Métier

Les arbitres en assurance crédit ont la cote

Publié le 10 mai 2019 à 17h04

Anne del Pozo

Afin de décider d’assurer ou non un client, les assureurs crédit s’appuient sur l’expertise d’arbitres dont la tâche implique, outre de solides connaissances en analyse financière, des qualités relationnelles éprouvées. Compte tenu de ces critères, les candidats idoines sont rares, ce qui contribue à tirer les rémunérations vers le haut.

Recrutés par les assureurs crédit, les arbitres en assurance sont peu nombreux en France. On en recense en effet quelques centaines seulement. Selon les recruteurs, le métier séduit pourtant de nombreux candidats par l’expertise technique qu’il requiert, les prises de risque qu’il implique et sa dimension humaine. «Les arbitres en assurance crédit ont pour mission d’évaluer le risque client afin de prendre des décisions de garanties et de niveaux d’encours octroyés aux entreprises qui demandent une couverture en assurance crédit», explique Hélène Frasca, senior manager banque et assurance chez Walters People. A cet effet, ils analysent la solvabilité des entreprises sur la base de rapports financiers et de données extra-financières. «Nos arbitres s’appuient sur une base d’informations internationale enrichie en temps réel via une multitude de sources internes et externes, explique David Prunier, responsable arbitrage chez Atradius. Dans les cas les plus sensibles, ces spécialistes prennent contact directement avec le débiteur pour obtenir de l’information parfaitement actualisée sur les performances de l’entreprise.»

La maîtrise de l’anglais

Généralement, chaque arbitre se voit confier le suivi d’un portefeuille client, sur un secteur d’activité donné. C’est la raison pour laquelle ils ont également pour vocation d’analyser et suivre l’évolution des marchés sur lesquels se positionnent les clients de leurs assurés. «Par ailleurs, au-delà de l’arbitrage sur les niveaux de garanties octroyés, les arbitres ont aussi pour mission de développer des relations avec les assurés et les courtiers, et d’échanger avec chaque partie prenante afin d’être en mesure d’expliquer leurs décisions ou encore de recueillir de nouvelles informations pour optimiser les garanties», précise Rodolphe Capendeguy, directeur de l’arbitrage d’Euler Hermes France. Au regard de ces missions, l’arbitre en assurance crédit doit faire preuve d’une expertise financière certaine. Bon expert en diagnostic financier et sur le marché de la finance en général, il doit également maîtriser parfaitement l’environnement sectoriel sur lequel il exerce au quotidien. «L’expertise en analyse financière et sectorielle est essentielle pour exercer le métier d’arbitre», insiste Emilie Dhal, responsable HRBP d’Euler Hermes France.

Alors qu’il est régulièrement amené à justifier ses prises de décisions sur les niveaux de garanties octroyés, les capacités de communication et le sens du relationnel de l’arbitre sont également indispensables. «Plus l’arbitre gagne en responsabilité, plus il défendra directement ses positions vis-à-vis de ses interlocuteurs, observe David Prunier. Le volume d’affaires d’un assuré peut être pénalisé par des décisions de couverture restrictives sur un de ses clients. Nous sommes alors dans le domaine de la prévention, et la capacité de conviction de l’arbitre est essentielle pour justifier la pertinence de ses positions vis-à-vis de l’assuré et de son courtier.» Enfin, pour les arbitres en charge de l’international, la maîtrise de l’anglais est logiquement indispensable. «A l’international, nous devons également tenir compte du contexte géopolitique, qui influence nos prises de décisions, explique Julien Compost, arbitre senior global solutions chez Coface. A cet effet, nous travaillons en collaboration avec les arbitres locaux. Nous sommes aussi amenés à gérer des problématiques diverses et variées, dépendantes des acheteurs situés dans différents pays.»

Des perspectives d’évolution rapides

Compte tenu des compétences recherchées, les profils idoines sont pénuriques. «Il n’existe en effet pas de formation spécifique à ce métier, ce qui explique notamment que les salaires des arbitres juniors (entre 35 000 et 40 000 euros) soient souvent supérieurs à ceux des analystes crédits (salaire d’entrée d’environ 28 000 euros) et que les assureurs crédit s’attachent souvent à former eux-mêmes leurs arbitres», précise Hélène Frasca. Pour la plupart issus d’une formation en master 2 finance ou diplômés d’écoles de commerce, les arbitres ont généralement une première expérience en qualité d’analyste financier ou crédit au sein d’une banque, d’une compagnie d’assurance, d’une société de leasing ou encore ou d’un factor. «Les credit managers dans l’industrie ou les services sont également des profils convoités par les assureurs crédit pour occuper ces fonctions», poursuit Hélène Frasca.

Un parcours qu’a notamment réalisé Rodolphe Capendeguy. Diplômé de l’Ecole supérieure de commerce de Montpellier, avec une spécialisation en credit management, il a rejoint Euler Hermes France en qualité d’analyste crédit pour ensuite prendre un poste d’arbitre confirmé sur la branche papier textile chimie, puis sur la branche agroalimentaire distribution, avant de passer responsable de la branche d’arbitrage électricité d’Euler Hermes France et, enfin, directeur de l’arbitrage. Julien Compost, actuellement arbitre senior global solutions chez Coface, a pour sa part débuté sa carrière en qualité d’analyste crédit chez Natixis Factor avant de prendre sa fonction d’arbitre sur le secteur de l’électronique et des télécom chez Coface. «Très vite, Coface m’a offert l’opportunité d’évoluer à l’international en me proposant un poste dans son entité londonienne puis, plus récemment, celui d’arbitre global solution», explique-t-il. De telles perspectives d’évolution de carrière intéressantes ne font que renforcer l’attrait de ce métier, qui a le vent en poupe.

Arbitre versus analyste crédit : quelle différence ?

Si les missions d’un arbitre au sein d’un assureur crédit et celles d’un analyste crédit au sein d’une banque présentent des similitudes, leur finalité est en revanche différente. «L’arbitre prend la décision d’assurer ou non un acheteur, alors que l’analyste crédit prend la décision d’accorder un crédit, rappelle Guilhem Jeannin, practice manager chez Michael Page Banque & Assurance. De par ses missions, l’arbitre, contrairement à l’analyste crédit, est par ailleurs davantage en interaction avec l’assuré et les acheteurs.»

Sa décision est certes motivée par les résultats d’une analyse financière. «Mais elle l’est également par une analyse plus qualitative issue notamment d’échanges avec l’assuré, poursuit Guilhem Jeannin. C’est d’ailleurs souvent cette dimension relationnelle et humaine du métier qui le rend attractif.»

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