Expertise/IT et Finance

Anticiper et se préparer de façon vertueuse à la facturation électronique

Publié le 13 octobre 2023 à 11h30

Anne Del Pozo    Temps de lecture 7 minutes

Bien que la date de mise en application de la réforme de facturation électronique soit décalée, il est nécessaire, pour les entreprises qui se sont déjà engagées, de maintenir le rythme et pour les autres de commencer à créer la dynamique. Les retours d’expérience des sociétés ayant déjà initié les travaux, à l’image de Manpower France, permettent d’identifier quelques bonnes pratiques dans cette phase de préparation.

Fabrice Milad, directeur facturation chez Manpower France, Renaud Texcier, associate partner chez Argon & Co, conseil en stratégie et transformation des opérations

La réforme est un vecteur de modernisation et doit également être perçue comme une opportunité transformationnelle pour les entreprises, aussi bien pour faire évoluer les modes de fonctionnement internes que pour améliorer les relations avec les partenaires commerciaux. C’est avec cet état d’esprit que les sociétés peuvent tirer le maximum de valeur de la réforme et doivent appréhender ce projet.

Anticiper les points bloquants et les sources d’inefficience des processus de facturation

L’anticipation en amont des évolutions à venir et l’analyse exhaustive et critique des différents flux et processus en place, permettent de dresser un diagnostic des pratiques actuelles. Des pratiques qui sont parfois hétérogènes et complexes, issues d’un historique qui n’a pas forcément été remis en question depuis des années. Ce projet est l’opportunité d’identifier les différents leviers d’optimisation et de redéfinir des processus standards et efficients permettant de gagner en qualité et en productivité dans la production et le traitement des factures.

Analyser les écarts à la réforme pour identifier les points critiques à traiter

L’analyse des flux, des référentiels, des processus, de la conformité fiscale des factures et des capacités des outils à répondre aux différents éléments partagés dans le cahier des charges de la DGFIP est une étape clé pour identifier les écarts et les plans d’action à mettre en place.

En fonction de la maturité des sociétés en termes de dématérialisation, les enjeux et la phase préparatoire seront différents. Pour des entreprises déjà matures gérant un grand volume d’EDI fiscaux, comme Manpower France par exemple (qui a déjà plus d’une trentaine d’EDI fiscaux en place), l’enjeu va être autour de la capacité à faire évoluer les flux en ajoutant de nouvelles données nécessaires dans la réforme. Des entreprises moins matures sur le sujet auront un travail supplémentaire de structuration et de nettoyage des bases tiers. Travail fastidieux mais nécessaire pour s’assurer d’avoir toutes les données réglementaires et pour être en capacité demain d’émettre et de recevoir les factures (et ainsi éviter des rejets de factures et in fine des risques d’impayés). Dans tous les cas, des évolutions dans les ERP sont à prévoir et à anticiper. Il faudra alors rapidement entrer en relation avec les intégrateurs ou éditeurs.

Engager avec les principaux clients et fournisseurs

Travailler sur les flux d’achats et de ventes est l’occasion de repenser la relation fournisseur et la relation client. Il est très vertueux de ne pas cloisonner les travaux aux bornes de l’entreprise mais d’engager les échanges avec les principaux partenaires commerciaux afin de comprendre leurs enjeux et d’appréhender comment ils envisagent de se mettre en conformité. C’est l’occasion de revoir et d’adapter des pratiques parfois historiques et non optimales, et de travailler main dans la main pour s’aligner sur des solutions communes (contenu des échanges, format, outils, etc.). C’est également l’opportunité pour les entreprises les plus avancées sur le sujet d’aider et d’accompagner leurs clients et fournisseurs dans ce projet dans une logique partenariale.

