Compétences

Les risk managers étendent le périmètre de leurs attributions

Publié le 5 mai 2022 à 10h00

Anne del Pozo

Très expérimentés, les risk managers représentent des profils d’autant plus rares que leur métier est en pleine évolution. Alors que les incertitudes s’exacerbent, ils tendent à se rapprocher des instances dirigeantes de leur entreprise, tout en étant à même de diffuser la culture du risque auprès des opérationnels.

Portée par un environnement à haut risque, la fonction de risk manager a fortement évolué ces dernières années. Historiquement focalisés sur la gestion des assurances et de la prévention, près d’un tiers des risk managers (31 %) cumulent aujourd’hui les trois activités principales des métiers du risque : ERM (entreprise risk manager/gestion des risques d’entreprise), assurances & préventions, et gestion de crise & continuité d’activité, selon le Baromètre Amrae 2022 des métiers du risk management. Ils sont 38 % à cumuler deux de ces trois activités. « Face à l’augmentation des risques, les entreprises ont besoin d’un gardien du temple, ce qui explique le développement de ce métier, précise Vanessa Dalas, leader de la practice assurance chez Progress Associés. Avant, nous dissociions le directeur ERM du directeur des assurances & prévention. Aujourd’hui, les deux métiers se rejoignent et embarquent même de nouvelles missions liées notamment à la gestion de crise, à la gestion de la compliance, de la RSE, des risques cyber ou encore du contrôle interne. »

«Le marché est d’autant plus en pénurie que plus de la moitié des risk managers sont heureux dans leur poste et qu’ils souhaitent continuer de l’occuper, contre un tiers seulement il y a deux ans. »

Thibault Bulabois Responsable risques & contrôles ,  Groupe FDJ

Une nouvelle place dans l’organigramme des entreprises

Cette montée en puissance se traduit également dans la place qu’ils occupent aujourd’hui au sein de leur organisation. Auparavant rattachés aux directions juridiques ou financières, ils dépendent aujourd’hui davantage de la DGA, de la DGA finance, du secrétariat général ou directement de la direction générale. « 99 % des top risk managers déclarent pouvoir contacter directement ou indirectement la direction générale en cas de besoin, quel que soit leur positionnement par rapport à celle-ci, précise Thibault Bulabois, pilote du Baromètre des métiers du risk management, responsable risques & contrôles, Groupe FDJ. Lors du baromètre 2015 de l’Amrae, ils n’étaient que 62 % à pouvoir le faire. » Par ailleurs, les risk managers participent ou sont de plus en plus invités aux comités des risques, de direction, exécutifs ou d’audit (50 %). Près d’un tiers d’entre eux participent également aux comités HSE/développement durable. « Il leur revient à ce titre de travailler sur la gouvernance des risques », poursuit Vanessa Dalas.

Des compétences techniques évoluant avec la nature des risques

Bien que le périmètre des missions du risk manager s’élargisse, le socle de ses compétences techniques s’articule toujours autour de l’identification et de la cartographie des risques, de leur évaluation, de leur maîtrise, et des plans d’actions à mettre en place pour mieux les prévenir. « Le risk manager doit être en capacité de cartographier les risques de manière de plus en plus fine et pointue, précise Vanessa Dalas. Il doit également disposer d’une palette de compétences liées à la nature des risques et aux assurances qui y sont liées telles que l’assurance crédit pour le risque client, l’assurance cyber pour le risque cyber, l’assurance santé pour ses salariés, etc. Il doit également être en veille sur les risques réglementaires et de compliance qui tendent à se développer. » Si le risk manager a pour principale mission de prévenir et maîtriser les risques, il lui revient également d’identifier les opportunités qui leur sont liées. Un item qui est d’ailleurs entré dans le top 10 des missions des risk managers selon le baromètre de l’Amrae. « Il est devenu un manager d’influence, analyse à ce sujet Vanessa Dalas. Il diffuse la culture du risque auprès des opérationnels, ce qui nécessite d’ailleurs qu’il soit en contact avec eux pour comprendre leurs propres risques et, pourquoi pas, faire en sorte qu’ils deviennent une opportunité de développement plutôt qu’une contrainte, notamment en termes de coûts. Il est une véritable vigie pour son entreprise et doit savoir aussi bien mettre en place rapidement une cellule de crise qu’appréhender des risques qui pourraient survenir sur le long terme. »

Des profils de plus en plus mixtes

Si la fonction risk manager semble encore occupée majoritairement par des hommes, la place des femmes est en progression (+ 2 points par rapport à 2019). Depuis le premier baromètre édité par l’Amrae (2009), ce nombre a doublé passant de 22 % en 2009 à 45 % en 2022. Cette dynamique globale devrait également progressivement – et mécaniquement – s’étendre aux postes de « top risk managers » dans les prochaines années. Cette progression est confirmée par une autre étude interne Amrae, au champ plus limité, qui recense 49 % de risk managers femmes et 51 % de risk managers hommes dans la base des adhérents de l’Amrae.

Une gestion du stress indispensable

Pour remplir ces missions, le risk manager doit avoir des capacités d’écoute et de communication. Ses missions impliquent également de la rigueur et de l’organisation. « Certains soft skills sont plus ou moins attendus dès lors que les risk managers remplissent des missions particulières, souligne Thibault Bulabois. Par exemple, le risk manager en charge de la partie assurance & prévention doit avoir des capacités de négociation ; un responsable crise & continuité doit pour sa part être capable de sélectionner pour la cellule de crise ceux qui sauront résister au stress, aptitude valable pour lui-même quand il y est inclus. »

Un micro-marché sous tension

Les compétences nécessaires à l’exercice de ce métier font du risk manager un véritable expert. « Il s’agit d’un métier d’expérience, ajoute Vanessa Dalas. Pour preuve, la moyenne d’âge est de 47 ans. » Cette expertise et l’augmentation des risques auxquels les entreprises doivent aujourd’hui faire face rendent difficile le recrutement de candidats. « Le marché est d’autant plus en pénurie que plus de la moitié des risk managers sont heureux dans leur poste et qu’ils souhaitent continuer de l’occuper, contre un tiers seulement il y a deux ans », constate Thibault Bulabois. D’autre part, ce marché est assez fermé et se nourrit de lui-même : les candidats font des allers-retours entre le monde de l’assurance et du courtage et celui des entreprises. Pour les attirer, les entreprises sont donc amenées à jouer sur le périmètre de leurs attributions et des risques à gérer. C’est d’ailleurs souvent en fonction de ce dernier point (ainsi que de l’expérience) que leur salaire est déterminé, ce qui explique la très large fourchette des revenus des risk managers. Selon le baromètre de l’Amrae, 51 % des risk managers ont un salaire fixe brut annuel compris entre 50 k€ et 99 k€. 

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