notre formation Dan Discovery, sur trois jours, poursuit Florence Saliba. Elle a pour vocation de présenter nos produits et les activités du groupe, mais également de leur permettre de mieux comprendre notre fonctionnement et ce à quoi ils contribuent. » Pour faciliter l’intégration de ses nouveaux arrivants, Danone a également créé, pendant la période Covid, des « meetings Fox » (en référence au Renard dans Le Petit Prince), réunions quotidiennes ou hebdomadaires pendant lesquelles les candidats sont invités à poser des questions à leur manager sur n’importe quel sujet concernant l’entreprise et son fonctionnement et/ou leur mission. La Covid et la pénurie de candidats ont ainsi favorisé le renforcement de l’attention porté aux nouveaux candidats, et ce dès la signature de la promesse d’embauche.

L’accueil groupé des nouveaux candidats peut faciliter leur intégration

Certaines entreprises, tels les cabinets d’audit ou d’expertise comptable, procèdent parfois à l’accueil de plusieurs candidats le même jour. Un processus notamment mis en place dans un cabinet d’audit et d’expertise à Montpellier. « Ce cabinet a ainsi fixé une date pour le premier jour de travail de plusieurs de ses candidats et les a accueillis par un petit-déjeuner suivi d’une visite des locaux, explique Olivier Audibert. Les associés se sont ensuite présentés et ils ont déjeuné tous ensemble. L’objectif était alors de les sensibiliser sur le fonctionnement du cabinet et de procéder à une intégration collective en douceur. »

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