Intégrer l’ensemble des parties prenantes de l’entreprise

La préparation à la réforme doit être un vrai projet d’entreprise, porté par la direction générale. Il est important de mobiliser l’ensemble des acteurs de l’entreprise. Si la direction financière et la DSI sont souvent au cœur de ces projets, d’autres acteurs clés doivent être intégrés pour maximiser la valeur apportée. La direction achats peut profiter de ce travail d’analyse des processus et des fournisseurs pour revoir le panel fournisseurs, mettre sous contrôle les engagements de dépenses et la politique achats. La direction commerciale peut être également mobilisée pour revoir les modalités de fonctionnement avec les principaux clients, voire rassurer des clients parfois interrogatifs sur l’ampleur des évolutions à entreprendre et les choix technologiques et opérationnels à effectuer.

C’est en intégrant tous ces acteurs internes et externes que l’entreprise pourra tirer le maximum de valeur de cette transformation : une amélioration de l’expérience client et fournisseur, un meilleur contrôle du cash, une optimisation des dépenses.

Comment Argon & Co accompagne les entreprises dans cette transformation ?

Argon & Co accompagne les dirigeants dans la stratégie et transformation des opérations.

Nous avons mené de nombreux projets de digitalisation des cycles d’achats et de ventes de la phase amont de diagnostic et de définition de la cible à la phase aval de mise en œuvre, en délivrant des résultats tangibles et pérennes. Par ailleurs, nous sommes indépendants et agnostiques des solutions de digitalisation du marché, et, de ce fait, apportons un conseil objectif pour aider nos clients à faire les bons choix de solution de dématérialisation.

Questions à…Fabrice Milad, directeur facturation, Manpower France

Fabrice Milad a la responsabilité du déploiement de la facturation électronique au sein de Manpower France.

Comment Manpower France a anticipé la réforme de la facturation électronique ?

La société Manpower France s’est positionnée très tôt sur l’importance des changements que nécessite cette réforme. Le monde du travail temporaire est un secteur très complexe avec une multitude de solutions qui touchent les systèmes de facturation. Nous avons considéré que la réforme affecterait notre mode de gestion, nos systèmes d’information et notre organisation de production administrative et comptable. Considérant le caractère stratégique du projet, le sujet a été rapidement pris en charge par le management de l’entreprise en 2021 avec une dynamique qui a embarqué l’ensemble des périmètres concernés.

Nous avons lancé en 2021 un travail d’identification des prérequis à mettre en place qui a permis d’implémenter les évolutions et développements nécessaires en 2022-2023. Par la suite, nous avons réalisé en 2022 un audit d’écart à la norme nous ayant permis d’identifier clairement les impacts et développements à entreprendre pour répondre à la réglementation et définir les plans d’action à initier. Des actions principalement focalisées sur l’intégration des nouvelles données obligatoires dans nos flux, étant donné notre maturité dans la facturation digitale.

Forts de tout cela, nous avons ensuite réalisé un appel d’offres en 2023 pour sélectionner une plateforme de dématérialisation partenaire (PDP).

Où en êtes-vous aujourd’hui ? Comment vous positionnez-vous par rapport au report de la réforme ?

Le travail préparatoire lancé il y a deux ans nous a semblé indispensable pour s’assurer d’une réussite quelle que soit l’échéance de la réforme. Ce travail a d’ailleurs déjà permis de générer de vrais gains économiques et organisationnels pour l’entreprise. Pour en citer quelques-uns, notre taux de dématérialisation de factures s’élève aujourd’hui à 90 %. Nous avons augmenté de 5 points le taux de factures envoyées dans les temps pour se rapprocher progressivement de 100 %, ce qui a permis d’améliorer de 5 jours le DSO sur les grands comptes complexes entre 2022 et 2023, avec un gain de cash significatif.

Aujourd’hui, nous avons sélectionné notre PDP. Notre enjeu est de conserver la dynamique dans ce projet. L’expérience et la connaissance que nous avons développées autour de la réforme nous permettent d’en faire bénéficier nos clients grands comptes et d’engager avec eux des projets communs pour notamment tester les nouveaux flux EDI. Nous nous posons également la question de nous positionner comme pilote dans le cadre de la réforme pour échelonner le déploiement.

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